L'enterrement du soldat Vadim Kostenko. © Belga

A l’enterrement du premier soldat russe mort en Syrie

Le Vif

Le premier soldat mort dans le cadre de l’intervention militaire russe en Syrie a été enterré mercredi dans un petit village du sud de la Russie. Mais ni sa famille ni ses proches ne croient à la thèse officielle du suicide.

« Ce n’était pas un suicide », résume crûment Ekaterina. Cette adolescente de 14 ans a pu voir le corps rapatrié de son frère Vadim. Et malgré ses 14 ans, elle fait office de porte-parole de la famille, ses parents étant terrassés par le chagrin.

Elle répond aux journalistes dans la maison familiale de Gretchanaïa Balka, un petit village du sud-ouest de la Russie, juste avant l’enterrement.

Selon l’armée, Vadim Kostenko, un technicien militaire de 19 ans, s’est pendu après une permission sur la base aérienne de Hmeimim, dans le nord-ouest de la Syrie. Les enquêteurs assurent qu’il avait des problèmes avec une jeune fille. Mais pour la famille et les proches de Vadim, cette thèse ne tient pas.

« Son corps est arrivé la nuit dernière. Nous avons vu que son nez et sa mâchoire étaient cassés. Il avait des marques autour du cou », raconte Ekaterina.

Plusieurs centaines de personnes, dont de nombreux soldats en treillis de camouflage ont assisté à l’inhumation de sa dépouille, apportant couronnes mortuaires et bouquets de fleurs sur sa tombe dans le cimetière du village, à une heure et demi de voiture de la capitale régionale, Krasnodar.

« Personne ne croit à l’histoire du suicide. Il n’a pas pu mettre fin à ses jours à cause d’une fille. Il n’était pas ce genre de garçon », soutient Svetlana Chpag, une ancienne collègue de la mère de Vadim.

« La seule raison pour laquelle il aurait pu se donner la mort, c’est que quelqu’un était sur le point de le tuer », assure cette ancienne institutrice de 42 ans.

« Ils (les autorités) disent que c’était un suicide pour d’autres raisons. Je n’y crois pas du tout. La famille a vu le corps », abonde Nadejda Nikolaïevna, une proche de la famille du soldat.

Peu avant la confirmation officielle de la mort du jeune soldat, Grigori Donskikh, un militaire qui a servi avec Vadim en Russie, avait lui aussi douté de la thèse du suicide.

« Ce n’est pas le genre de personne qui aurait mis fin à ses jours », avait-il confié à l’AFP, joint par téléphone.

‘Pression physique et psychologique’

Le Parquet général militaire russe a annoncé mercredi qu’une enquête avait été ouverte pour déterminer les circonstances de la mort de Vadim Kostenko.

« Les premiers éléments de l’enquête indiquent que Vadim Kostenko s’est suicidé par pendaison lors d’une permission en raison de problèmes dans sa vie privée », a résumé un porte-parole militaire, citant les résultats de l’autopsie.

L’armée russe, réputée pour les fréquents mauvais traitements et les violences que subissent ses jeunes recrues de la part des anciens, notamment chez les conscrits, est confrontée depuis de nombreuses années à des suicides dans ses rangs.

Mais pour les organisations de défense des droits des militaires, telles que le Comité de mère de soldats, l’armée invoque parfois le suicide pour raisons personnelles pour camoufler la véritable raison de la mort de ses recrues.

« Nous avons eu plus d’une fois des cas de familles qui nous rapportent le suicide leur fils après des soi-disant problèmes avec une fille », témoigne Anna Kachirtseva, porte-parole du Comité de mère de soldats.

« Dans certains cas, il s’avère que le jeune homme avait bien une petite amie, mais qu’il n’y avait aucun problème avec elle », affirme-t-elle, soulignant que la « pression physique et psychologique » était la principale cause qui poussait les jeunes militaires à mettre fin à leurs jours.

L’armée russe a déployé des dizaines d’avions et hélicoptères en Syrie où elle conduit depuis le 30 septembre des raids aériens intensifs pour venir en aide aux forces de Bachar al-Assad.

Des centaines de soldats russes sont également déployés dans le port syrien de Tartous pour assurer la sécurité des installations logistiques mais surtout sur la base aérienne de Hmeimim.

Moscou n’avait jamais fait état de pertes de soldats au combat ou lors d’accidents ou de suicides.

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