Gérald Papy

Une voie négociée pour sortir de la crise grecque

Gérald Papy Rédacteur en chef adjoint

La radicalité d’une partie des électeurs grecs répond à la radicalité des dirigeants européens. Pour éviter le chaos, il faudra bien faire des concessions, de part et d’autre.

La Grèce peut-elle rester dans la zone euro ? La question est encore un peu plus d’actualité depuis qu’à la crise financière, économique et sociale, s’est ajoutée une crise politique. Pour un observateur belge, se résoudre à constater l’impossibilité de former un gouvernement après une dizaine de jours de discussions relève du phénomène surnaturel. En vertu des programmes des partis politiques grecs et du résultat des élections du 6 mai, l’issue à laquelle le président Carolos Papoulias s’est résolu mardi était non seulement prévisible, mais attendue.

Car quel est l’état des lieux de la scène politique grecque à l’aune du clivage entre partisans et adversaires du plan d’austérité de l’Union européenne ? Seule une minorité d’électeurs a appuyé les formations politiques prêtes à poursuivre la politique de Bruxelles : la Nouvelle démocratie (droite), arrivée en tête du scrutin avec 108 sièges, et le Pasok (socialiste), 3e avec 41 sièges, qui associés, n’obtiennent pas la majorité au Parlement de 151 élus. Dans le camp des « anti-plan d’austérité européen », figure une majorité des élus, mais une majorité écartelée, qui hypothèque toute alliance, entre gauche/extrême-gauche (Syriza, 52 sièges, Gauche démocratique 19 sièges, et Communistes 26 sièges) et extrême droite (Grecs indépendants, 33 sièges, et Aube dorée néo-nazie, 21 sièges). Dans cette confrontation idéologique, seule la Gauche démocratique, lors des pourparlers de ces derniers jours, a donné des signes d’ouverture à une possible participation à un gouvernement, mais à la condition d’obtenir un adoucissement des mesures d’austérité prévues ; ce qui lui a finalement été refusé. Et, pour cause, Nouvelle Démocratie et Pasok se sont engagés à appliquer stricto sensu le plan d’austérité auprès de l’Union européenne. C’est ce carcan qu’il faudra peu ou prou desserrer si les 27 veulent aider Athènes à sortir de la crise. Las, les déclarations du ministre allemand des finances Wolfgang Schäuble n’en donnent pas la direction. Il a rappelé mardi qu’il s’agissait d’un « programme d’aide préparé de façon très minutieuse » et qu’ « on ne peut pas le renégocier ».

Dans ces conditions, les nouvelles élections prévues probablement le 17 juin vont davantage compliquer que faciliter la relation avec l’Union européenne. Tout indique en effet que l’extrême gauche de Syriza, le pendant grec du Front de gauche de Jean-Luc Mélenchon en France, confortera son assise électorale. Un vote de protestation qui dans l’impossibilité de se muer en capacité de gouverner apparaîtra légitime ou irresponsable, mais en tout cas vain.

Entre la radicalité européenne symbolisée par l’attitude de l’Allemagne et la radicalité exprimée par le peuple grec soumis à une austérité, il est vrai sans précédent, seule une voie médiane négociée permettra de sortir de l’impasse. Elle paraît même souhaitée par la large majorité de Grecs qui veulent conserver l’euro. Mais elle exige des dirigeants européens un sens des responsabilités et de la solidarité, et des hommes politiques grecs un courage politique qui ne soit pas perçu comme une punition, mais comme un sursaut salvateur pour un avenir enfin apaisé.

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