Johan Van Overtveldt, ministre des Finances © BELGA/Nicolas Maeterlinck

Taxe Caïman: « Trop facile pour le gouvernement de ne pas faire son travail »

Ecolo, PS et CDH réagissent aux recettes « faméliques » de la taxe Caïman sur les revenus des constructions fiscales à l’étranger. La preuve, selon Ecolo, que le gouvernement fédéral n’a pas fait son travail de bonne perception des recettes fiscales.

« Depuis le début, Ecolo a réclamé des mesures anti-abus beaucoup plus efficaces et a mis en doute le montant de recettes annoncé fièrement par le ministre des Finances. Cette préoccupation reste entière aujourd’hui face à des recettes faméliques », indique le député Georges Gilkinet (Ecolo) dans un communiqué.

La taxe Caïman, qui vise l’argent que des Belges ont logé dans des paradis fiscaux comme les îles du même nom, n’a rapporté l’an dernier que 5 millions d’euros, soit un centième à peine des 510 millions que le ministre des Finances Johan van Overtveldt avait inscrits au budget, selon un article paru dans Het Laatste Nieuws.

Le ministre n’y voit pas un mauvais résultat, car l’objectif de la taxe était selon lui de décourager les constructions offshore. Un objectif rencontré à ses yeux, et qui s’accompagne d’une augmentation des recettes fiscales belges, dit-il.

« Johan Van Overtveldt prétend que la faiblesse des recettes est liée à la réintégration de ces montants dans l’économie interne, grâce à un meilleur échange des informations au plan international. Mais il se montre incapable, comme toujours dans ses projections fiscales, d’en apporter la moindre preuve. Et en attendant, ce sont des milliards d’euros détenus par une minorité qui continuent d’échapper aux finances publiques, au détriment du plus grand nombre », critique M. Gilkinet.

Pour Ecolo, il est « trop facile de la part de ce gouvernement fédéral de ne pas faire son travail de bonne perception des recettes fiscales, de lutte contre la fraude et l’évasion fiscale des plus riches et d’exiger en même temps de l’entièreté de la population des efforts sous la forme de saut d’index, d’économies linéaires dans la sécurité sociale ou de reports d’investissement pourtant nécessaires à l’économie et à la mobilité de demain. »

La baudruche se dégonfle, ce n’est pas une surprise (PS)

Le chef de groupe PS à la Chambre Ahmed Laaouej n’est pas surpris par l’annonce selon laquelle la taxe Caïman sur l’évasion dans les paradis fiscaux n’a rapporté que 5 millions d’euros sur les 510 millions d’euros budgétisés. « La baudruche se dégonfle, ce n’est pas une surprise », a-t-il réagi.

« Depuis le début, nous ne cessons de dire au PS que les estimations ne sont basées sur rien, une analyse confortée par la Cour des comptes selon laquelle il est impossible de vérifier les estimations du gouvernement », a indiqué M. Laaouej. Selon lui, « les fanfaronnades du gouvernement Michel et du ministre des Finances Johan Van Overtveldt tombent aujourd’hui à plat ».

Le ministre N-VA a relativisé cette présentation de la situation en indiquant qu’elle était la preuve de l’efficacité de la taxe Caïman, les revenus évadés ayant été réintroduits dans le circuit au profit des caisses de l’Etat. « Qui peut encore croire de telles sornettes? « , se demande Ahmed Laaouej.

« A l’échec de la mesure s’ajoute la tartuferie budgétaire gouvernementale », ajoute le chef de groupe socialiste, les 5 millions d’euros encaissés sur 510 millions d’euros budgétisés n’ayant pas été contestés. « Il y a donc un trou supplémentaire d’un demi-milliard d’euros dans le budget. Cela explique probablement la volonté du gouvernement de reporter l’équilibre budgétaire », a-t-il analysé. « Ce gouvernement est dans la malfaçon budgétaire depuis le début de la législature. Concernant la gestion des finances publiques, c’est un zéro pointé », juge-t-il.

