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Réparer est plus rentable qu’acheter un appareil neuf

Muriel Lefevre

En moyenne, une famille possède une centaine d’appareils électriques en tout genre. Cela coûte cher, tant dans le portefeuille des ménages que pour la planète. De quoi y réfléchir à deux fois avant de remplacer trop rapidement un appareil.

Quand un appareil vous lâche, vaut-il mieux le réparer ou le remplacer ? Vito, l’organisation flamande de recherche pour les technologies et le développement durables a étudié, avec la KU Leuven, le scénario le plus économique sur la base du coût d’un cycle de vie d’un appareil.

Pour ce faire, ils ont testé un aspirateur ordinaire, un aspirateur sans fil et une machine à laver. Les chercheurs ont également tenu compte de l’option « garantie supplémentaire », par laquelle la garantie est prolongée, à condition qu’un montant supplémentaire soit versé.

Le coût du cycle de vie d’un appareil est calculé en combinant les différents coûts liés à l’appareil tel que le prix d’achat, la garantie supplémentaire, les coûts de maintenance, les coûts de réparation, ce que cela coûte de s’en débarrasser, mais aussi l’investissement que représente l’achat d’un appareil de remplacement. À titre d’exemple, selon l’étude reprise dans le Standaard, pour une machine à laver cela s’élève à 36 euros par an si vous remplacez l’appareil sans réparation. Pour un aspirateur sans fil, c’est 23 euros et pour un aspirateur normal c’est 22 euros.

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Pour les aspirateurs et les machines à laver, la meilleure option s’impose de façon limpide : il vaut mieux réparer que remplacer. On ne considère un remplacement de ces appareils que s’ils arrivent en fin de vie soit 12,5 ans pour une machine à laver, et de cinq à neuf ans pour un aspirateur. On rajoutera encore cette astuce: « si le prix des réparations est inférieur à 40% de la valeur résiduelle de l’appareil, la réparation en vaudra la peine. Cette valeur est calculée en tenant compte de la garantie et de l’amortissement de l’appareil. »

L’étude stipule également que payer un supplément pour une période de garantie plus longue est dans la plupart des cas inutile. Les entreprises réussissent en effet à maintenir la proportion de produits retournés à moins de 3 % pendant la période de garantie. Ce qui fait qu’il y a peu de chance de voir les défauts apparaître endéans les deux à quatre premières années (ce qui correspond à la période de garantie prolongée). Surtout pour les produits qui ont une durée de vie longue comme les machines à laver. Cette garantie prolongée est donc la plupart du temps superflue ou alors n’offre qu’un très faible bénéfice pour les appareils qui ont une durée de vie plus courte. On estime, par exemple, que pour un aspirateur, pour lequel on a dû faire des réparations hors garantie, cela permet d’économiser un euro par an.

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Le rapport glisse aussi quelques conseils aux fabricants pour allonger de la durée de vie de leurs équipements. Par exemple, s’ils vissaient les pièces ensemble au lieu de les coller cela rendrait de nombreux appareils plus faciles à réparer. On notera aussi l’importance de l’existence ou non de pièces de rechange. Informer le consommateur sur les conditions d’utilisation optimale serait aussi très utile sachant que la durée de vie des certains produits peut être limitée par les conditions d’utilisation. Tout comme l’inciter à réaliser un entretien régulier de l’appareil ou encore l’aider à identifier et réparer les petites pannes pourrait aussi prolonger la durée de vie de ses appareils.

Les appareils qui ont une durée de vie particulièrement réduite sont les smartphones, les téléviseurs, les machines à laver, les imprimantes et les ordinateurs.

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Réparer plutôt que jeter, une utopie ?

Selon l’eurobaromètre, 77% des Européens préfèrent réparer un produit plutôt que d’en acheter un nouveau. Seulement cette préférence ne se retrouve pas forcément dans les faits puisque ces produits sont encore trop souvent jetés ou ramenés dans un centre de collecte à cause de coûts de réparation trop élevés.

On estime, qu’en moyenne, le consommateur décide de ne pas réparer un produit en panne lorsque le prix d’achat est inférieur à 70 EUR ou lorsque le coût de réparation représente 40% du prix initial.

