Toutes ces intercommunales et ASBL sont-elles bien nécessaires?

Après le scandale du Samusocial, les politiques promettent plus d’ouverture et plaident en faveur d’un décumul. C’est une façon de fuir le vrai débat.

« Les parvenus au PS ne sont pas ces quelques brebis galeuses. Ils sont la conséquence d’un système qui fait de talents politiques des parvenus immoraux. » C’est là l’analyse que Frank Van Massenhove livre sur son blog. Van Massenhove est un témoin privilégié : pendant des années, il a été chef de cabinet. A présent il est président du service public fédéral Sécurité sociale. Il constate l’estompement de la norme parmi  » tous les partis, mais surtout au PS ».

Van Massenhove décrit comment cet estompement a lieu pas à pas, « presque comme dans une secte ». D’abord on promet fidélité aux principes du parti et aux camarades. Par étape, on reçoit une récompense. Un emploi au bureau d’études. Une promotion pour le cabinet. Un mandat non payé dans une association culturelle ayant pignon sur rue. Un mandat payé dans une intercommunale ou une ASBL. « De toutes les matières, c’est la ouate du pouvoir et des mandats qu’ils préfèrent », écrit Van Massenhove, paraphrasant une chanson de la chanteuse française Caroline Loeb. « L’accoutumance à l’évidence du pouvoir grandit sans cesse. »

En début d’année, les scandales autour de Publifin et Publipart ont provoqué un tollé. Dans ces intercommunales, les communes travaillent ensemble pour gérer les équipements d’utilité publique tels que l’électricité, le gaz, l’eau, mais aussi le traitement de déchets ménagers ou les logements sociaux. Il s’avère qu’il y est question d’estompement de la norme. On arrange les comptes annuels, on encaisse des jetons de présence sans assister aux réunions, on aide les membres de sa famille à trouver un emploi, on se rend dans des restaurants étoilés, etc. Il y a dix ans, Wim Moesen et Kristof De Witte de la KuLeuven concluaient déjà que les intercommunales, en Flandre et en Wallonie, étaient devenues une toile d’araignée embrouillée. Déjà à l’époque, les deux professeurs estimaient qu’ils passaient à peine le test de gouvernance vertueuse.

Aujourd’hui, l’organisation bruxelloise de sans-abri Samusocial nage en plein scandale. L’ex-bourgmestre Yvan Mayeur et l’ex-présidente du CPAS Pascale Peraïta gagnaient chacun 17 000 euros en plus. Dans cette affaire aussi, il est question d’auto-enrichissement, mais ici c’est encore pire parce que c’étaient justement les politiques socialistes qui montaient des constructions pour voler de l’argent destiné aux sans-abri.

ASBL à Bruxelles: C’est ni plus ni moins un hold-up organisé par les partis politiques

Il y a à Bruxelles un fouillis d’ASBL qui semble fondées pour se servir. Même la garde-robe de Manneke Pis est logée dans une ASBL. Et il y a 200 structures de ce type. Elles garantissent 1400 postes, bons pour au moins 1,2 million d’euros de jetons de présence par an. C’est ni plus ni moins un hold-up organisé par les partis politiques.

Les intercommunales et les ASBL ne sont ni un hasard ni un excès, écrit encore Van Massenhove, elles sont « une nécessité ». Si vos partisans voient un mandat politique leur échapper, vous pouvez les garder satisfaits grâce à un mandat qui grandit leur considération ou grossit leur portefeuille. « Et ce n’est pas une prérogative du PS. Tous les présidents de parti se servent avidement de l’aumône alimentée par les mandats dans les organisations parallèles d’organes d’état réguliers. Ils permettent au président de rester en place. »

En réaction aux révélations, les politiques promettent plus d’ouverture et annoncent un cadastre avec tous les mandats. Certains veulent limiter les indemnités, d’autres parlent d’un décumule, de sorte qu’un individu ne peut s’enrichir de plusieurs mandats. On vient d’apprendre que les intercommunales flamandes devaient fort dégraisser : 1027 administrateurs sur 2343 sont priés de partir.

Tout cela est probablement souhaitable, mais ne répond pas à la question fondamentale : toutes ces intercommunales et ASBL sont-elles bien nécessaires ? Il est clair que beaucoup de ces ASBL ne le sont pas. Et il y a longtemps qu’un débat s’impose sur les intercommunales : sont-elles la structure la plus adaptée pour ramasser les déchets ? Ou pour garder les crématoriums ouverts ? Fournissent-ils le meilleur service au prix le plus bas ? Quelles sont les tâches d’un état moderne ? En ne posant pas ces questions, les partis maintiennent le système pernicieux qui leur permet de distribuer des mandats.

Il y a quelques jours, Piet Vanthemsche, ancien président du Boerenbond, mettait en garde sur Twitter : « Quand tous les dégoûtés seront partis, il ne restera plus que les dégoûtants. Ne jetez pas l’enfant avec l’eau du bain. » Mais il est important de vérifier si toutes ces intercommunales et ASBL ont une autre raison d’exister que la distribution de statuts, d’argent, et de bling-bling parmi les amis. Si elles ne l’ont pas, supprimez-les.

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