Sous le pontificat de Léon XIII, l'encyclique Rerum novarum a jeté les bases de la doctrine sociale de l'Eglise. © belgaimage

15 mai 1891 : quand le pape se tourna vers les pauvres

Jésus était aux côtés des plus pauvres. Inlassablement, il prenait le parti des gens simples, des enfants. Rendait visite aux malhonnêtes et aux exclus. Soignait les malades et les handicapés. Par la suite, la hiérarchie de l’Eglise catholique n’a pas toujours marché dans ses pas.

Longtemps, les papes et les évêques furent des puissants. Inlassablement, ils prenaient le parti du pouvoir et de la richesse. Fréquentaient les princes et les seigneurs. Soignaient leur image et leur succession. Puis vint Rerum novarum. Un petit tremblement de terre dans le monde catholique.

Le xixe siècle est celui du libéralisme économique et d’un formidable boom industriel. De partout, on accourt vers les usines, en quête d’un peu de travail et de quelques sous. La main-d’oeuvre est nombreuse, corvéable. Précaire surtout. Alors qu’une nouvelle bourgeoisie s’enrichit formidablement, une nouvelle classe sociale affronte la misère. Et les politiques ne s’en soucient guère. Justice sociale et émancipation ne sont pas à la mode ; l’heure n’est pas encore à la démocratie…

Et les catholiques dans tout ça ? Ils agissent en ordre dispersé. Sur le terrain, de nombreux croyants se montrent sensibles au sort des plus démunis. En Belgique, c’est notamment le cas du célèbre abbé alostois Adolf Daens. Mais son combat pour améliorer le sort des ouvriers lui vaut de nombreux ennemis. Principalement au sein de son propre parti… Il faut dire que le monde catholique vit encore sous le régime du très conservateur Pie IX. En 1864, le pape publie l’encyclique Quanta cura. Dans laquelle il condamne toutes les idées modernes. En vrac : le socialisme, le libéralisme, le rationalisme, mais aussi la liberté de conscience et de culte…

Nommé pape en 1878, Léon XIII apparaît en rupture. L’homme est sensible aux questions du monde, et invite les catholiques à s’engager. Surtout, pour la première fois, un pape prend résolument le parti de la classe ouvrière. Même s’il n’a pas personnellement écrit Rerumnovarum, celle-ci reprend ses idées. Pour Léon XIII, il est  » honteux et inhumain d’user de l’homme comme d’un vil instrument de lucre « .

Une dynamique est née. Rerum novarum fonde officiellement le mouvement social-chrétien, et annonce l’élaboration d’une véritable doctrine sociale. Sur le terrain, les effets sont sensibles. En Belgique, les catholiques progressistes prennent bientôt l’habitude, le jour de l’Ascension, de célébrer l’anniversaire de l’encyclique en organisant des cortèges. Comme une réaction au 1er mai socialiste. Car si l’Eglise est devenue sociale, elle se distance clairement du socialisme. Sur deux points notamment : contrairement aux  » rouges « , elle défend le droit à la propriété privée et rejette la lutte des classes. Entre les deux mouvements, la concurrence sera parfois rude. L’acrimonie d’un Jean Jaurès en témoigne :  » L’Eglise ne s’est tournée vers les faibles que le jour où ils ont commencé à être une force.  »

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