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Le réchauffement fait fleurir les cimes… pour l’instant

Le Vif

La « grande accélération » touche désormais les cimes: sous l’effet du réchauffement climatique, les sommets des montagnes européennes accueillent des plantes inédites, selon une étude parue mercredi dans Nature.

Les plantes remontent de plus en plus rapidement des niveaux inférieurs, avec des sommets cinq fois plus « colonisés » de nouvelles espèces ces dix dernières années qu’au cours de la décennie 1957-1966, montre cette étude de 302 sites, des Alpes, des Pyrénées, des Carpates, du Svalbard (Norvège), d’Écosse ou de Scandinavie.

La « grande accélération », biologique, météorologique ou chimique, observée depuis les années 1950 par la communauté scientifique sous l’effet des activités humaines, est ainsi « aujourd’hui perceptible dans les sites les plus reculés de la planète : les sommets de montagne », souligne le CNRS français dans un communiqué.

Selon cette étude, basée sur 145 ans de relevés botaniques, le nombre d’espèces s’est enrichi sur 87% des sites. Au cours de la période 1957-66, un sommet a accueilli en moyenne 1,1 espèce nouvelle; en 2007-2016, ce fut 5,4. Cette migration concerne même des plantes réputées pour se déplacer lentement.

Cette tendance concorde avec l’augmentation des températures, explique l’équipe de 53 chercheurs, issus de onze pays, qui rappelle que les montagnes subissent un réchauffement particulièrement rapide.

L’étude écarte en revanche le rôle d’autres facteurs comme les retombées azotées des polluants, les changements de précipitations ou la fréquentation humaine, très différents d’une région à l’autre.

Ces écosystèmes montagnards pourraient en outre être « fortement perturbés à l’avenir », note le CNRS.

Car si dans un premier temps la biodiversité croît, sans extinction observée dans l’immédiat, cela pourrait ne pas durer: les chercheurs mettent en garde contre la disparition de certaines plantes des sommets, incapables de rivaliser avec les espèces généralistes plus compétitives venues des niveaux inférieurs.

« La richesse accrue des espèces devrait être un phénomène transitoire, cachant l’accumulation d’une +dette d’extinction+ » à venir, prévient l’étude.

« Même si la biodiversité augmente, ce n’est pas forcément quelque chose qui peut perdurer », souligne un des auteurs, Jonathan Lenoir, chercheur au CNRS.

Les plantes des sommets pourront éventuellement supporter des variations de températures, mais pas forcément la compétition, avec le risque de voir des espèces généralistes « supplanter des espèces emblématiques, et souvent endémiques, qu’on ne trouve que là », relève l’écologue.

La Plateforme intergouvernementale sur la biodiversité (IPBES) vient de produire un nouveau bilan alarmant de l’état de la biodiversité dans le monde. En Europe, 42% des espèces d’animaux et de plantes terrestres ont vu leur population décliner ces dix dernières années.

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