Le gouverneur républicain de Floride veut un policier dans toutes les écoles publiques © AFP

17 morts dans un lycée américain: une histoire trop classique

Le Vif

Elus et policiers n’avaient que des prières et aucune explication à offrir mercredi soir aux proches des 17 personnes abattues de rafales de fusil d’assaut par un jeune homme de 19 ans dans un lycée de Floride.

« C’est juste le mal à l’état pur », a lâché le gouverneur de Floride, Rick Scott, lors d’un point de presse à Parkland, en guise de maigre explication pour ce qui est l’une des pires tueries aux Etats-Unis depuis un quart de siècle.

Le shérif local a fait aveu d’impuissance. « Si quelqu’un veut vraiment commettre un carnage, il n’y a pas grand-chose que l’on puisse ou que les forces de l’ordre puissent faire », a déclaré Scott Israel.

Nikolas Cruz –identifié précédemment par la police comme Nikolaus Cruz– a choisi la Saint-Valentin, la fête de l’amour, pour se rendre à Marjory Stoneman Douglas, son ancien lycée d’où il avait été expulsé, et ouvrir le feu avec un de ces fusils d’assaut AR-15 semi-automatiques, si répandus aux Etats-Unis. Il était un adolescent amateurs d’armes.

Le jeune homme âgé de 19 ans s’est présenté à l’heure de la sortie des cours dans son ancien lycée, la Marjory Stoneman Douglas High School à Parkland, avec un fusil semi-automatique AR-15 et une grande quantité de munitions, faisant 17 morts.

La police locale l’a arrêté plus tard dans la localité proche de Coral Springs.

Né en septembre 1998, Nikolas Cruz avait posté sur les réseaux sociaux des messages « très alarmants », a indiqué le shérif du comté de Broward, Scott Israel, sans préciser leur nature, insistant sur la nécessité de signaler ce type de publications.

Le portrait du tueur n’a pas été rendu public par les autorités et un compte Instagram qui lui est attribué a été supprimé. Cruz était connu au sein du lycée pour être un élève à problèmes, selon plusieurs témoignages recueillis par les médias locaux.

« Il y a eu des problèmes quand il a menacé des étudiants l’année dernière et je pense qu’on lui a dit de quitter le campus », a déclaré au quotidien Miami Herald Jim Gard, un professeur de mathématiques qui avait eu l’élève dans sa classe.

Selon l’enseignant, la direction du lycée avait prévenu de ne pas accepter l’élève sur le campus s’il portait un sac à dos en raison de ces menaces proférées.

– ‘Tout le monde l’avait prédit’ –

Un étudiant, interrogé par la chaîne locale WSVN-7, a expliqué que le jeune était un « enfant à problème » qui possédait des armes chez lui et qu’il avait parlé de les utiliser. « Il tirait au fusil parce que ça lui procurait une sensation d’ivresse », a-t-il expliqué.

Selon un autre élève, Nicholas Coke, Cruz était un « solitaire » qui avait quitté l’établissement il y a quelques mois pour emménager dans le nord de l’Etat après la mort de sa mère. Il aurait également fait une préparation militaire, selon des sources au Pentagone qui n’ont pas donné de détails. Le tireur avait déjà eu « beaucoup de problèmes » de comportement au collège, a-t-il ajouté, racontant que Nikolas Cruz avait brisé une fenêtre à coup de pieds.

Un autre lycéen, interrogé sur les lieux de la fusillade par la chaîne locale WJXT, a affirmé que le passage à l’acte de Nikolas Cruz était prévisible.

« Honnêtement, beaucoup de gens disaient que ce serait lui » qui « arroserait le lycée », a indiqué l’élève que la chaîne n’a pas identifié. « Au final, tout le monde l’avait prédit », a-t-il ajouté, soulignant que Nikolas Cruz connaissait bien les lieux et les procédures de sécurité en vigueur dans le lycée en cas de coups de feu.

« Il était au deuxième étage, il connaît la disposition des classes, il savait où seraient les élèves », a-t-il expliqué. « Il est habitué aux exercices anti-incendie, il est préparé.

Terreur

Des images, filmées à l’intérieur d’une salle de classe pendant l’assaut sanglant probablement par un élève, donne une petite idée de la terreur qui s’est emparée de ce complexe scolaire qui compte près de 3.000 élèves.

