Accident en chaîne sur l'E40 à hauteur de Tronchiennes en octobre 2017. © Belga

Sécurité routière: la Belgique à la traine par rapport à ses voisins

Le nombre de victimes de la route baisse chaque année, mais les chiffres restent déplorables par rapport aux pays voisins. C’est intolérable.

« Non, l’insécurité routière ne fait pas partie de la vie », déclarait l’économiste Geert Noels après le décès d’une mère, de sa fille et de deux petits-enfants lors d’un accident sur la E34/N49 entre Anvers et Knokke, à hauteur de Maldegem. Un camion avait embouti plusieurs voitures qui attendaient à un feu rouge. Le même jour, un motard est mort, embouti par une camionnette à Hoeilaart, et à Zedelgem un cycliste a fait une chute mortelle. Sur la N58 à Wervik, un automobiliste s’est écarté de la route : il a foncé dans un camion et est décédé sur place. Parfois, la loi des séries « normaliserait » presque d’avoir des morts sur la route.

Le mois dernier, le bureau de statistique Statbel a publié des tableaux détaillés des accidents de la route en 2017, au niveau communal. L’année passée, il y a eu 38 020 accidents de la route et ils ont fait 49 066 victimes, dont 44 694 blessés légers, 3757 blessés graves et 615 personnes décédées dans les trente jours après l’accident. Comparé à 2016, c’est une baisse sur tous les plans : 5% d’accidents en moins, 6% de victimes en moins, 5% de blessés légers en moins, 8% de blessés graves en moins et 8% de décès en moins. À plus long terme, la baisse est encore plus impressionnante. En douze ans, ce nombre de victimes mortelles s’est pratiquement réduit de moitié, parce qu’il y avait encore 1131 décès en 2005.

Pourtant, on ne peut se contenter de cette diminution constante du nombre d’accidents de la route et de victimes. Comparés à nos pays voisins, nos résultats sont franchement déplorables. En Belgique, le nombre de morts dans la circulation par million d’habitants est plus élevé que chez nos voisins, et plus élevé aussi que la moyenne européenne. En 2017, il y avait dans notre pays 55 victimes mortelles par million d’habitants – autant qu’en Italie. La moyenne européenne est de 50. En France, il y en avait 53, en Allemagne, 38, aux Pays-Bas 36. Et on peut encore la baisser, car l’année passée, le Royaume-Uni et la Suisse comptaient 27 morts par million d’habitants, la Suisse 25 et la Norvège seulement 20. Dans ces pays, il y a plus de 50% de victimes mortelles en moins que chez nous.

Un pays prospère comme la Belgique devrait pouvoir descendre nettement sous la moyenne européenne. On devrait pouvoir faire aussi bien que les Pays-Bas et l’Allemagne. C’est également l’avis de Noels : « On ne peut jamais éviter les victimes de la route. Mais si on atteint le niveau néerlandais, on sauve 250 vies humaines par an. C’est l’équivalent d’un avion qui se crashe », déclare-t-il au quotidien De Tijd.

D’après l’Institut Vias, l’ancien Institut belge de la Sécurité routière, les quatre plus grandes causes de décès dans la circulation sont toujours la vitesse, l’alcool, la distraction (généralement à cause du GSM) et l’absence de ceinture. Il s’agit donc surtout du comportement des conducteurs, qui dans 90% des cas est en cause lors d’un accident. Il faut donc changer ce comportement, et les campagnes de sensibilisation insistent sur ce point. Qui ignore encore qu’il n’y a rien de plus dangereux que d’envoyer un sms au volant ? Pourtant, cela arrive encore souvent. Il en faut donc davantage. Pour résister à ces tentations qui peuvent s’avérer mortelles, il faut manifestement plus de contrôles et de répressions. Car oui cela fonctionne. Regardez la vitesse excessive : dans à peu près un tiers des accidents de la route, à l’issue mortelle, elle joue un rôle, et les études révèlent que les tronçons où sont placés des radars le nombre d’accidents graves est réduit de moitié.

L’infrastructure joue également un rôle important dans le chiffre élevé de tués sur la route. L’aménagement du territoire est historiquement confus et désordonné en Belgique et nous payons cela au prix fort. Camions et poids-lourds sont parfois obligés de passer par les villages. Les pistes cyclables se terminent souvent de manière abrupte. Ces dernières semaines, les routes n’ont pas toujours été bien entretenues parce que c’était une manière facile de réaliser des économies. Nos gouvernements portent une grosse part de responsabilité, et l’usager doit redoubler d’attention.

Réduire le nombre d’accidents de la route et les décès qui leur sont liés afin d’arriver au niveau des Pays-Bas et de l’Allemagne doit être une priorité, pour chacun de nous et pour nos gouvernements. Nous ne pouvons plus tolérer qu’il y a 50% de décès de plus sur nos routes par rapport à nos deux pays voisins. C’est beaucoup plus important qu’un budget en équilibre et certainement plus aussi qu’un arrangement pour les coopérants Arco ou que de bannir les chaudières au mazout. C’est purement une question de volonté.

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