La Place de la Bourse à Bruxelles © Belga

« Un terroriste ne doit réussir qu’une seule fois, les services de renseignement à chaque fois »

Pour le journaliste néerlandais Hans Jaap Melissen, auteur d’un livre sur l’EI, les attentats de Bruxelles ne sont guère une surprise. Et l’EI frappera encore. « Il est très important d’investir dans les services de renseignements ».

Ces attentats vous ont-ils étonné ou vous y attendiez-vous ?

Hans Jaap Melissen: « J’étais seulement étonné que cela ait duré si longtemps. C’est quelque chose qu’on voit venir depuis longtemps. Aux Pays-Bas, nous avons également un organe de coordination pour l’analyse de menace qui nous met en garde. Alors on s’y attend, évidemment. La partie la plus difficile d’un attentat à la bombe, c’est probablement la confection de la bombe, et il arrive que des gens y laissent leur vie. Mais une fois qu’on a les bombes, c’est très simple. En outre, les lieux sont évidents. À l’aéroport de Zaventem par exemple, on peut aller très loin sans que personne ne vous empêche de passer. »

Que pensez-vous de l’appel à la communauté musulmane de se faire entendre, parce que les attentats ont été commis au nom de leur foi?

« Je trouve excessivement déraisonnable que les non islamiques fassent ce genre d’appels. L’objectif de ces attentats, c’est de diviser. En revanche, j’espère que cela peut faire l’objet de discussions au sein de la communauté musulmane. Évidemment, les frustrations jouent un rôle important, et à certains égards, elles sont justes, même si elles ne justifient évidemment pas ces actes. Les différentes interventions occidentales au Moyen-Orient et en Afrique du Nord sont le terreau idéal de la radicalisation. La situation est compliquée. Mais si on discrimine, on ne fait qu’alimenter ce terreau. C’est aussi une façon pour l’EI de recruter, parce qu’ils ont trop peu de combattants, ils ne peuvent plus gérer la lutte là-bas. »

Il n’y a pas de solution miracle, mais comment peut-on lutter contre ce genre d’attentats? Que faire et ne pas faire ?

« Nous devons surtout rester calmes et réaliser que le risque d’être touché n’est pas important. Mais en même temps, il ne faut pas être naïf, ils continueront à venir, tant que la foi en l’EI continuera à exister. Renforcer les contrôles aux frontières, comme c’est actuellement le cas entre les Pays-Bas et la Belgique, n’est qu’une mesure de façade pour rassurer le citoyen. Il y a suffisamment de petits villages où ils peuvent passer la frontière. Il faut aussi se demander comment gérer le retour de jihadistes revenus de Syrie. Les renvoyer ? Comment s’y prendre concrètement ? On ne peut atterrir en Syrie. On va les déposer en Turquie et les catapulter en Syrie ? Les enfermer, et si oui, pendant combien de temps ? Si vous tripotez à l’État de droit, vous faites précisément ce qu’ils veulent. »

« En tout cas, il est important d’investir dans de bons services de renseignement, qui partagent les informations. Les auteurs de Bruxelles auraient très bien pu se rendre à Schiphol. Faire un suivi permanent coûte beaucoup d’argent et le problème linguistique joue également un rôle. Les terroristes apprennent aussi et deviennent plus intelligents. Un terroriste ne doit réussir qu’une seule fois, les services de renseignement à chaque fois. »

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