Actuellement, on estime que, rien que pour la Belgique, les déchets électroniques représentent annuellement 111.000 tonnes, soit environ 10 kg/habitant.

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Les quantités de déchets de gros électroménager ménager représentent 38% des quantités totales collectées. Les quantités d’écrans et de moniteurs collectées sont en diminution. 17 143 tonnes ont été collectées en 2015 (soit 15% des quantités collectées par Recupel) contre 23 040 tonnes en 2010 (soit 22% de la quantité totale). Cette diminution peut être en partie expliquée par l’apparition de téléviseurs équipés d’un écran plat. La fraction correspondant aux autres produits ménagers (GSM, Ordinateur, outils) augmente chaque année et représentait 42% des tonnages de déchets d’équipements électriques et électroniques collectés en 2015.

La Commission européenne évalue qu’une série de mesures fortes en faveur de la réparation générerait à elle seule 1300 emplois dans le secteur de la réparation en Belgique. Il y aurait aussi 450 pertes d’emplois dans d’autres secteurs comme la production et la distribution. Tous secteurs confondus, cela représenterait 850 emplois supplémentaires précise RDC environnement dans son rapport datant de 2017.

Repair Café

Le Repair Café est un service gratuit et accessible à tous (même si les dons sont acceptés). Des réparateurs bénévoles sont présents pour réaliser de petites réparations tout en expliquant comment les réaliser soi-même. La philosophie des Repair Cafés est d’interpeller les citoyens sur le fait qu’un appareil défectueux ne doit plus nécessairement être jeté. On estime que 50% des appareils apportés au Repair Café sont réparés. Un Repair Café près de chez vous ? Lienwww.repaircafe.be

L’obsolescence programmée

Le terme apparaît pour la première fois en 1932 et on le doit à Bernard London, un promoteur immobilier américain. Il défend ce concept dans son livre Ending the Depression Through Planned Obsolescence (L’obsolescence planifiée. Pour en finir avec la grande dépression) pour stimuler et maintenir la consommation dans une économie alors au plus bas.

L’un des premiers exemples concrets d’obsolescence programmée est apparu au milieu des années 1920 avec les ampoules à incandescence. Alors qu’elles avaient une durée de vie naturelle de 2300 heures, voire, pour certaines, pratiquement infinie, les fabricants (qui sont rentrés dans l’histoire sous le nom de cartel de Phoebus), vont volontairement décider de réduire leur temps d’utilisation à 1.000 heures, et ce, afin d’augmenter leurs profits. Ils seront l’un des premiers cas de plainte collective pour obsolescence programmée qui sera recensée. Les deux autres cas concerneront les trois premières générations d’iPods d’Apple et les imprimantes HP inkjet. On notera tout de même qu’aucun ne sera condamné.

L’obsolescence programmée une définition : c’est un stratagème par lequel un bien voit sa durée normative sciemment réduite dès sa conception sans avantage pour le consommateur, limitant ainsi sa durée d’usage pour augmenter son taux de remplacement.

Un autre exemple de produit dont a volontairement réduit la durée de vie est les bas nylon. Lorsque Dupont de Nemours décide de remplacer la soie par du fil de Nylon, ce bas devient à ce point solide que cela plombe ses ventes. Un problème qui va être résolu en rendant leurs bas délibérément moins robustes.

Que faire si l’on suspecte une obsolescence programmée ?

En Belgique, une garantie de deux ans minimum est obligatoire pour toutes les ventes aux consommateurs. Après cette période, il est très difficile de déposer plainte, car la garantie ne s’applique plus. À moins de prouver qu’il y a un vice caché au moment de la fabrication ce qui demande de réaliser des expertises très couteuses. Ardues et longues, ces procédures refroidissent donc la plupart des plaignants. La seule solution réaliste est, aujourd’hui, d’intenter une procédure de réparation collective, à travers une association de consommateurs, en soutenant qu’il y a obsolescence et que c’est un acte contraire aux usages honnêtes envers le consommateur. Mais il n’est pas toujours facile d’apporter des preuves et les actions en réparation collective sont très encadrées en Belgique.

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