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Côte d’Ivoire: la difficile équation environnement/populations au Mont Péko

Le Vif

A la vue d’une voiture, deux hommes laissent tomber leurs vélos et s’enfuient dans la forêt, abandonnant leur précieux engin et des sacs d’une quarantaine de kilos de cacao. Plus loin, une femme disparait dans la brousse sans son fagot de bois.

C’est le quotidien du Mont Péko, parc national de 35.000 hectares dans l’Ouest de la Côte d’Ivoire, où les agents jouent au chat et à la souris avec les occupants illégaux pour protéger une flore et une faune exceptionnelles, notamment des éléphants nains.

Cette chaine de montagne grise émergeant d’un écrin de verdure a été exploitée illégalement par des cultivateurs pendant des années, notamment à la faveur de la crise politique qui a plongé la région dans l’anarchie.

Mais fin juillet, le gouvernement a finalement mis ses menaces d’expulsion à exécution, forçant les occupants illégaux à partir et interdisant aux villageois vivant en bordure du parc de travailler les champs qu’ils y avaient défrichés.

‘Mont Cacao’

Un peu moins de 50.000 personnes, 21.000 riverains et 25.000 « occupants », dont une majorité d’immigrés burkinabè mais aussi des Ivoiriens d’autres régions, sont concernés, selon le ministère de la Solidarité.

« Ce n’était plus le Mont Péko mais le Mont Cacao… » reconnait Moussa Koné, président du Syndicat national des agriculteurs pour le Progrès.

« Il faut protéger la forêt, lutter contre la déforestation, sinon la Côte d’Ivoire va devenir un désert. Mais, il fallait des mesures d’accompagnement. On prive les gens de leurs moyens de subsistance. On pourrait les intéresser en finançant des activités de protection du site par exemple ».

« C’est la pauvreté qui commence, la misère », résume Apollinaire Tahé Guei, cultivateur du village de Diébly, qui doit nourrir ses quatre femmes et 22 enfants. Seize de ses 23 ha se trouvent dans la zone désormais interdite.

« Avant que le Parc du Mont Péko soit créé (en 1968), ce village existait déjà et on y vivait, on cultivait. Maintenant, on n’a plus de quoi vivre », explique-t-il.

« Qu’est ce qu’on va devenir? Des braqueurs, des coupeurs de route pour pouvoir manger? », ajoute Serge Tehe Desawn, 34 ans, qui a perdu 6 de ses 7 ha.

Mêmes doléances dans tous les villages avoisinants. Les riverains ne comprennent pas qu’on les prive de « terres ancestrales ».

« C’est absurde, il y a même des écoles qui ont été construites en bordure (du parc) pour des villages et campements se trouvant à l’intérieur. Les écoles c’est l’État, non? S’il les a construites, c’est bien qu’il était d’accord », s’insurge sous couvert d’anonymat un chef de village.

AFP

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