Bien desservi par le ring et par trois stations de métro, le stade Roi Baudouin ne manque pas d'atouts. © JEAN MARC QUINET/reporters

Rénover le stade Roi Baudouin passera par un plan de mobilité

Laurence Van Ruymbeke
Laurence Van Ruymbeke Journaliste au Vif

Une étude de l’ULB détaille les conditions dans lesquelles des événements sportifs de grande ampleur pourraient être organisés dans un stade Roi Baudouin remis à neuf sans paralyser le trafic. Ce n’est pas impossible, mais il faut se retrousser les manches.

En matière de mobilité, organiser de grands événements dans un stade Roi Baudouin dont la capacité serait portée à 60 000 places ne serait possible qu’à certaines conditions : réduire au maximum l’utilisation de la voiture pour s’y rendre, favoriser le recours aux cars et transports publics et étaler les flux de spectateurs dans le temps. Voilà la conclusion d’une étude, réalisée en 2008 par l’Igeat (Institut de gestion de l’environnement et d’aménagement du territoire de l’ULB), à la demande de l’asbl Beltomundial. Celle-ci, pilotée par Alain Courtois, oeuvrait à l’époque à la candidature commune de la Belgique et des Pays-Bas pour la Coupe du monde de football de 2018, finalement attribuée en 2010 à la Russie.  » On peut raisonnablement penser que laconclusion de ce travail demeure valide, assure aujourd’hui Frédéric Dobruszkes, spécialiste en géographie des transports à l’Igeat. Et si les arrivées et départs des spectateurs n’ont pas lieu aux heures de pointe, c’est encore mieux.  »

En 2008, cette  » étude de mobilité relative à l’hypothèse d’un nouveau stade sur le site du stade Roi Baudouin  » n’a été présentée qu’aux responsables de Beltomundial, l’asbl créée en 2007 pour porter la candidature belgo-néerlandaise. Interrogé par Le Vif/L’Express, Alain Courtois, administrateur de Beltomundial et actuel échevin des sports (MR) à la Ville de Bruxelles, qui s’est battu pour obtenir la construction d’une nouvelle infrastructure sur le parking C du Heysel, en vue de l’Euro 2020, assure  » n’en avoir aucun souvenir « .

Dans leur travail, les chercheurs de l’Igeat ne se prononcent pas sur d’autres sites éventuels ni même sur l’intérêt d’un projet de stade agrandi sur le plateau du Heysel. Ils analysent uniquement la question de la mobilité autour du stade Roi Baudouin dans l’hypothèse où il serait reconstruit au même endroit, mais avec une capacité de 60 000 places, au lieu d’environ 47 000 places actuellement.

Trois scénarios étudiés

Le stade Roi Baudouin ne manque pas d’atouts, souligne l’étude : il est bien desservi par le ring et par trois stations de métro, ce qui permet de séparer aisément les supporters des deux camps. Quelque 15 000 places de parking y sont recensées. Il ne bénéficie pas d’une desserte ferroviaire directe mais des trains spéciaux pourraient circuler jusqu’à la station de métro Bockstael.

Les chercheurs ont analysé les conséquences, en matière de mobilité, de la finale de la Coupe de Belgique de football, le 18 mai 2008, et du concert de Bon Jovi, le 14 juin de la même année, qui avait attiré plus de 30 000 spectateurs. Dans les deux cas, les déplacements de 14 000 spectateurs, à pied, à vélo, en transports en commun, en voiture, ou en autocar, avant et après l’événement, ont été passés au peigne fin. Les résultats obtenus ont ensuite été extrapolés à 60 000 personnes.

Et si les arrivées et départs des spectateurs n’ont pas lieu aux heures de pointe, c’est encore mieux

Trois scénarios ont été étudiés. Dans le premier, 39,2 % des spectateurs se rendent au stade en voiture, 44,6 % en car, 13 % en transports en commun et 2,2 % utilisent un autre mode de déplacement (à pied, à vélo…). Un scénario illusoire, conclut l’étude.  » Les problèmes de congestion du trafic ne pourraient qu’être aggravés, notamment du fait du nombre de cars attendus. Mais le trafic automobile supplémentaire serait acceptable.  »

Dans le deuxième scénario, 73,7 % des spectateurs se rendraient au match en voiture, contre 10 % en car, 13 % en transports en commun et 3,3 % opteraient pour un autre mode de déplacement. Un recours si faible aux transports collectifs et une utilisation aussi massive de la voiture  » entraîneraient très vraisemblablement un chaos autour du stade « , estiment les auteurs. Ce scénario est donc condamné.

Le troisième scénario table sur 36,2 % de spectateurs utilisant les transports publics, 6,7 %, le car 56,1 %, la voiture et 1 % un autre mode de déplacement. Dans ce cas, la congestion serait très élevée si les flux étaient concentrés sur une période réduite et la capacité du métro, juste suffisante si l’évacuation doit s’opérer en une heure.  » Il serait utile, dans ce scénario, de mettre en oeuvre des dispositifs étalant dans le temps, au-delà d’une heure, le retour des spectateurs en métro « , suggèrent les auteurs.

La formule gagnante

L’Igeat recommande dès lors d’acheminer un maximum de spectateurs en autocar ou en métro et train, ce qui implique une forte coopération avec les fédérations de football ou équipes tant belges qu’étrangères qui pourraient jouer au stade Roi Baudouin. En cas de compétition internationale, des trains spéciaux devraient être affrétés. Des packages incluant le transport par train, une ou plusieurs nuits d’hôtel et un pass métro sont aussi suggérés. Les déplacements en car doivent d’autant plus être encouragés que les transports en commun ne peuvent absorber à eux seuls suffisamment de passagers pour comprimer le taux d’utilisation de la voiture particulière. Or, si une part prépondérante de spectateurs arrive en voiture, à l’heure de pointe, on assistera très probablement à une congestion généralisée du trafic. Bon à savoir, à l’heure où la saga des stades n’a pas encore connu son épilogue.

Aujourd’hui, le projet de construction d’une nouvelle enceinte sur le parking C de Grimbergen semble enterré, après la décision de l’Union européenne de football (UEFA), fin d’année dernière, de ne pas attribuer de matchs de l’Euro 2020 à Bruxelles. Du coup, l’entreprise de construction Besix propose à la Ville de Bruxelles de rénover le stade Roi Baudouin : 50 000 places, conservation de la piste d’athlétisme, 200 millions d’euros financés à 100 % par l’entreprise, qui reprendrait l’exploitation des lieux à Bruxelles-Ville. Selon Besix, ce serait tout à fait  » compatible  » avec le projet Neo, la construction d’un quartier sur le site du Heysel : 590 logements, deux crèches, une séniorie, des bureaux, 72 000 m2 d’espace commercial, Mini Europe rénové : l’étude de l’Igeat ne tenait pas compte de ce scénario…

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