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Reynders : « Le MR peut faire la différence : au fédéral »

Didier Reynders ne cherche plus à se voiler la face : les libéraux peinent à passer la rampe en Wallonie et à Bruxelles lorsqu’ils se soumettent au verdict des urnes à l’échelle d’une région. Interview.

Le MR reste en petite forme, à en croire les sondages. Il peine à surmonter le revers électoral de juin 2009. Le parti souffre-t-il toujours de votre image, notamment véhiculée par la crise financière ?

Didier Reynders : Cela montre avant tout le problème de l’immédiateté en politique. Je comprends qu’en période de crise, dire aux gens : « on ne touchera à rien, on sera votre rempart », est un message facile à faire passer. Soit dit en passant, si les Grecs font ça, ils sont en faillite. Et en cas de faillite, ce n’est pas l’armateur mais le chômeur grec qui paiera la note. Ce que le gouvernement grec, socialiste, comprend manifestement en prenant des mesures et en osant dire que ce se sera difficile. Mais soit. Il a effectivement fallu porter cette crise financière, il faut du temps pour les gens se posent la question : quels sont les résultats objectifs de cette gestion de la crise ? Présenter des projets à moyen terme, assumer des responsabilités fortes, est toujours délicat. Mais on ne peut pas empêcher des slogans de passer.

Vous êtes LE problème du MR ?

Ces sondages me laissent très serein. En Wallonie, nous sommes au niveau du CD&V en Flandre. Mais le vrai enjeu est ailleurs ; il faut aller vers des élections régionales et fédérales à nouveau jumelées, de préférence en 2014. Depuis 1995, nous gagnons tous les scrutins fédéraux : 1999, 2003, 2007.A l’inverse des élections régionales distinctes : de moins bons résultats au scrutin de 2004 qu’en 2003, ainsi qu’en 2009 par rapport à 2007.

Vous en déduisez quoi ?

Que le MR a des personnalités et un programme de parti qui correspond mieux au niveau fédéral : la matière internationale, sécurité et justice, socio-économique. Jean Gol a incarné ces thèmes, Louis Michel a un profil international. Mais quand on parle état des routes, logement, une grande confusion s’installe parmi les gens, qui ne distinguent pas les différents projets politiques.

N’est-ce pas avouer votre échec à être un vrai parti de proximité, en phase avec les besoins des gens ?

Non, nous avons de fortes personnalités au niveau local, nous y détenons des majorités absolues. Nous avons joué le jeu au scrutin régional de 2009 en mettant en première ligne des candidats régionaux alors que les ministres fédéraux se présentaient comme derniers suppléants.

« Le MR ne passe pas la rampe quand les débats sont flous. Ses personnalités et son programme correspondent mieux au niveau fédéral »

C’était peut-être une erreur. Je constate que nous n’arrivons pas à passer la rampe de manière satisfaisante quand les débats sont flous. C’est le cas à ce niveau de pouvoir intermédiaire qu’est le régional. Quand le MR dit qu’on remplacera un fonctionnaire sur trois à la Région wallonne, on crie « au bain de sang social! » Et c’est précisément ce que fait l’actuel gouvernement wallon (NDLR : PS-Ecolo-CDH)

Travaux publics, enseignement, environnement : ce n’est pas rien tout de même comme matières régionales ! Et elles sont tout sauf floues.

Sans doute. Mais lors des débats électoraux du dernier scrutin régional, j’avais un président de parti qui parlait de la crise financière libérale, un autre qui voulait sauver la planète et une troisième qui voulait qu’on fasse de l’humanisme. Moi, je voulais parler du décret-inscriptions ou de l’état des routes et on me disait : ce n’est pas le sujet. Autant donc refaire un seul débat à l’occasion d’élections à nouveaux jumelées. Comme le souhaite d’ailleurs Jean-Luc Dehaene. Regardez encore ce qui s’est produit en France : on n’a fait que de parler de Sarkozy lors des dernières élections régionales.

Le MR se sentira plus fort pour affronter les enjeux au niveau fédéral ?

Le débat idéologique porte essentiellement sur des thèmes fédéraux et internationaux. C’est là que peut se faire la différence entre formations politiques, sur la base de thèmes forts : la fiscalité, l’emploi, la sécurité. On pourra débattre de l’état des routes, mais aussi des orientations politiques.

P.HX

COMMENTAIRE

Où Didier Reynders est, le MR gagne…

Didier Reynders ne cherche plus à se voiler la face : les libéraux peinent à passer la rampe en Wallonie et à Bruxelles lorsqu’ils se soumettent au verdict des urnes à l’échelle d’une région. Supprimons le problème pour le résoudre, suggère dès lors le président du MR, contesté en interne pour cette raison. Non pas tant en repositionnant le parti sur des enjeux régionaux que Didier Reynders décrète comme « trop flous ou confus » à son goût. Mais plutôt en bottant en touche les scrutins régionaux pour les fondre à nouveau dans les élections fédérales. A un niveau de pouvoir où, croit le ministre des Finances, le MR peut espérer damer le pion à ses adversaires francophones, socialistes en tête. En leur opposant un argument de poids : sa propre personne. Pas sûr que les barons wallons ou bruxellois du MR apprécieront la piètre estime dans lequel leur président tient, peut-être involontairement, leur action régionale… décidément « confuse et floue. » Quelle leçon ! P.HX

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