On y entend des coups de feu à cadence très rapprochée, caractéristiques d’un semi-automatique et on y voit des élèves prostrés sous leur bureau ou allongés en silence, tandis que des hurlements s’élèvent plus loin.

En milieu de soirée, les autorités n’avaient toujours pas réussi à identifier 5 des 17 victimes, parmi lesquelles se trouvaient aussi bien des élèves que des enseignants. Quatorze des blessés ont été hospitalisés, parmi lesquels deux sont décédés des suites de leurs blessures. Parmi eux, un entraîneur de football.

Signes avant-coureurs

La police n’a pour l’heure livré aucun motif, mais le portrait encore très en pointillés laissait poindre un adolescent à problèmes amateurs d’armes.

« Il y a eu des problèmes quand il a menacé des étudiants l’année dernière et je pense qu’on lui a dit de quitter le campus », a déclaré au quotidien Miami Herald Jim Gard, un professeur de mathématiques qui avait eu l’élève dans sa classe.

Selon un lycéen, Nicholas Cokes, Cruz était un « solitaire » qui avait quitté l’établissement il y a quelques mois pour emménager dans le nord de l’Etat après la mort de sa mère.

Il aurait également fait une préparation militaire, selon des sources au Pentagone qui n’ont pas donné de détails.

Un autre lycéen a souligné que le tireur connaissait parfaitement les lieux et les procédures de sécurité, mises en place dans toutes les écoles aux Etats-Unis, qui simulent régulièrement une intrusion armée pour préparer leurs élèves.

Nikolas Cruz avait posté sur les réseaux sociaux des messages « très alarmants », a souligné le shérif et des images sur Instagram présentées par plusieurs médias comme le compte du tireur –avant qu’il ne soit désactivé– montraient un homme au visage masqué coiffé d’une casquette ou d’un bonnet de l’armée de terre avec des couteaux ou encore l’image d’un fusil à pompe.

« Nous n’avons reçu aucun avertissement, aucune indication », a pourtant précisé Robert Runcie, le proviseur du lycée. « A notre connaissance, aucune menace n’avait été proférée ». Quand au shérif il a répété à de multiples reprises que c’était la responsabilité de tous « de signaler des choses inhabituelles ».

Cachés dans les placards

Des témoins, dont plusieurs arboraient des coeurs et autres décorations de la Saint-Valentin –qu’enseignants et élèves célèbrent traditionnellement ensemble et avec beaucoup de ferveur dans les écoles américaines–, ont rapporté s’être cachés jusque dans les placards lorsque les coups de feu ont retenti peu avant la fin des cours, à 14H30.

« C’était la fin de la journée scolaire et l’alarme incendie s’est déclenchée. Nous avons commencé à évacuer. On pensait que c’était un exercice et après avoir fait 15, 20 pas hors de la classe on était à terre, et on se cachait dans le placard », a raconté une enseignante, Melissa Falkowski, sur CNN.

Une élève, Peri Harris, a elle raconté à la chaîne CBS Miami que « toute sa classe » avait trouvé refuge dans « un tout petit placard ».

Déjà 18 fusillades

« Aucun enfant, enseignant ou quiconque, ne devrait jamais se sentir en danger dans une école américaine », a tweeté le président Donald Trump dans l’après-midi.

Le drame survenu mercredi est le dernier d’une longue série de fusillades ayant ensanglanté l’Amérique ces dernières années. A Las Vegas en octobre 2017, 58 personnes ont péri sous les balles d’un seul tireur et 49 personnes avaient été abattues dans un club gay d’Orlando en 2016. Et les fusillades sont particulièrement récurrentes dans les écoles américaines: il y en a déjà eu 18 en 2018 en comptant celle du lycée Marjory Stoneman Douglas. « Il s’agit de la 291e fusillade en milieu scolaire depuis le début de 2013 », souligne Shannon Watts, fondatrice de « Moms Demand Action For Gun Sense In America », une organisation qui lutte contre la prolifération des armes à feu.

Les écoles américaines sont de moins en moins des sanctuaires épargnés par la violence armée et les Américains semblent fatalistes face à la situation. La plupart des ces fusillades ne font d’ailleurs même pas les gros titres de la presse nationale, étant donnée leur banalité.

Il y a environ une fusillade en milieu scolaire par semaine, selon Everytown for Gun Safety, une autre organisation militant pour le « gun control », c’est-à-dire le durcissement des lois sur les armes individuelles.

