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Les Galapagos en danger

Le Vif

Vents faibles et températures en hausse, le phénomène climatique El Niño est de retour en Amérique du Sud, alimenté, craignent les scientifiques, par le réchauffement climatique et menace pour la biodiversité mondialement reconnue de l’archipel des Galapagos, dans l’océan Pacifique.

Mètre ruban et balance en mains, Eduardo Espinoza, directeur des études marines du Parc national des Galapagos (PNG), s’applique à mesurer et peser les iguanes marins de l’île de Santa Cruz, dans le but d’identifier les conséquences que pourrait avoir El Niño sur cette espèce.

Les iguanes marins, reptiles datant de l’ère préhistorique, « ne s’alimentent que d’algues et quand ils sont petits, ils ne plongent pas, ils se nourrissent sur les champs d’algues » près de la plage. « Avec El Niño, ces algues peuvent diminuer et beaucoup d’entre eux commencent à mourir », explique M. Espinoza à l’AFP.

El Niño est un phénomène irrégulier, provoquant des hausses de températures dans le Pacifique, des fortes pluies dans certaines zones, des sécheresses ailleurs, et des vents faibles. Mais des scientifiques soupçonnent le réchauffement climatique d’augmenter la fréquence de ce phénomène potentiellement destructeur.

La vie marine des Galapagos, archipel isolé à 1.000 km des cotes de l’Equateur qui inspiré la théorie de l’évolution de Darwin, se trouve particulièrement menacée. Entre 1997 et 1998, El Niño a déjà frappé les Galapagos, inscrits au Patrimoine naturel de l’humanité par l’Unesco, laissant des marques indélébiles : blanchiment d’un récif de corail et réduction dramatique des populations de pingouins, cormorans, lions de mer et iguanes.

Un enjeu global

A cette époque, les iguanes avaient perdu du poids et s’étaient réduits de plusieurs centimètres, selon Judith Denkinger, alors biologiste à l’Institut des sciences de la mer de l’université privée San Francisco de Quito.

Mais les reptiles, qui vivent jusqu’à 60 ans, avaient retrouvé leur taille habituelle et en 2001, un recensement évaluait leur population à 700.000 individus. Un comptage réalisé en 2014 devrait livrer rapidement une nouvelle estimation.

El Niño, dont l’épisode actuel entamé il y a plusieurs mois pourrait durer jusqu’en 2016, affecte également les lions de mer, reprend M. Espinoza. Au plus fort du phénomène, il n’est pas rare de voir des petits décharnés, car leurs mères tardent à rapporter de la nourriture.

En effet, en raison de la hausse de la température de l’eau, l’océan voit sa productivité diminuer, contraignant les lions de mer à aller plus loin chercher les poissons dont ils se nourrissent.

Les espèces présentes sur l’archipel sont aptes à survivre à des anomalies climatiques – une caractéristique connue sous le terme de résilience – mais si ces variations surviennent trop fréquemment, la faune ne parvient pas à s’adapter, provoquant un déficit entre natalité et mortalité.

L’incroyable biodiversité de ces îles qui abritent le plus grand nombre d’espèces endémiques au monde – des tortues terrestres géantes à certains requins en passant par les iguanes ou les oiseaux marins – constitue à la fois leur richesse mais aussi leur fragilité : le changement climatique pourrait se révéler fatal pour certains éco-systèmes et provoquer la disparition d’espèces.

Et même si les 27.000 habitants de l’archipel font déjà beaucoup pour sa préservation (en contrôlant par exemple l’arrivée d’espèces invasives ou en interdisant l’usage de sacs en plastique à compter du mois d’août), « une aire comme les Galapagos ne se protège pas toute seule », rappelle M. Espinoza, appelant à une prise de conscience globale sur les conséquences de la pollution marine et des enjeux climatiques, qui seront discutés dans le cadre de la Conférence mondiale sur le climat de l’ONU (COP-21), du 30 novembre au 11 décembre à Paris.

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