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A Dallas, après le drame, la communauté noire essaye de rester mobilisée

Le Vif

Après avoir vu l’élan de la marche de jeudi brisé par la fusillade meurtrière, la communauté noire de Dallas tente de se mobiliser à nouveau, pour dénoncer les brutalités policières tout en rompant le cycle qui mène « de l’école vers la prison ».

Un millier de personnes environ se sont rassemblées dimanche soir en l’église Friendship-West Baptist Church, à l’appel du mouvement citoyen Next Generation Action Network.

Cette association avait contribué à l’organisation de la marche de jeudi, qui s’est terminée dans le sang avec la mort de cinq policiers, bien malgré ses participants.

Des élus, des entrepreneurs et des militants de la communauté noire étaient présents pour réfléchir à la suite, à la construction d’un mouvement.

Mais la soirée était aussi consacrée à tous ces anonymes qui étaient venus pour dire leur ras-le-bol.

Il a été question de brutalités policières, d’Eric Casebolt notamment, un policier blanc qui avait violemment plaqué au sol une jeune fille noire de 15 ans lors d’une fête un peu trop bruyante, en juin 2015, et menacé de son arme deux de ses amis.

Aucun d’entre eux n’était armé.

Fin juin 2016, un jury a décidé de ne pas poursuivre ce policier de McKinney, dans la grande banlieue de Dallas, provoquant une vague d’indignation.

Beaucoup ont reconnu que le sujet n’était pas tant la police de Dallas, qui a fait un important travail sur elle-même depuis plusieurs années, que celles d’autres villes des environs.

Le chef de la police de Dallas, David Brown, dont le nom a été applaudi dans un premier temps, en a, malgré tout, pris aussi pour son grade.

L’un des organisateurs de la marche de jeudi, Cory Hughes, a rappelé que son frère, Mark, avait été présenté publiquement comme suspect par les autorités, qui se sont ensuite rétractées.

« Tout le monde chante (ses) louanges, mais il a balancé le nom de mon frère comme ça », s’est emporté le jeune homme, dont le frère était armé d’un fusil d’assaut lors de la marche, ce qui explique, pour partie, la méprise.

« Nous attendons toujours son coup de fil, un mail ou un tweet (d’excuses), nous qui ne pouvons plus rentrer chez nous », car ils ont été la cible de nombreuses menaces de mort, a-t-il expliqué.

– Un plan d’action –

Les problèmes ne se limitent pas à la police, ont affirmé d’autres.

Dans plusieurs villes de la banlieue de Dallas, Noirs et Hispaniques ne sont pas les bienvenus, selon Carlos Quintanilla, président de l’association Accion America.

Quant aux quartiers à forte concentration noire, plusieurs intervenants ont évoqué le sort de certaines écoles, où l’on trouve des rongeurs dans la cafétéria ou de la moisissure dans les salles de classe.

Parmi elles figurent South Oak Cliff High School, celle-même qu’a fréquentée le chef de la police, David Brown, il y a des décennies.

« Nous devons nous attaquer à ce système, qui crée un tunnel de l’école vers la prison » dans les quartiers pauvres à majorité noire, a exhorté Dominique Alexander, le fondateur charismatique de Next Generation Action Network.

« Nous avons des blessures à l’âme », a lancé le pasteur du lieu, Frederick Haynes, vêtu d’un tee-shirt barré du nom de Mohamed Ali, qui a rendu hommage aux policiers tués.

Et cette fois, « nous ne pouvons pas nous contenter d’un instant de communion, de quelque chose de superficiel », a-t-il exhorté. « Il nous faut un plan d’action. »

Dans le public, les questions fusent sur les modalités de cette action.

Les représentants du monde associatif les encouragent à voter, à saisir leurs élus, à faire acte de présence lorsqu’un mouvement se lance, à y contribuer financièrement.

« Quand je mets une photo (sur son compte Facebook), j’ai 100 +j’aime+. Quand j’appelle à venir au rassemblement, j’en ai quatre », se désole une jeune femme aux longues tresses dans l’assistance.

Rendez-vous est pris pour le prochain conseil municipal, le 3 août, ainsi que pour une nouvelle réunion publique, jeudi, avec l’espoir d’amorcer quelque chose.

Parce qu’elle a été frappée jeudi, « Dallas est l’épicentre du changement dans ce pays », considère Royce West, élu démocrate au sénat de l’Etat du Texas.

« Nous n’avons pas le choix », dit-il à l’AFP. « Ces vies perdues, de policiers et de citoyens, créent les conditions parfaites d’un changement. »

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