Obama tendant la main à Raul Castro. © REUTERS

A la Havane, Barack Obama balloté entre honneurs et petits camouflets

Le Vif

Depuis son arrivée dimanche, Barack Obama a été balloté entre honneurs et petits camouflets. Dès le début, Raul Castro n’a pas daigné le rejoindre à l’aéroport ni au monument José Marti, pourtant situé à deux pas du palais de la Révolution. S’en suivent quelques gestes intrigants entre les deux chefs d’Etat.

Barack Obama, détendu et souriant, déclaré vainqueur? C’est ce que laisse entendre le geste surprenant de Raul Castro qui a tenté de lever le bras de son homologue américain, une des images marquantes de la visite historique du président américain à Cuba.

Lundi, après une rencontre au sommet de deux heures au palais de la Révolution de La Havane, les deux hommes ont lu des déclarations faisant état des avancées et des enjeux du rapprochement engagé fin 2014 entre les deux pays.

Puis ils se sont soumis aux questions de la presse, exercice naturel pour M. Obama, mais rarissime pour le président cubain de 84 ans, allergique aux médias. Cette brève séance de questions avait d’ailleurs fait l’objet d’intenses tractations préalables.

Interrogé par deux journalistes sur les prisonniers politiques, le chef d’Etat cubain, qui a succédé à son frère Fidel à partir de 2006, a soudainement paru agité, réajustant sans cesse son casque audio.

« Donnez-moi la liste immédiatement pour que je les libère (…) Donnez-moi le nom ou les noms (…) S’il y en a, ils seront libérés avant la nuit », s’est-il exclamé, contestant la qualité des détenus concernés.

Pourtant dimanche, quelques heures à peine avant l’arrivée du président américain, de nouvelles arrestations ont visé le mouvement dissident des Dames en Blanc devant les caméras de nombreux journalistes, jetant une ombre sur cette visite.

Tout au long de la conférence de presse, M. Obama, partisan du dialogue en matière de diplomatie, a expliqué tout sourire qu’il était important de poursuivre sur la voie du rapprochement, saluant poliment « l’esprit d’ouverture » de Raul Castro.

« Nous avons vu (…) un président Obama détendu, confiant (…) alors que Raul Castro a une expérience minimale des questions dont il n’a pas été prévenu. Le contraste était saisissant », observe Paul Webster Hare, professeur de relations internationales à l’Université de Boston, aux Etats-Unis.

Une main ‘molle’

Puis, comme le veut l’usage, les deux hommes se sont serré la main avant que Raul Castro oublie le protocole pour tenter de lever le bras de son homologue en le saisissant par le poignet.

Mais ce dernier n’a pas accompagné le mouvement, laissant tomber sa main un instant en attendant que le chef d’Etat ne renonce à son impulsion.

En résulte une photo pour le moins étonnante d’un Obama souriant faisant signe aux journalistes de la main droite, tandis que son bras gauche est maintenu à mi-hauteur par un Raul Castro légèrement en retrait.

Peu après, alors que sur les réseaux sociaux on ironisait déjà sur cet étonnant cliché et cette « main molle », le président américain a tenu à saluer l’effort de son homologue.

« Il me semble que c’est la première fois que Raul Castro apparaissait non seulement devant la presse américaine, mais aussi devant la presse cubaine », a souligné M. Obama dans un entretien réalisé par la chaine de télévision américaine ABC

« Il a répondu aux questions, cela n’aurait pas pu arriver si nous n’avions pas changé de politique », a-t-il insisté.

Manque de respect?

Pourtant, depuis son arrivée dimanche, Barack Obama a été balloté entre honneurs et petits camouflets.

Raul Castro n’a pas daigné le rejoindre à l’aéroport ni au monument José Marti, pourtant situé à deux pas du palais de la Révolution, mais il a multiplié sourires et amabilités une fois en présence du président américain lundi, avant d’offrir un dîner d’Etat dans la soirée.

« Wow. Le président Obama vient d’atterrir à Cuba, un moment important, et Raul Castro n’était même pas là pour lui donner la bienvenue. Il a reçu le pape et d’autres, quel manque de respect », a raillé sur Twitter le candidat républicain à la présidentielle Donald Trump.

Les médias officiels cubains n’ont pas accordé la place attendue à une telle visite, la télévision d’Etat se contentant notamment d’une couverture en direct, mais erratique, de ses activités.

« Je crois que Raul Castro ne veut pas de relations chaleureuses avec les Etats-Unis. Il les voit dans des termes restreints pour l’instant », analyse Paul Webster Hare.

Fort d’un important capital de sympathie sur l’île, M. Obama désirait aller à la rencontre des Cubains, mais il en a pour l’instant été pour ses frais, la pluie et la sécurité d’Etat ayant tenu la foule à distance pendant sa visite de la vieille ville dimanche soir.

Peut-être que son discours prévu mardi matin, qui sera retransmis en simultané par la TV cubaine, lui donnera l’occasion d’être déclaré vainqueur par les Cubains eux-mêmes.

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