Gérald Papy

Ukraine : la répression permise par l’impuissance de l’Europe

Gérald Papy Rédacteur en chef adjoint

Le pouvoir ukrainien ira-t-il au bout de la répression des opposants démocrates de la place Maidan ? Pour l’Europe, il est urgent de présenter un front uni et de forcer Poutine à plus de souplesse.

La réaction de l’Europe à la crise en Ukraine, on peut en trouver la métaphore dans l’histoire du philosophe Français Bernard-Henri Lévy mardi soir dans Le Grand Journal de Canal + : quelques minutes d’antenne pour lancer un appel de détresse depuis Kiev et puis on passe à autre chose, gaudriole et revue des médailles aux Jeux olympiques d’hiver en Russie. Oui, malgré ses envolées lyriques agaçantes, B-H L a raison de dénoncer le cynisme d’un Vladimir Poutine qui parade à Sotchi sous le regard des téléspectateurs du monde entier et donne son feu vert à la répression des manifestants pro-européens de la place Maidan. Non, bien sûr, contrairement à ce que leur a exhorté de faire le « philosophe-baroudeur », les Européens ne boycotteront jamais la fin des olympiades.

Cyniquement dit, il faudra que la répression par le pouvoir atteigne des bilans en pertes humaines autrement plus élevés pour que l’Union européenne réagisse plus fermement que par une simple condamnation du recours à la violence. C’est une question de rapport de force, politique et économique. La Russie n’est pas la Serbie de Milosevic. C’est aussi, il faut bien le reconnaître, une attitude qui est à la mesure de la complexité de la situation. Qu’on l’exècre ou non, le président Viktor Ianoukovitch a pour lui la légitimité démocratique dans un pays écartelé entre populations pro-russe et pro-européenne. Ces dernières semaines, la voie négociée a été tentée, le Premier ministre démissionnant et le poste étant proposé à l’opposition. Celle-ci réclame la tenue d’élections anticipées ; ce que ne consent pas le régime. Dans les rangs de la contestation figurent des groupes nationalistes aux méthodes radicales. Dans les opérations de mardi soir, des opposants ont été tués, mais aussi des policiers.

Cependant, une situation aussi complexe soit-elle ne doit pas conduire à la paralysie ; image que donne peu ou prou l’Union européenne depuis le début des affrontements en novembre. Déclenchés, il est utile de le rappeler pour signifier la responsabilité européenne, par le refus subit de Kiev de conclure les accords d’association avec l’UE. Avant que la répression ne plonge l’Ukraine dans une fracture irrémédiable, il est donc urgent que les Européens, ayant enfin fait leur unité sur ce dossier, conjuguent leurs forces et multiplient les initiatives utiles pour forcer le dialogue entre pouvoir et opposition. Mais il y a fort à parier que l’Union ne pourra véritablement peser dans le débat que si elle tient à l’égard de Vladimir Poutine un discours plus ferme et agite la menace de conséquences économiques ou autres s’il ne desserre pas sa mainmise de nature impériale sur certaines anciennes républiques d’URSS.

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