Theo Francken © Belga

Theo Francken peut-il devenir l’homme au million de voix ?

Muriel Lefevre

Un million de personnes qui votent pour un politique belge. Ce n’est encore jamais arrivé. Et si Theo Francken était le premier?

Jusqu’à présent le record est détenu par Leo Tindemans qui a atteint 983.600 voix de préférence en 1979. Mais il se murmure que Francken pourrait bien être celui qui dépassera ce cap mythique. La N-VA envisage en effet très sérieusement d’envoyer, en 2019, son secrétaire d’État à l’Asile et à la Migration à la tête du Parlement européen. Une information confirmée en personne par Francken au Standaard. Les avantages sont évidents: la liste européenne est la seule, après la réforme du Sénat, pour laquelle chaque Flamand peut voter. Si la N-VA veut capitaliser sur la popularité de Francken, la liste européenne semble toute désignée et permettrait d’afficher Francken partout en Flandre. Et de s’attirer un nombre de votes record.Au siège de la N-VA, on rêve même de moins en moins secrètement de dépasser le record intouchable depuis bientôt 40 ans de Leo Tindemans.

Avec ses 983.600 voix atteintes en 1979, il reste la référence, le Graal ultime en politique. Pourtant, malgré ce score historique, les conditions ne lui étaient pas forcément plus favorables qu’aujourd’hui. À l’époque, on ne pouvait voter qu’à partir de l’âge de 21 ans, les Belges étaient moins nombreux et enfin l’électeur ne pouvait que donner un seul vote de préférence. Mais l’euphorie des premières élections européennes lui vaudra de rassembler 48% des votes flamands sur son nom.

La N-VA a-t-elle des raisons d’y croire ?

À n’en pas douter, leur poulain a ses chances. Lors du dernier sondage du Standaard et de la VRT, 42% des sondés se disaient prêts à voter pour lui. On estime qu’il y a 5 millions de votes flamands. Pas besoin d’avoir la médaille Fields pour se rendre compte qu’avec ce pourcentage on atteint, en principe, facilement le million. Surtout en sachant que l’homme est encore dans une phase ascendante grâce à ce qu’on appelle l’effet Maggie De Block. Un effet qui veut que celui qui s’occupe de l’immigration et de l’asile devienne très vite très populaire dans notre pays. Et l’homme a en plus eu la bonne idée de pousser son avantage sur les réseaux sociaux où il entretient la flamme au travers de ses thèmes de prédilection.

Du coup, axer une campagne européenne uniquement sur la migration n’a donc rien d’une hérésie, se dit-on à la N-VA. Cela pourrait même encore servir davantage de caisse de résonnance puisque de plus en plus de Flamands perçoivent bien que, sur ce sujet, on est bien peu de chose au niveau national et que tout se passe désormais au niveau européen.Néanmoins atteindre un score dépassant les 35 % ne semble plus être une réalité au sortir de l’isoloir. En effet même lorsque le très populaire Leterme s’est approché des 800.000 voix, il n’a obtenu que 31 % des voix pour le sénat. Même la N-VA le concède: elle vise un score qui devrait atteindre les 30%, pas beaucoup plus. Ce qui est loin d’être suffisant pour faire de Francken l’homme aux million de voix.N’oublions pas non plus qu’il était encore considéré comme un outsider dans le Brabant Flamand en 2014. Il n’avait à l’époque obtenu que 44 498 voix. Il vient donc de loin, de très loin. Et il n’est pas dit que son ascension, aussi fulgurante soit-elle, parviendra à combler un tel écart. L’homme est aussi très clivant. Le fait qu’on l’aime ou qu’on le déteste devrait jouer à son désavantage.

D’autant plus que Francken n’est pas seul en lice. Il a en face de lui des poids lourds de la politique comme le leader du parti européen Guy Verhofstadt (Open VLD et 531 030 voix en 2014) et la commissaire européenne Marianne Thyssen (CD & V et 340 026 voix). Des ténors qui ne devraient lui faire aucun cadeau.

Enfin, comme le fait encore remarquer le Standaard, on est en droit de se demander si un tel score n’a pas tout d’un chant du cygne. Qu’on pourrait traduire en politique belge par le syndrome Leterme et qui fait que ceux qui ont obtenu des scores monstres sont très vite grillés, car on en attendait trop d’eux. Au point de ne plus jamais revenir sur l’avant-scène politique.

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