Eradiquer le téléchargement illégal en le taxant ?

La fermeture retentissante du site Megaupload n’affectera pas le piratage sur Internet. Mais relance l’idée d’une licence globale pour les droits d’auteur. Une proposition de loi a été redéposée au Sénat.

En s’attaquant à Mega-upload, le FBI n’a fermé qu’un des robinets qui alimentent Internet en musique et films piratés. De nombreux hébergeurs, comme Rapidshare, continuent à fonctionner selon le même système : des internautes y déposent des musiques et films dont ils sont réputés détenir les droits, ce dont le site se prévaut pour décliner toute responsabilité. Les visiteurs n’ont plus qu’à les télécharger, gratuitement pour les plus patients (la vitesse de transfert est bridée), ou à pleine vitesse s’ils optent pour le service premium payant. En sept ans, Megaupload aurait ainsi gagné 135 millions d’euros et, surtout, privé les ayants droit du triple de cette somme.

La fermeture de tous ces sites étant utopique, l’idée d’une licence globale refait surface. Le principe ? Les fournisseurs d’accès à Internet, comme Belgacom et VOO, s’acquitteraient d’une redevance auprès des sociétés d’auteurs. Proportionnel à leur nombre d’abonnés, ce montant couvrirait de manière forfaitaire les droits des oeuvres circulant sur leurs réseaux.

Droit d’auteur et respect de la vie privée

Il y a deux ans, Ecolo et Groen avaient déposé une proposition de loi pour instituer ce procédé. « Elle n’est pas allée à son terme, explique son coauteur, l’ancien sénateur Benoit Hellings. Mais elle nous paraît rester la meilleure réponse au piratage et Jacky Morael et Freya Piryns l’ont d’ailleurs redéposée telle quelle en mai dernier. Cette licence aurait un triple avantage : elle garantirait le respect des droits d’auteur, offrirait un large accès à la culture et éviterait d’aller vérifier ce que les internautes téléchargent. »

Car les instances européennes sont très attachées à la confidentialité, comme elles l’ont prouvé dans l’affaire Scarlet. Attaquée devant les tribunaux belges par la Sabam (société de gestion de droits d’auteur), la filiale de Belgacom avait été contrainte à filtrer le trafic de ses abonnés de manière à bloquer les échanges de fichiers illégaux. Mais la Cour européenne de justice a retoqué cette décision il y a deux mois, estimant qu’elle violait la protection des données à caractère personnel et que le droit d’auteur ne pouvait prendre le pas sur le respect de la vie privée.

Reste que si la licence globale répond à cette exigence, elle est rejetée par la plupart des sociétés qui défendent les intérêts des artistes. Selon elles, cela équivaudrait à un feu vert inconditionnel et interdirait d’intervenir en cas de piratage massif.

Seule certitude : l’urgence est de mise. La quantité de sites se disputant la succession de Mega-upload est là pour le rappeler.

Laurent Hovine

Représailles sur la Toile

La fermeture du site Mega-upload a déclenché une série de représailles sur Internet. Des pirates se réclamant du collectif Anonymous ont bloqué l’accès à plusieurs sites, dont ceux du FBI, à l’origine de l’action menée contre Megaupload, et de l’Elysée peu de temps après que le président français Nicolas Sarkozy se soit réjoui du coup porté au téléchargement illégal. L’attaque la plus symbolique a été menée dimanche contre le géant Sony Music dont le site, piraté, a fait place à une page permettant de télécharger gratuitement (et illégalement) des milliers d’albums.

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