Enfin, Ahmed Laaouej estime « consternant » le silence de la ministre MR du Budget Sophie Wilmès sur la quasi-absence de rendement de la taxe Caïman.

« La confirmation tant redoutée » (cdH)

« C’est la confirmation tant redoutée. Tout ça pour ça. C’est pathétique, consternant », a réagi mardi le député Benoît Dispa (cdH) après qu’il est apparu que la taxe Caïman n’a rapporté en 2017 que 5 millions d’euros au lieu des 510 millions d’euros budgétisés.

« Avec le cdH, nous avons à plusieurs reprises dénoncé l’estimation des recettes par le gouvernement Michel, et le ministre des Finances Johan van Overtveldt en particulier. Nous sommes bien dans l’enfumage le plus complet. On comprend mieux pourquoi le gouvernement a annoncé le report du retour à l’équilibre », a-t-il commenté. « Ce budget est construit sur du sable. Nous aspirons à recevoir les chiffres de l’ajustement budgétaire, avec les tableaux, au parlement, de la part du ministre Van Overtveldt et de la ministre du Budget Sophie Wilmès, si elle n’est pas absente », a-t-il ajouté. « Nous pourrons examiner sur la base de ces données comment l’ajustement a été réalisé, en dépit du maigre rendement de 5 millions d’euros », a conclu le député cdH.

Pas de raison d’imaginer un nouvel impôt, selon Van Overtveldt

Le faible rendement de la taxe Caïman ne creusera pas un trou dans le budget, a assuré le ministre des Finances, Johan Van Overtveldt, à la suite des informations sur le produit de cet impôt en 2017.

L’an passé, la taxe « Caïman » qui s’applique aux constructions juridiques à l’étranger n’a rapporté que 5 millions d’euros au lieu des 510 millions prévus.

« Cet argent n’a pas disparu mais est entré dans l’économie régulière, ce que nous constatons dans les rendements supplémentaires de l’impôt des personnes physiques et de l’impôt des sociétés », a affirmé le ministre. « Il n’y a donc aucune raison d’imaginer un nouvel impôt ».

Dans l’opposition, les socialistes et les écologistes ont fustigé l’attitude du ministre et réclamé d’autres mesures pour lutter contre l’utilisation de montages juridiques complexes permettant d’éluder l’impôt. Ils ont également rappelé les remarques récurrentes de la Cour des comptes sur l’impossibilité d’évaluer le produit de la taxe.

M. Van Overtveldt souligne de son côté que le but de cette taxe est de mettre fin à ces montages juridique. Or, selon lui, ceux-ci sont en nette diminution. Déterminer ce que les caisse de l’Etat y ont gagné est, d’après lui, impossible.

« Les recettes fiscales suivent la trajectoire prévue. Affirmer que nous devrions assainir en raison de recettes insuffisantes est un mensonge », a-t-il ajouté.

La taxe Caïman a déjà fait l’objet de modifications pour éviter qu’elle ne soit éludée. D’après M. Van Overtveldt, les « portes dérobées » ont été fermées.

Il n’y pas de trou budgétaire de 500 millions d’euros, selon Sophie Wilmès

La ministre du Budget, Sophie Wilmès, a démenti mardi l’existence d’un « trou » de 500 millions d’euros dans le budget en raison d’un rendement moindre que prévu de la taxe Caïman. Selon elle, c’est même « techniquement impossible ».

Le rendement de la taxe est en fait réparti entre plusieurs postes: impôt des personnes morales, précompte mobilier, impôt des personnes physiques, a expliqué la ministre. Il « fait bien partie des excellents chiffres budgétaires de l’année, avec des recettes fiscales en hausse et un déficit historiquement bas », a-t-elle ajouté.

En 2018, le dispositif de la taxe a été élargie pour rapporter 50 millions d’euros en plus. Le risque d’un rendement moindre porte donc sur cette somme, a fait remarquer la ministre avant de se demander si l’opposition ne cherchait pas à « faire le buzz en manipulant les informations ».

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