Terrorisme : y a-t-il d’autres Hakim Benladghem ?

Pour un homme dangereux, Hakim Benladghem, neutralisé le 26 mars par la police judiciaire fédérale, aidée par le renseignement français, combien d’autres amassent un noir ressentiment envers la société jusqu’à l’étincelle fatale ?

Les services de renseignement nous avaient prévenus: les grands attentats collectifs de type 11-Septembre, Madrid 2004 ou Londres 2005 sont derrière nous. Restent les « loups solitaires », finalement pas si solitaires que cela, qui se forment dans les replis de la vie urbaine et se projettent à l’international avec une facilité déconcertante. Depuis 2007, selon Claude Moniquet (ESISC), Benladghem avait beaucoup voyagé sans qu’on lui connaisse de source de revenu légal: Royaume-Uni, Norvège, Italie, Suisse, Gaza, Égypte, Syrie…

Lorsque ce type d’homme atteint un certain niveau d’exaspération et de préparation technique, le pire est à craindre. Le programme a été gravé en eux par la propagande: tuer du mécréant, du juif, du policier. La Toile est remplie de ces exhortations formulées avec plus ou moins de prudence sémantique. C’est ce qu’on appelle le djihad personnel, le sixième pilier de la foi musulmane selon certaines interprétations salafistes remises au goût du jour par le Frère musulman égyptien Saïd Qotb ou l’ayatollah Khomeini. Pas étonnant que le parquet fédéral ait fait le rapprochement avec Mohamed Merah, le responsable des attentats de mars 2012, dans le Sud-Ouest de la France.

L’arsenal saisi à Anderlecht, au domicile du Franco-Algérien, était assez extraordinaire. Il lui aurait permis de vendre chèrement sa peau en cas d’assaut policier. Il reste maintenant à tracer tout ce matériel militaire, voir comment l’individu est entré en sa possession, avec quelles complicités, quel entrainement. D’où tenait-il son argent, le nerf de la guerre ? Braquages, collectes, financement étranger… Des sommes importantes peuvent être réunies et attribuées – par qui ?- aux futurs « martyrs » de la cause. L’homme ne vivait pas, avec sa compagne, dans une bulle sous vide, même si ses voisins retiennent l’homme baraqué et néanmoins gentil qui allait chercher des bonbons pour leur gamin à l’épicerie du coin.

Tout son entourage a déjà été passé au crible. La Direction centrale du renseignement intérieur français ainsi que la police judiciaire fédérale belge le surveillaient, la DCRI depuis 2008, et connaissaient sa dangerosité. C’est ainsi qu’il a pu être arrêté et tué, lors d’un contre-tir de défense, sur l’autoroute A8 (Lille-Tournai-Bruxelles), à la veille, semble-t-il, de commettre un acte grave. Lequel ? On en saura sans doute plus dans les prochains jours. Dans ce cas-ci, il faut se féliciter de la bonne coopération entre les services français, qui ont donné l’alerte, et les policiers belges qui ont tenu le suspect à l’oeil et sont intervenus sans provoquer de victimes collatérales, sous la responsabilité d’une équipe de magistrats.

Et après ? Le risque que se lèvent d’autres Hakim Benladghem n’est pas nul. Sa mort en « martyr » risque de donner des idées à quelques-uns, qui mettent leur délinquance au service de buts politico-religieux censés plus nobles. La pertinence de l’activité des services de police et de renseignement a été démontrée à suffisance. Reste à attendre de la société qu’elle développe suffisamment d’anticorps pour repérer, signaler et désamorcer le radicalisme et l’extrémisme en son sein avant qu’ils se transforment en terrorisme.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire