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Une loterie, le permis de conduire belge ?

Muriel Lefevre

Si l’on veut apprendre à conduire, la Belgique serait l’un des pires endroits d’Europe pour le faire. C’est en tout cas l’avis de Touring. De plus, un jeune conducteur belge a plus de chance de mourir en conduisant qu’ailleurs en Europe. Le secrétaire d’Etat à la Mobilité, Melchior Wathelet, bien conscient du problème, souhaite justement réformer le système de formation.

Il est bien loin le temps où il suffisait d’aller jurer sur l’honneur que l’on savait conduire pour obtenir le précieux sésame. Bien qu’instauré en 1965, le permis de conduire ne fera l’objet d’un examen pratique et obligatoire qu’à partir de 1977. Depuis l’obtention du permis s’est quelque peu compliquée et s’apparente, pour de nombreux candidats, à un véritable chemin de croix.

Mais s’il semble compliqué à obtenir pour les aspirants conducteurs, cela serait encore trop facile pour Touring qui trouve qu’on lâche trop vite les jeunes dans la circulation. Pour Federdrive, la fédération des écoles de conduite agréées de Belgique, l’obtention du fameux papier rose se rapproche même d’une loterie. C’est une question de chance, pas toujours de compétence. « On peut même l’obtenir après une demi-heure en roulant à du trente à l’heure derrière un tracteur » déclare Jeroen Smeesteres de Federdrive dans les colonnes du Morgen.

Pourtant, il est urgent de renforcer les mesures autour de l’apprentissage de la conduite. La Belgique serait le plus mauvais élève d’Europe. Des jeunes, qui à cause du manque d’expérience réagissent mal, se retrouvent accidentés chaque semaine. En 2011, on dénombrait 141 jeunes conducteurs morts sur la route. Soit près de trois par semaine.

La filière libre et l’auto-école : deux manières d’apprendre à conduire

Il existe en Belgique deux façons d’obtenir son permis de conduire. La filière libre (avec une voiture personnelle et accompagnée d’un guide qui a son permis depuis 8 ans) et l’auto-école.

Il est possible de réussir son examen théorique dès son 17e anniversaire. Celui-ci est pour l’instant valable pour une durée de trois ans. Dès l’obtention de ce dernier, on peut demander à la commune un permis de conduire provisoire. Ce permis provisoire permet de se lancer dans la circulation seulement accompagnée d’un guide, d’un autocollant L et de quelques restrictions. C’est ce qu’on appelle la filière libre. Soit sans avoir effectué une seule heure d’auto-école. Pour valider ce permis provisoire, il est obligatoire de passer un examen pratique dans un délai de trois à dix-huit mois.

L’autre façon de l’obtenir est donc de passer par une auto-école. Plus pédagogique et sûre (moniteurs formés avec des voitures modifiées pour faciliter l’apprentissage), la méthode est également plus coûteuse. Une heure d’auto-école coûte 60 euros. Et lorsqu’on sait qu’il faut 20 heures pour un cycle de cours complet, cela représente un budget de 1200 euros.

Devant un tel marché et profitant d’un vide légal de nombreuses pseudo auto-écoles ont vu le jour. Celle-ci propose des prix cassés allant de 7 à 10 euros l’heure. En pratique une personne qui a suivi une formation et un stage en auto-école peut se proclamer instructeur. Il existerait pour l’instant entre 60 et 80 pseudo-instructeurs qui font principalement leur promo sur internet. Devant l’ampleur du phénomène Federdrive a décidé de porter plainte pour fraude et concurrence déloyale.

Une initiative encouragée par le ministre Whatelet qui va réformer le système de formation. Il veut notamment prendre des mesures strictes contre les pseudo-écoles de conduite et limiter la durée de validité du permis théorique qui passerait de 3 ans à deux ans en filière libre et de 18 à 12 mois pour l’apprentissage en auto-école.

Mais de son propre aveu, entamer une réforme en profondeur n’aurait que peu de sens, car il a été décidé par le gouvernement fédéral que l’apprentissage de la conduite et l’obtention du permis seraient bientôt régionalisés. Il est probable que si la dernière réforme remonte à 2006, c’est aussi parce que les politiques qui souhaitent rendre plus difficile et plus cher l’obtention de permis n’ont jamais gagné en popularité.

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