Sous l'oeil de Harry Truman, les douze ministres paraphent le texte qui, le 4 avril 1949, crée l'Otan. © ISOPIX

4 avril 1949 : comment l’Europe s’en remit à l’Otan

Les douze ministres des Affaires étrangères sont sur leur trente et un. C’est dans les bâtiments du State Department, l’administration américaine en charge des relations extérieures, qu’ils sont très solennellement reçus.

En attendant l’ouverture de la cérémonie, l’orchestre de la Marine se charge de faire patienter les troupes. En musique. Puis vient Harry Truman. L’air grave, le président américain parle de bouclier, de rempart et de vie meilleure. En filigrane, l’ennemi se dessine : il est soviétique. Arrive l’heure des signatures. Les douze plénipotentiaires paraphent le texte. En quelques coups de stylo, ils créent l’Otan. Une vieille dame qui, aujourd’hui, a presque 70 ans.

Les choses auraient pourtant pu se passer autrement. On l’oublie souvent mais, au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, la coalition demeure unie. Ce n’est que vers 1947 que les clivages se creusent. Cette année-là, le secrétaire d’Etat américain George Marshall propose de soutenir financièrement le redressement du Vieux Continent. Pour lui, c’est aussi une manière d’endiguer la menace soviétique. Devenue bien réelle.

Et les Belges ? Au départ, l’idée d’un Pacte atlantique ne les motive franchement pas. Pour deux raisons. D’une part, parce la diplomatie tricolore se refuse longtemps à percevoir les Soviétiques comme des ennemis.  » L’attitude des Russes me paraît très compréhensible et même très logique « , écrit encore le ministre des Affaires étrangères Paul-Henri Spaak, en juillet 1947.  » Pour des raisons politiques acceptables, ils veulent garder leur influence sur les pays satellites.  »

Deuxième élément : bien plus que vers Washington, c’est vers Londres que Bruxelles regarde. Au lendemain de la guerre, Spaak considère les Américains comme des alliés. Mais il les trouve trop éloignés pour pouvoir exercer un leadership sur le continent. Le ministre socialiste rêve plutôt de voir la Grande-Bretagne endosser ce rôle moteur. Cependant, Churchill ne répond pas :  » The Belgians are extremely weak « , relève d’ailleurs le leader britannique. Qui perçoit mal ce qu’il aurait à gagner d’une alliance avec de petits Etats. En mars 1948, les Britanniques cosignent bien le Pacte de Bruxelles, qui instaure un mécanisme de défense collective avec la France et le Benelux. Mais Londres ne voit dans ce traité qu’une étape vers une alliance élargie.

Celle-ci se profile donc. En juin 1948, Washington propose d’ouvrir des négociations. Spaak rechigne. Déclare qu’un tel pacte est superflu. Redoute qu’il vienne alimenter les tensions avec l’URSS. Craint qu’il défavorise un éventuel processus d’unification européenne. Plus par raison que par passion, il finit néanmoins par se laisser convaincre. Le 4 avril 1949, la Belgique est bel et bien présente à Washington. En signant le Pacte, elle reconnaît implicitement que le monde est devenu dangereux. Et que son principal espoir de salut se trouve outre-Atlantique.

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