Les fusillades les plus meurtrières aux Etats-Unis depuis 25 ans

Les Etats-Unis, où un tireur de 19 ans a tué 17 personnes mercredi dans un lycée du sud-est de la Floride, ont connu de nombreuses fusillades au cours des 25 dernières années. Voici les principales d’entre elles:

– Las Vegas: 58 morts –

Le 1er octobre 2017, Stephen Paddock, 64 ans, ouvre le feu du 32ème étage de l’hôtel Mandalay Bay, sur une foule en contrebas qui assistait à un concert de musique country à Las Vegas (Nevada, ouest), faisant 58 morts et près de 500 blessés.

Le groupe Etat islamique (EI) avait rapidement revendiqué la fusillade, la plus meurtrière de l’histoire américaine, mais selon la police américaine aucun élément n’a à ce jour permis de relier Paddock, qui s’est suicidé, à l’organisation jihadiste.

– Club gay à Orlando: 49 morts –

Le 12 juin 2016, un Américain d’origine afghane, Omar Mateen, tue 49 personnes et en blesse une cinquantaine dans un club gay d’Orlando (Floride, sud-est), perpétrant le pire attentat aux Etats-Unis depuis ceux du 11 septembre 2001. Après trois heures de négociations, les forces de l’ordre donnent l’assaut, abattant l’assaillant. L’EI, auquel le terroriste avait fait allégeance, revendique la fusillade.

– Virginia Tech: 32 morts –

Le 16 avril 2007, un étudiant de 23 ans d’origine coréenne tue 32 personnes avant de se donner la mort sur le campus de l’université de Virginia Tech à Blacksburg (Virginie, est).

– Ecole primaire à Sandy Hook, 26 morts –

Le 14 décembre 2012, un jeune homme tue 26 personnes, dont 20 enfants de cours primaire, dans l’école de Sandy Hook à Newtown (Connecticut, nord-est), avant de se suicider.

– Eglise de Sutherland, Texas: 26 morts –

Le dimanche 5 novembre 2017, un homme a abattu 26 personnes dans une église de la petite ville de Sutherland au Texas, en plein culte. Il a aussi blessé une vingtaine de paroissiens. La police a retrouvé son corps dans sa voiture.

– Killeen, Texas: 22 morts –

Le 16 octobre 1991, un homme tue 22 personnes dans un restaurant de Killeen (Texas) et en blesse une vingtaine d’autres avant de se donner la mort.

– Parkland, Floride: 17 morts –

Le 14 février 2018, le jour de la Saint-Valentin, un jeune homme de 19 ans, Nikolas Cruz, ouvre le feu dans un lycée de Parkland, dans le sud-est de la Floride, tuant 17 personnes avant d’être arrêté.

– San Bernardino: 14 morts –

Le 2 décembre 2015, un couple marié d’islamistes radicalisés d’origine pakistanaise ouvre le feu lors d’un déjeuner de Noël à San Bernardino (Californie, ouest), faisant 14 morts et 22 blessés.

– Fort Hood: 13 morts –

Le 5 novembre 2009, un psychiatre militaire d’origine palestinienne déclenche la plus grave fusillade sur une base militaire américaine, tuant 13 personnes et en blessant 32 à Fort Hood (Texas), avant d’être blessé et maîtrisé.

– Centre d’accueil pour immigrés à Binghamton: 13 morts –

Le 3 avril 2009, un homme d’origine vietnamienne tue 13 personnes dans un centre d’accueil pour immigrés à Binghamton (Etat de New York, nord-est).

– Columbine: 13 morts –

Le 20 avril 1999, à Littleton (Colorado, ouest), deux lycéens ouvrent le feu au lycée Columbine et tuent 12 élèves et un enseignant et blessent 24 autres personnes. Les deux tireurs se suicident sur les lieux du massacre.

– Bureaux de la Marine à Washington: 12 morts –

Le 16 septembre 2013, un homme, travaillant pour un sous-traitant du ministère de la Défense, ouvre le feu dans des bureaux de la Marine américaine, à Washington DC, tuant 12 personnes, avant d’être abattu par la police.

– Aurora: 12 morts –

Le 20 juillet 2012, un jeune homme lourdement armé fait irruption dans un multiplexe d’Aurora (Colorado) et ouvre le feu sur le public d’une séance de minuit de « Batman », faisant 12 morts et 70 blessés. L’auteur de la tuerie, James Holmes, a été condamné en août 2015 à la prison à perpétuité sans possibilité de libération.

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