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Anna Hazare: le symbole indien de la lutte anti-corruption

Les Indiens se soulèvent depuis plusieurs mois contre la corruption qui gangrène le pays, à tous les niveaux de la société. Leur symbole : Anna Hazare, activiste anti-corruption. Portrait de cet admirateur de Gandhi et rappel des derniers événements.

Si le printemps a été celui des révolutions arabes, l’été est définitivement celui de la révolution indienne. Depuis le mois d’avril dernier et pour la première fois en plusieurs décennies, le peuple indien se soulève et manifeste contre la corruption. En Inde, quelque soit le niveau de vie, la simple obtention d’une ligne téléphonique ou d’une admission dans une école nécessite fréquemment un pot-de-vin.

Les Indiens en ont assez de cette situation et le montrent, soulevés par l’action du militant Anna Hazare. Des dizaines de milliers de manifestants ont défilé la semaine dernière en soutien à cet ancien militaire, devenu activiste. A 74 ans, celui que les Indiens las de la corruption ont choisi pour changer la face de l’Inde a opté pour la grève de la faim « jusqu’à la mort » comme pression sur le gouvernement, à l’instar de son modèle le Mahatma Gandhi. « C’est le temps de changer les choses ou de mourir, comme pendant notre lutte pour l’indépendance », dit-il haut et fort.

Des méthodes radicales contestables

Au-delà de la ressemblance physique flagrante entre les deux hommes, il semble qu’ils aient également certains points communs en ce qui concerne leurs méthodes de pression. Anna Hazare, qui se déclare héritier de Gandhi, a également choisi la technique du « jeûne jusqu’à la mort » pour mener à bien ses actions. Cependant, aussi nobles soient ses idéaux, le militant anti-corruption a son idée bien à lui de la manière de punir les corrompus : la peine de mort. Mais il a aussi déclaré à la télévision qu’il appréciait la justice du guerrier marathi Shivaji, qui avait l’habitude de couper les mains des corrompus. « La non-violence à 100 %, ça n’est pas possible », a-t-il poursuivit.

Dans un autre registre, pour lutter contre l’alcoolisme qui ravageait son village, il faisait attacher à un arbre et fouetter les alcooliques. « Est-ce qu’une mère ne donnera pas un médicament amer à un enfant malade si elle sait que ce medicament peut sauver l’enfant ? L’enfant peut ne pas aimer le médicament, mais la mère le fait seulement pour le soigner », a affirmé Anna Hazare.

Ses débuts

De son vrai nom Kisan Baburao Hazare, l’ancien soldat originaire de l’État du Maharashtra n’en est pas à ses premiers actes de résistance. Converti au militantisme politique à la fin des années 70, sa première cible a été son propre village, Ralegan Siddhi, frappé durement par la sécheresse. En quelques années, Hazare a transformé le hameau desséché en village modèle grâce à plusieurs programmes de développement et à un système ingénieux de récupération des eaux.

Dans le même temps, il a commencé à tenir tête au gouvernement. Pour forcer des ministres corrompus à démissionner, il a fait une première grève de la faim dans les années 90. A la même période, en 1991, il crée le « Bhrashtachar Virodhi Jan Aandolan », mouvement populaire contre la corruption. Il a récidivé plusieurs fois depuis, réussissant à faire adopter une loi d’accès à l’information.

Une longue lutte contre la corruption en Inde

Le 5 avril dernier, Anna Hazare entamait une grève de la fin et réclamait du gouvernement indien qu’il promulgue des lois anti-corruption efficaces. Ce jeûne avait provoqué des manifestations dans tout le pays en soutien à Hazare, qui interrompait sa grève de la faim le 9 avril 2011, après que le gouvernement ait accepté d’accéder à ses demandes.

Le 16 août, au travers d’un nouveau jeûne, Anna Hazare demandait le durcissement d’un projet de loi exemptant le Premier ministre et des magistrats de haut rang d’être inquiétés en cas de soupçons de corruption. Le texte est actuellement toujours en cours d’examen au Parlement et prévoit un médiateur censé surveiller les hommes politiques et les fonctionnaires du gouvernement. Hazare réclame que ce médiateur puisse également enquêter sur le Premier ministre en cas de soupçons de corruption.

Le militant avait été placé en détention mardi passé, de même que plus de 1.000 autres manifestants soutenant sa démarche. Le lendemain, de 60.000 à 70.000 personnes, selon les organisateurs, avaient de nouveau arpenté les rues de New Delhi pour protester contre l’arrestation de leur leader et contre la corruption.

Relâché le vendredi 19 août, Hazare a quitté la prison de New Delhi après avoir négocié une grève de la faim publique de 15 jours sur l’esplanade Ramlila Maidan à New Delhi, pouvant accueillir 25.000 personnes. Les autorités lui ont refusé une grève de la faim illimitée. Sous les acclamations de ses partisans, il a déclaré : « Frères et soeurs, chers enfants (…) en 1947, nous avons eu la liberté. Mais nous n’avons pas encore gagné notre propre liberté ».

Le militant anti-corruption Anna Hazare l’a affirmé dimanche, il poursuivra sa grève de la faim tant qu’il n’aura pas eu gain de cause auprès du gouvernement indien. « Même si le Premier ministre vient ici, je ne bougerai pas tant que notre projet de loi ne sera pas adopté », a déclaré Hazare. « Je mourrai, mais je ne vais pas céder tant que nos exigences ne seront pas satisfaites ». Le nombre de ses supporters ne fait qu’augmenter, jusqu’à 25.000 personnes étaient présentes pour le soutenir, selon la police.

Am. R. (stg)

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