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Importations d’OGM: Bruxelles propose une solution à la carte qui fâche tout le monde

La Commission européenne a proposé mercredi une réforme des règles d’importations des OGM facilitant leur entrée dans l’Union, en échange de la possibilité pour les États de bannir leur utilisation, prenant ainsi le risque de fâcher à la fois pro et anti OGM.

Cela reflète la volonté du président de l’exécutif européen, Jean-Claude Juncker, de mieux « prendre en compte les préoccupations » et sensibilités des États et citoyens européens, a souligné la commissaire Margrethe Vestager, lors d’un point de presse.

Mais la proposition fait l’unanimité contre elle. L’industrie OGM et agricole y voit un obstacle aux affaires, et les défenseurs de l’environnement accusent Bruxelles de s’exonérer de ses responsabilités.

Elle maintient le système actuel qui contraint la Commission à ouvrir le territoire européen aux importations d’OGM en l’absence de majorité de blocage des États, si l’Agence de sécurité alimentaire conclut qu’ils sont sans risque.

Mais elle introduit la possibilité pour les États de refuser l’utilisation d’OGM sur leur territoire, s’ils peuvent invoquer « des motifs légitimes ». L’UE a avalisé le mois dernier une réforme similaire pour l’autorisation des cultures OGM.

La proposition doit être négociée entre les États et le Parlement européen. Mais sans attendre, la Commission prévoit de débloquer les autorisations, en souffrance parfois depuis 2013, de 17 OGM destinés au fourrage, selon une source européenne.

En vertu des règles actuelles, 58 OGM ont reçu l’autorisation d’importation dans l’UE, essentiellement pour l’alimentation animale. A chaque fois, l’exécutif européen a dû trancher, même en trainant les pieds, faute de consensus au sein des États (environ 40% pour, 35% contre et 25% abstentionnistes).

Cinq organisations environnementales, dont Greenpeace et les Amis de la Terre, ont dénoncé ce projet comme une violation des engagements pris par M. Juncker pour une gestion plus démocratique de la question.

Greenpeace a pointé le risque « de sacrifier les intérêts des Européens sur l’autel de l’accord de libre-échange avec les États-Unis ».

En face, la Biotech Crops Alliance a dénoncé, au nom des producteurs américains, une « fragmentation » du marché unique, laissant planer la menace de recours devant l’Organisation mondiale du commerce (OMC). « L’administration américaine a fait tous les étages à Bruxelles contre le projet », a confié à l’AFP une source proche du dossier.

Quatorze associations représentant l’agro-industrie européenne, dont la Copa-Cogeca, principal lobby agricole de l’UE, se sont opposées à toute « renationalisation », au vu de la dépendance de l’élevage européen envers le fourrage OGM.

La question divise au sein même de la Commission, même si M.Juncker « a choisi de passer en force pour se débarrasser de la patate chaude », selon la même source.

Les commissaires socialistes français, Pierre Moscovici, et maltais, Karmenu Vella, jugent que le projet ne donne pas assez de garanties juridiques aux États choisissant de bannir l’utilisation des OGM, a-t-elle précisé. En face, la libérale suédoise Cécilia Malmström, chargée du Commerce, et le conservateur allemand Günther Oettinger, sont contre toute possibilité d’exemption pour les États.

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