Le député Eric Van Rompuy (CD&V) et le ministre des Finances Johan Van Overtveldt (N-VA). © Belga

Van Rompuy: « Ici, vous êtes ministre des Finances, pas journaliste ou économiste »

Le député Eric Van Rompuy (CD&V) a fait la leçon au ministre des Finances Johan Van Overtveldt (N-VA) jeudi en pleine séance de la Chambre, un nouveau signe des tensions qui opposent depuis quelques semaines la N-VA à ses partenaires flamands, le CD&V en particulier.

Le ministre des Finances a exprimé ses réticences jeudi dans la presse vis-à-vis de la nouvelle politique que s’apprête à suivre la Banque centrale européenne (BCE) désireuse d’acheter massivement de la dette pour relancer l’économie. L’Allemagne n’est guère favorable à ce changement de cap, craignant que les Etats en profitent pour lâcher du lest dans leurs réformes structurelles. Le ministre N-VA des Finances n’a pas caché non plus son scepticisme, craignant particulièrement pour l’épargne des Belges.

Jeudi, en séance plénière, il ne s’est pas écarté de ses déclarations à la presse, qui, à en croire le CD&V, ne reflètent pas la position du gouvernement. « Ici, vous êtes ministre des Finances, pas journaliste ou économiste », lui a lancé Eric Van Rompuy (CD&V) évoquant le passé de rédacteur en chef de Trends de M. Van Overtveldt, par ailleurs chargé de cours. « Vous avez droit à un avis personnel mais vous êtes responsable de la politique de la majorité. J’espère que cela vous servira de leçon. Je ne veux plus entendre ce genre de déclarations à l’avenir », a-t-il enchaîné après que le chef de groupe N-VA Hendrik Vuye fût venu au secours de son ministre. Ce dernier avait souligné que l’économiste Van Overtveldt avait le droit d’exprimer son opinion.

Le président du CD&V lui-même, Wouter Beke, interrogé par la VRT, a jugé « inappropriées » les déclarations du ministre des Finances. Il y a vu une « atteinte à l’indépendance » de la BCE. Selon Wouter Beke, il convient d’éviter un scénario déflatoire à la japonaise. Il n’est dès lors « pas judicieux » qu’un ministre des Finances s’exprime de la sorte.

Le ministre des Finances s’est pour sa part défendu en disant respecter « strictement » la séparation entre ce qui relève des décisions politiques et ce qui relève des décisions des banques centrales. « Mais à l’instar des banques centrales qui n’hésitent pas à commenter la vie politique, je pense qu’un responsable politique a le droit de réfléchir aux éventuelles conséquences des décisions sur le plan monétaire », a-t-il précisé.

Johan Van Overtveldt a assuré n’avoir en « aucun moment » voulu « remettre en cause » les décisions de la BCE. Il a voulu « lancer un appel à réfléchir sur les conséquences d’une politique déterminée ».

Eric Van Rompuy (CD&V) a estimé qu’il était temps pour l’Europe de s’inspirer de la politique de la réserve américaine qui en réinjectant des moyens a permis de relancer l’économie outre-Atlantique. Il a fait observer que le gouverneur de la Banque nationale Luc Coene soutenait pleinement le nouveau virage entrepris par la BCE.

Le député Luc Van Biesen (Open Vld) a pour sa part craint que les déclarations du ministre des Finances aux quotidiens Le Soir et De Standaard, qui ont été répercutées par l’agence Reuters, n’entachent la crédibilité de la Belgique en Europe.

Dans l’opposition, Kristof Calvo (Ecolo-Groen) a constaté les nouvelles divergences au sein de la majorité entre les groupes CD&V et N-VA. Des tensions sont apparues au cours des dernières semaines entre la N-VA et ses partenaires CD&V et Open Vld, qui tentent de se repositionner face à la toute-puissance des nationalistes flamands. C’est le cas au gouvernement flamand et au gouvernement fédéral.

Egalement dans l’opposition, le député PS Ahmed Laaouej a fait connaître sa totale désapprobation avec l’analyse économique de Johan Van Overtveldt. Il l’a par ailleurs invité à défendre au sein de l’Eurogroupe la voie de « l’assouplissement budgétaire ». M. Laaouej a également plaidé en ce sens vis-à-vis du plan d’investissement du plan Juncker.

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