Thierry Fiorilli

Reynders, Vande Lanotte, symboles de la surdité du système politique belge

Thierry Fiorilli Journaliste

Bart De Wever l’a évoqué. Alain Destexhe et Mischaël Modrikamen l’ont fait. Le cdH a choisi l’opposition à tous les niveaux de pouvoir. Le 26 mai, trois écuries politiques ont gagné des élections. Le Vlaams Belang, Ecolo/Groen et le PTB/PVDA. Toutes les autres, défaites. Mais hors Destexhe (Listes du même nom) et Modrikamen (PP), et hors Olivier Maingain (DéFI), qui n’a pas attendu le scrutin pour faire savoir qu’il passerait la main, quel que soit le résultat, personne n’a démissionné

En 2019, en Belgique, en règle générale, quand on est président de parti, on reste même après la défaite. Même après un vote antisystème. Même après un appel massif au renouvellement des cadres, des pratiques et des priorités. Une exigence plutôt qu’un appel, à vrai dire.

De la même façon, en Belgique, en 2019, après ces signaux, très clairs, la première décision prise par le Palais, c’est de désigner deux informateurs. Deux hauts dignitaires de formations qui ont été sanctionnées trois jours plus tôt, l’un ayant fait partie de tous les gouvernements depuis vingt ans (et siégeant comme député fédéral depuis 1992), l’autre ayant été ministre en 1994 (et étant entré au Parlement il y a vingt-huit ans). On a entendu des observateurs politiques expliquer que c’était pour gagner du temps, que c’est parce que tant Didier Reynders – par ailleurs toujours ministre des Affaires étrangères, des Affaires européennes, de la Défense, chargé de Beliris et des Institutions culturelles fédérales d’un exécutif en affaires courantes) – que Johan Vande Lanotte sont respectés par tous les interlocuteurs indispensables (du Nord comme du Sud) des futures négociations. Un éminent confrère a quand même confessé qu’il était surpris : lui, il aurait plutôt désigné Herman Van Rompuy. secrétaire d’Etat déjà en 1988. Le Premier ministre était alors Wilfried Martens, pour la huitième fois. Le roi, c’était Baudouin.

Ce n’est pas qu’il faut considérer que, passé un certain âge, on a atteint une date de péremption, ou qu’il n’y a désormais rien de plus recommandable que la chair fraîche, partout et pour tout, mais en matière de  » message bien reçu, cinq sur cinq, on vous a compris « , il y avait plus clair. Parce que, pour un peu, encore vivants, Jean-Luc Dehaene et Philippe Moureaux auraient pu être sollicités. Mais donc, il faut bien constater que les succès électoraux du Vlaams Belang, du PTB et d’Ecolo ont débouché sur l’envoi au front, en première ligne, de bons vieux sherpas. Issus de bonnes vieilles brigades. Spécialistes de bonnes vieilles méthodes. Emblèmes du bon vieux système que le scrutin, trois jours avant leur nomination, avait remis en cause avec émoi et fracas.

Les avertissements ont décidément du mal à être perçus, en haut lieu, chez nous. Pas une femme désignée pour débroussailler. Pas un jeune pour faire équipe avec un vétéran. Pas un symbole des enjeux climatiques pour épauler une figure des enjeux socio-économiques. Mais Reynders et Vande Lanotte. Avant de passer le relais pour former un gouvernement à De Wever ou Di Rupo. Qui ont déclaré depuis des mois leur objectif de diriger les niveaux fédéral et régional.

A poursuivre sur cette voie-là, les urnes même pas toutes retournées dans leurs caves, le verdict des prochaines élections, anticipées ou dans cinq ans, ne fait déjà pas un pli. Encore plus d’extrême droite d’un côté, encore plus d’extrême gauche de l’autre. Et ce sera évidemment la faute aux réseaux sociaux.

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