© iStock

Armageddon chez les insectes: en 30 ans, 80% d’entre eux ont disparu

Muriel Lefevre

En trois décennies, le nombre d’insectes volants a chuté de façon drastique en Europe. Les abeilles ne seraient que le sommet de l’iceberg. On se trouverait face à une éradication massive qui menace la chaîne alimentaire. En cause: l’intensification des pratiques agricoles et les pesticides en particulier.

Une étude internationale parue dans la revue PLoS One ce 18 octobre analyse des données sur des milliers d’espèces d’insectes récoltées dans 63 aires protégées d’Allemagne depuis 1989. Les insectes ont été mesurés à l’aide des « tentes Malaise » qui sont des pièges non sélectifs utilisés par les entomologistes depuis près d’un siècle précise Le Monde. Il en ressort qu’en moyenne 76 % de ceux-ci ont disparu (avec un pic de 82 % au milieu de l’été). C’est bien plus que les 58% des vertébrés sauvages qui ont disparu depuis 1970.

Cette étude est d’autant plus alarmante qu’elle porte sur l’ensemble des insectes et pas sur une espèce en particulier. L’autre gros sujet d’inquiétude est que celle-ci a été menée dans les réserves naturelles, qui sont destinées à protéger les insectes et d’autres espèces vivantes. On savait déjà que les nouveaux paysages agricoles étaient un environnement hostile pour les insectes. C’est comme un désert, voire pire dit à la BBC le docteur de Kroon, de l’université de Radboud aux Pays-Bas. « On connaissait le véritable déclin dans ces zones-là. La grosse surprise a été que cela se passe également dans les réserves naturelles adjacentes. » précise-t-il.

Cette disparition a de grandes conséquences sur le reste de la chaîne alimentaire et les écosystèmes puisque les insectes en sont la base. Les insectes fournissent en effet une source de nourriture pour de nombreux oiseaux, amphibiens, chauves-souris et reptiles, tandis que les plantes dépendent des insectes pour la pollinisation.

Quelle en est la cause ?

Les données récoltées ont été comparées à différents facteurs comme la température, les changements du paysage ou la biodiversité végétale sur les sites étudiés. Si ces facteurs extérieurs jouent un rôle, ils ne peuvent expliquer à eux seuls cette hécatombe. Les recherches permettent aussi d’écarter le réchauffement climatique ou la perte de biodiversité végétale. Tout comme une cause infectieuse précise Goulson de l’université du Sussex dans Le Monde. La baisse touche en effet toutes les espèces et se confirme d’année en année précise encore la BBC. L’explication la plus plausible, selon les chercheurs, serait les changements des pratiques des agriculteurs. Moins de marges de parcelle et de nouvelles méthodes de protections des cultures. En particulier le traitement par enrobage des semences et les insecticides néonicotinoïdes utilisés un peu partout depuis la fin des années 90 puisqu’on pensait qu’ils étaient moins nocifs pour les animaux et insectes non nuisibles. Or celui-ci même à dose non létale perturbe les insectes volants. Il reste plus longtemps dans le sol et persiste dans les plantes sauvages.

Si les mesures ne concernent que l’Allemagne, elles n’en sont pas moins représentatives du reste de l’Europe puisque la France ou l’Angleterre ont des systèmes agricoles semblables.

Comme le conclut Vincent Bretagnolle, chercheur CNRS, toujours dans Le Monde : on peut tous facilement se rendre compte de la disparition massive des insectes volants. « Il y a vingt ans, il fallait s’arrêter toutes les deux heures pour nettoyer son pare-brise tant les impacts d’insectes étaient nombreux, aujourd’hui ce n’est plus du tout nécessaire. »

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire