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Y a-t-il des immo junkies parmi vous ?

Sur le marché immobilier, il existe un prédateur qui sévit : l' »immo addict ». Drogué de l’immobilier, il compulse les annonces, dévore les magazines déco et… visite des maisons comme il irait au musée.

L’immobilier rend fou. Il aurait même engendré un nouveau mal urbain : l’immo junkie. Les émissions de télévision qui cartonnent n’en sont pas les seules manifestations. « Je suis capable de passer une journée entière à regarder les sites immobiliers. C’est juste une drogue : je suis accro aux annonces immobilières », reconnaît Sandra, infirmière de 32 ans. Chaque jour, avec son mari, Catherine, une enseignante, épluche les offres en ligne. « On fantasme sur les maisons inabordables. On flâne aussi devant les vitrines des agences des beaux quartiers : oui, c’est du lèche-vitrines immobilier ! » sourit Catherine.

A la faveur d’un marché en hausse quasi constante (les prix ont été multipliés par neuf en trente ans), l’immo addict ne serait plus une espèce rare. L’énergumène peut ou non être propriétaire, voire sur le point d’acheter ; parfois, il assouvit sa passion exclusivement en ligne. Surtout, il pose pas mal de soucis aux professionnels. Car certains accros sont si atteints qu’ils n’hésitent pas à solliciter des agents immobiliers simplement pour visiter des biens gratuitement. « Ils aiment se faire courtiser en se faisant passer pour des clients qu’ils ne sont pas, puis ils inventent n’importe quoi pour fuir les jambes à leur cou. En fait, ils n’ont bien souvent pas les moyens d’acheter les biens qu’ils visitent », confirme Mathieu Delvaux, agent immobilier à Ixelles.

Vous en avez d’ailleurs peut-être repéré un : l’immo junkie se révèle intarissable sur les déductions fiscales et les subtilités des différents prêts, ce qui peut très vite le rendre indigeste. « Dans les soirées, c’est toujours le second sujet que j’aborde après le boulot », raconte Fred, 43 ans et adepte du débat immobilier. Le top, pour lui : tomber sur des interlocuteurs qui maîtrisent le jargon et l’évolution du marché. Gare à ceux qui tentent d’enjoliver la situation.

Internet et smartphones rendent encore plus accros

La prolifération des applications Internet sur les sites immobiliers et des smartphones (ils offrent aux « clients » de nouveaux services comme l’offre immobilière en temps réel dans le quartier que vous arpentez), aurait même amplifié le nombre de « victimes ». Ainsi Sandra est devenue addict en voulant acheter son appartement (75 % des Belges sont propriétaires : un record absolu). « Je compulsais les annonces sur le Web, pour avoir une idée de ce que nous pouvions nous offrir et où il fallait concentrer nos recherches ; ensuite pour me rassurer d’avoir fait le bon choix… A présent, j’en viens à vérifier le prix de chaque appart à vendre près de chez moi. Sur les sites, il y a les photos, les visites virtuelles à 360 degrés ; on voit comment les gens ont décoré chez eux… »

Pour les psychiatres, la quête du logement impossible n’est pas un divertissement pour tout le monde. Le logement est devenu une source de stress et d’angoisse. « Aujourd’hui, on ne peut plus assurer un emploi. L’habitat est donc devenu le principal élément de sécurité matérielle, déclare Catherine Bouvalet. Mais certains individus ne passent jamais le cap par peur de l’engagement. Dans une ère de zapping permanent, les crédits à vingt ou trente ans sont en inadéquation avec les nouvelles temporalités. Ils impliquent une projection sur le long terme qui n’est tenable qu’avec une vision optimiste de l’avenir. » A l’image de Sébastien, commercial de 38 ans. Il passe son temps à visiter des maisons mais, à chaque fois, épingle des défauts rédhibitoires qui le font fuir. Résultat, il est toujours locataire.

SORAYA GHALI

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