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L’ONU estime que les pesticides ne sont pas nécessaires pour nourrir le monde

Marie Gathon
Marie Gathon Journaliste Levif.be

Deux experts des Nations unies appellent à la rédaction d’un traité pour réguler et éliminer les pesticides dans l’agriculture et à transiter vers une agriculture durable.

Ils l’affirment : « l’usage excessif de pesticides est très dangereux pour la santé humaine, pour l’environnement et il est trompeur d’affirmer qu’ils sont indispensables à la sécurité alimentaire ».

Hilal Elver, rapporteur spécial sur le droit à l’alimentation, et Baskut Tuncak, rapporteur spécial sur les produits toxiques, ont affirmé devant le Conseil des droits de l’Homme à Genève que les normes de production, d’utilisation et de protection sur les pesticides sont très différentes selon les pays, ce qui a un impact sérieux sur les droits humains dans le monde.

Les deux rapporteurs ont également mis en avant une étude qui estime que 200.000 personnes meurent chaque année d’empoisonnement dû aux pesticides. Un nombre écrasant de ces décès (99 %) a lieu dans des pays en voie de développement, où les normes en matière de sécurité, de santé et d’environnement sont les plus faibles.

L’exposition chronique aux pesticides a également été liée à plusieurs maladies telles que le cancer, Alzheimer, Parkinson, les perturbations hormonales, les troubles du développement et la stérilité.

Les personnes les plus vulnérables face à l’exposition aux pesticides sont les agriculteurs, les populations vivant près des champs, les communautés indigènes, les femmes enceintes et les enfants. C’est pourquoi ils ont besoin d’une protection renforcée, clament les experts, qui insistent particulièrement sur la nécessité de protéger les enfants contre les pesticides dangereux.

Ils ont également attiré l’attention sur le fait que certains pesticides contaminent les sols pendant des dizaines d’années et sont une menace pour l’environnement global, dont dépend la production agricole. L’usage excessif de pesticides cause une perte de biodiversité, détruit les ennemis naturels des parasites et réduit la valeur nutritionnelle des aliments. Ce qui a également un impact énorme sur l’économie mondiale.

L’utilisation de pesticides néonicotinoïdes est particulièrement préoccupante, car il est accusé d’avoir fait chuter drastiquement les populations d’abeilles ces dernières années. Ce qui impacte directement la production alimentaire puisque 71 % des plantes cultivées sont pollinisées par les abeilles.

Les experts reconnaissent toutefois que certains États ont pris des mesures sur la réglementation de l’usage des pesticides, mais ils constatent également que l’absence de traité mondial laisse un vide juridique et pose de sérieuses questions sur le respect des droits humains.

« Sans une harmonisation des règles en matière de production, de vente et d’utilisation de pesticide, les effets négatifs de l’usage de ceux-ci retomberont immanquablement sur les communautés pauvres et vulnérables des pays en voie de développement », ont-ils souligné.

Ils ont également pointé du doigt l’industrie agroalimentaire qui reste dans le déni concernant la dangerosité de certains pesticides, l’ampleur de leur impact, tout en accusant les agriculteurs d’être responsables d’une mauvaise utilisation de leurs produits. Ils dénoncent également les campagnes de lobbying des industriels pour influencer les décideurs politiques et contester les études scientifiques.

Hilal Elver, a par ailleurs souligné l’avancée de l’agroécologie qui remplace les produits chimiques par la biologie et qui montre des rendements suffisants pour nourrir la population mondiale sans hypothéquer l’avenir des générations futures.

« Il est temps de renverser le mythe selon lequel les pesticides sont nécessaires pour nourrir le monde et d’entamer la transition globale vers une production agricole plus sûre et plus saine », ont-ils conclu.

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