Piet Wittevrongel. © Belga

Remettre à l’eau le voilier de Jacques Brel, le projet « fou » d’une fratrie flamande (en images)

Marie Gathon
Marie Gathon Journaliste Levif.be

Grand artisan du projet, Piet Wittevrongel, 70 ans, a les yeux qui pétillent en racontant à l’AFP la genèse de ce projet, dans un hangar du port de Zeebruges (nord de la Belgique) où est hébergé ce chantier naval.

Au départ, c’est l’histoire d’un voilier belge qui traverse deux océans, s’arrête longuement aux îles Marquises, en Polynésie française, où Brel a passé la fin de sa vie avec sa compagne Maddly Bamy… Puis vogue à nouveau, avec d’autres propriétaires aux commandes, vers la Californie et les îles Fidji, avant de s’échouer sur une plage de Nouvelle-Zélande.

C’est là que les Wittevrongel, Piet et son frère aîné Staf, retrouvent dans les années 2000 l’épave ensablée de l’Askoy II.

Tous deux se sentent intimement liés à cette épopée maritime. C’est en effet dans la voilerie familiale située à Blankenberge que leur compatriote Jacques Brel est venu s’équiper avant de partir. Les frères décident de rapatrier l’épave sur le littoral flamand pour la rénover entièrement en vue d’une remise à l’eau.

« Un peu soixante-huitard »

« Tout le monde disait qu’on était fous », raconte aujourd’hui Piet, en décrivant les trois essais nécessaires avant de parvenir à libérer l’épave du sable.

Le voilier de 20 mètres, décrit dans les années 60 par les spécialistes comme un des plus beaux yachts du monde, n’est alors plus qu’une coque vide, rongée par la rouille. Les deux mâts et les boiseries intérieures ont disparu.

Mais « l’entêtement » à sauver l’Askoy II est assumé par les Wittevrongel. Car chacun a sa priorité en tête en termes de résurrection: « Pour mon frère c’était le bateau, et pour moi c’était Brel », poursuit le cadet.

Parsemant ses propos d’anecdotes et de paroles du chanteur disparu en 1978, le septuagénaire présente ce dernier comme « un de (ses) pères spirituels ».

« J’ai été éduqué avec les chansons de Brel, je suis un peu un soixante-huitard », dit-il en riant. Avec le souvenir intact d’avoir croisé dans le magasin familial il y a 44 ans « un homme très simple, très aimable », ayant « beaucoup d’humour ».

Dans le hangar qui abrite la rénovation de l’Askoy II, à la coque désormais repeinte comme à l’origine, bicolore rouge et bleue, une sorte de mini-galerie d’art à la gloire de l’icône belge a vu le jour.

Des dessins encadrés représentant Brel attendent un improbable acheteur et prennent la poussière du bois non loin de l’établi de Michel, un menuisier octogénaire qui a mis sa retraite entre parenthèses pour reconstruire les cabines.

L’objectif, explique Piet, est de sortir le bateau du hangar le 9 octobre 2018, pour le 40e anniversaire de la mort de l’artiste, puis de tenter une mise à l’eau le 8 avril 2019, date à laquelle il aurait eu 90 ans.

« Le moteur marche »

« Peut-être qu’il sera mis à l’eau seulement avec la cabine arrière terminée, mais on pourra naviguer », assure-t-il, « le moteur marche ».

Le cadet des Wittevrongel admet que le financement du chantier reste incertain, d’où sa lente progression, « au fur et à mesure qu’on reçoit un peu de sous ».

Ni les institutions publiques, ni la Fondation Jacques Brel, qui gère depuis Bruxelles son héritage, n’ont souhaité s’associer au projet.

La fondation, animée par France Brel, une des filles du chanteur nées de son union avec son épouse « Miche », « a pour vocation de s’occuper de l’oeuvre de Jacques Brel », a assuré à l’AFP le mari de France, Francis de Laveleye.

« Nous n’avons jamais fait le moindre reproche à ces gens mais pourquoi aider à restaurer un bateau qui n’a servi que quelques mois à Jacques Brel? », s’interroge-t-il.

Piet Wittevrongel y voit de son côté l’expression de « tensions » qui persistent à l’égard de Maddly Bamy, la dernière compagne du chanteur, partenaire de l’aventure sur l’Askoy II et des années aux Marquises.

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