Gérald Papy

Une autre idée de la France

Gérald Papy Rédacteur en chef adjoint

Des duels fratricides, l’histoire de la droite française en a fourni à foison. Que l’on songe seulement au plus récent d’entre eux entre Nicolas Sarkozy et un Dominique de Villepin promis à être pendu à un croc de boucher, et l’on s’apercevra que la confrontation ouverte qui a opposé Jean-François Copé et François Fillon depuis le 18 novembre autour de la présidence de l’UMP relève, somme toute, d’un degré de violence assez commun.

Comment, dès lors, expliquer le séisme que provoque cette guerre de « petits bras » ? Deux pistes : l’hypermédiatisation et l’importance de l’enjeu, l’avenir du principal parti de la droite française. Chaînes d’information continue et réseaux « sociaux » ont bouleversé la dimension médiatique de pareille crise. Finis les coups bas feutrés dont l’écume ne transparaissait que dans les colonnes du Canard enchaîné. Aujourd’hui, le déballage est public, souvent en direct et alimenté par une noria de porte-parole autoproclamés. « Il faut en finir avec ces petits marquis du SMS et du « gossip » qui se rengorgent de voir leur prose défiler au bas des écrans des chaînes d’infos », déplorait un observateur neutre de la bataille à l’UMP dans Le Figaro. Il reste une évidence : les partis politiques et leurs « communicants » ne maîtrisent pas encore ces « nouveaux » outils, pourtant à l’oeuvre maintenant depuis quelques années. C’est étonnant et inquiétant.
L’ambition personnelle est inhérente à la carrière politique. Cette disposition n’est pas condamnable ; elle est même parfois souhaitable. Et on ne se souvient pas que Nicolas Sarkozy ait été pénalisé parce qu’il avait affirmé rêver à un destin présidentiel « pas simplement quand je me rase [le matin] ». Le problème dans le chef de Jean-François Copé et François Fillon est qu’ostensiblement l’un et l’autre ont eu beaucoup de peine à fixer la limite au-delà de laquelle la satisfaction de leur ego nuit gravement à la santé de leur famille politique et quelque part, du moins on le suppose, à leur projet idéologique. Cette dérive n’est pas propre à la droite. Il suffit pour s’en convaincre d’observer la difficulté que François Hollande a rencontrée pour maintenir un semblant d’unité dans le dossier ArcelorMittal entre Jean-Marc Ayrault, Premier ministre, et Arnaud Montebourg, ministre du Redressement productif, dont l’exposition médiatique – avec quels résultats ? – a fini de surdimensionner l’ego. Mais force est de constater que, dans ce cas comme dans la lutte pour la présidence du PS au congrès de Reims en novembre 2008, les perdants présumés (Arnaud Montebourg et Ségolène Royal) ont su s’effacer derrière l’intérêt de leur courant politique.

Evoquer le règlement controversé de l’avenir du site sidérurgique de Florange suffit à éclairer les occasions perdues par l’UMP dans son combat contre le gouvernement socialiste. Elles furent nombreuses ces dernières semaines. L’enjeu est crucial pour la démocratie et pour la France. Droite forte, droite sociale, droite moderne et humaniste, droite populaire, droite gaulliste (selon les intitulés des motions soumises à l’approbation des militants le 18 novembre) : il est urgent qu’au pays de Descartes l’UMP, si c’est encore possible, retrouve une direction et une identité. Car une droite républicaine et cohérente constitue le meilleur rempart contre la montée de l’extrême droite liberticide et intolérante, qui, aujourd’hui, n’a même pas besoin de vociférer pour engranger les dividendes du chaos.

DE GÉRALD PAPY

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