Olivier Mouton

« Un coup de tonnerre dans le ciel bleu »

Olivier Mouton Journaliste

Le MR a rapidement lâché Serge Kubla pour démontrer qu’il « ne transige pas avec l’éthique ». Mais cette affaire tombe toutefois à un bien mauvais moment pour les libéraux francophones.

« Nous avons été abasourdis par la nouvelle. C’est un coup de tonnerre dans un ciel bleu, c’est le cas de le dire… » Dans l’heure qui a suivi l’arrestation de Serge Kubla, bourgmestre MR de Waterloo, accusé de corruption dans une affaire concernant Duferco au Congo, l’Etat-major libéral francophone a mis en place une réaction rapide pour réclamer la démission de son mandataire local. « Parce que nous ne transigeons pas avec l’éthique. Et parce que selon nos informations, Serge Kubla aurait partiellement avoué… »

La riposte rapide du nouveau président Olivier Chastel mérite d’être saluée, même si certains se demandent si elle ne fut pas un rien hâtive. L’homme, il est vrai, a de l’expérience : il a construit sa notoriété politique en dénonçant un Charleroi socialiste gangréné et sait mieux que quiconque combien il est important de faire rapidement un pas de côté dans ce genre de situation. Il convient aussi de souligner l’élégance et la retenue du PS qui, par la voix du successeur de Serge Kubla au ministère de l’Economie wallonne, Jean-Claude Marcourt, a choisi de ne pas jouer l’homme et de saluer au contraire son parcours passé.

Lâcher Serge Kubla aussi rapidement n’était en outre pas un acte réclamant beaucoup de courage de la part des libéraux. Le bourgmestre, âgé de 67 ans, est en fin de carrière et sa succession ne devrait pas être trop difficile dans un fief libéral bétonné, entre la députée wallonne Florence Reuter et l’échevin Yves Vander Cruysen.

Pour autant, ce « coup de tonnerre » embarrasse potentiellement le MR car il survient à un moment délicat, alors que le parti avait réussi à surmonter les débuts compliqués de la Suédoise au fédéral. Non que Serge Kubla soit un élément clé du MR nouvelle génération, mais bien parce que ce qui lui arrive est perturbant à double titre. D’une part parce que personne n’était apparemment au courant de ces pratiques, ce qui conforte l’image d’une formation politique aux individualités peu contrôlables. D’autre part parce que cette inculpation véhicule la perception d’un affairisme liée au grand capital et à des liens troubles avec notre ancienne colonie, précisément alors que le MR entend défendre ces prochaines semaines son image sociale à l’occasion du contrôle budgétaire et du débat sur le « tax shift ».

Le MR fait le gros dos, réagit vite, élimine le mauvais grain, histoire de ne pas obscurcir son ciel bleu. Combien de temps cela pourra durer?

Les révélations du Canard enchaîné au sujet d’un autre bourgmestre MR, Armand De Decker (Uccle), ne sont certes pas de la même nature : il n’y a pas de procédure judiciaire et le principal intéressé nie farouchement, menaçant l’hebdomadaire satirique français d’une attaque en diffamation. Mais la perception, là encore, est celle d’un parti de cadres bien nantis, qui n’hésitent pas à toucher de plantureux émoluments d’avocat à côté de leur rémunération publique.

Le MR fait donc le gros dos, réagit vite, élimine le mauvais grain, histoire de ne pas obscurcir son ciel bleu. Il reste à voir combien de temps cela pourra durer.

Quant à l’image de la politique, malmenée, elle se serait bien passée de ces nouveaux faits d’armes démontrant combien l’intérêt général, parfois, est sacrifié à d’autres desseins moins louables.

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