Carte blanche

Visites domiciliaires: Pourquoi le projet de loi ne doit pas passer

Quelque chose de profond m’a poussé à lancer une pétition contre le projet de loi sur les visites domiciliaires, pourtant je ne suis qu’un simple citoyen, et n’appartient à aucune organisation politique.

Avec aujourd’hui 2900 signatures, je lance cet appel au gouvernement.

Ce projet de loi touche au respect de la vie privée et aux frontières du domicile, et il remet en cause un de ses principes: Entrer de force chez les gens ne peut se faire que s’ils ont commis un délit important. Pour nous, l’ingérence d’une perquisition domiciliaire doit absolument rester proportionnelle à l’ampleur du crime commis!

Pour un réfugié, résider illégalement en Belgique est déjà devenu un délit pénal, et on veut faire du refus de quitter le territoire, un délit grave qui justifierait des perquisitions menées de force au domicile des réfugiés, ou au domicile des personnes qui les hébergeraient. C’est hors de proportion! Être migrant et refuser de quitter le pays, ne peut être considéré comme un crime pire que ceux commis par des voleurs, escrocs, violeurs.

Cette visite domiciliaire serait supervisée par un juge d’instruction, mais cela nous choque aussi car ce n’est absolument pas son rôle! Un juge d’instruction est là pour instruire à charge et à décharge, et pas pour évaluer le bienfondé d’une perquisition domiciliaire, sans pouvoir instruire à charge et à décharge. Les juges ont d’autres choses à faire, bien plus importantes! De hauts magistrats, des juges, des avocats le disent ! La Belgique est déjà, sans ce projet de loi, un des pays de l’UE qui émet le plus d’ordres de quitter le territoire, 33000 en 2016 !

Pendant ce temps, des réfugiés dorment dehors, par tous les temps. Chez nous, ce n’est pas acceptable! La plateforme citoyenne héberge quotidiennement 500 personnes du parc Maximilien, parce que l’état ne le fait pas, dans un pays de 11.365.000 habitants! Bien sûr qu’ils ne demandent pas tous l’asile, puisque plus de 55% des demandes essuient un refus, (en tenant compte des Dublin). À leur place, j’hésiterais! Qu’importe qu’ils soient migrants économiques, humanitaires, en situation illégale ou demandeurs d’asile, on ne va quand même pas passer à côté d’eux sans les voir ! On doit les traiter avec un minimum de dignité, leur permettre de manger et boire, de dormir à l’abri, et d’avoir un minimum de soins médicaux!

Cela créerait un appel d’air? En 2016, dans le monde, sur 67 millions de réfugiés et déplacés, seulement 8% du total se trouvent dans des pays riches! Les pays pauvres accueillent bien plus de réfugiés que nous! Par exemple, l’Ouganda accueille 980.000 réfugiés, et son PIB par habitant est 25 fois inférieur au nôtre! Les gens préfèrent rester au plus proches de chez eux, et s’ils risquent volontairement leur vie en partant loin (5000 décès en traversant la méditerranée), c’est qu’ils sont à bout. Les chiffres le prouvent!

La peur de l’invasion? La population de l’UE n’a évolué que 0,3 % en 2016 malgré l’immigration! Pourquoi? La dénatalité: 13 États de l’UE ont des taux de changement naturels négatifs, et 10 pays de l’UE se dépeuplent! La Roumanie a perdu 122.000 habitants. Pour compenser, certains pays ouvrent leurs frontières aux travailleurs immigrés, la Pologne a accordé 586.000 permis de résidence, et accepté 53 demandes d’asile. En Belgique, si on avait accepté toutes les demandes d’asile, la population Belge n’aurait augmenté que de 0,13%. La conclusion est claire: Ni invasion de migrants, ni appel d’air!

Les réfugiés économiques? L’immigration a en fait un impact positif sur l’emploi et sur les revenus dans les pays riches! Selon l’OCDE, un immigré rapporte 3.500 € de rentrées fiscales annuelles. On fustige les réfugiés économiques, en réalité nous en avons besoin!

Notre demande:

Ces sujets touchent à des valeurs si profondes que des gens seraient prêts à entrer dans l’illégalité et que d’autres envisagent une désobéissance civile. Quand on en arrive là, c’est qu’une frontière intérieure est franchie. Devrions-nous nous couper d’une partie de nos concitoyens? Au nom de la majorité? Dans une famille, quand certains sujets heurtent profondément certaines personnes, n’est-il pas préférable de faire des efforts pour leur permettre de continuer à participer à la communauté sans devoir renier les idées qui leur sont essentielles?

Faisons un parallèle avec la loi qui légalise l’avortement: la loi a été votée par la majorité, mais on n’impose pas aux médecins que cela heurterait, de pratiquer des avortements. N’est-ce pas une bonne manière d’aborder la vie en commun dans notre pays?

Nous en appelons au même principe de respect des convictions profondes et raisonnées de chacun. Ce projet de loi nous heurte, nous lançons donc cet appel au gouvernement, au nom du respect de la pluralité de pensées quand celles-ci touchent à des convictions profondes: Renoncez à ce projet de loi, ne rejetez pas une partie de vos concitoyens, ne nous rejetons pas les uns les autres.

Et ne laissons plus personne dormir dans la rue.

Jean Leveugle, un citoyen et plus de 2900 signataires.

(1) La pétition « NON au projet de loi sur les visites domiciliaires » est disponible sur le site avaaz.org

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