Christine Laurent

Régime minceur

Christine Laurent Rédactrice en chef du Vif/L'Express

La lune ? La N-VA l’avait promise. Pas de chance, la Flandre n’en veut pas. Une plus large autonomie ? Oui. Etre maître chez soi ? Sûrement. Mais l’indépendance totale, larguer complètement les amarres qui la relient à la sacro-sainte Belgique, même vacillante, pas question ! Seuls 30 % des Flamands, toutes tendances confondues, seraient tentés par l’aventure, selon les derniers sondages. Voilà le fonds de commerce du parti nationaliste bien mal en point. Le lion ne rugit plus. Le fantasme de Bart de Wever ne hante plus que ses nuits. Coupé net le bel élan pour faire éclater le pays. Courbe rentrante, donc. Le Grand Soir n’est pas pour demain.

L’heure est à l’auto-bâillonnement sans complexe. Régime minceur. Pour continuer à faire sa pelote, la N-VA doit ratisser encore plus large, notamment sur le plan socio-économique. En flirtant ouvertement avec le Vlaams Belang, tout en flattant les classes moyennes et populaires. Une tactique à géométrie variable pour engranger un maximum de suffrages dans la perspective du 14 octobre. Un cap névralgique. Une première étape cruciale, en effet, dans la conquête programmée pour les législatives et les régionales de 2014. Objectif : récolter un maximum de sièges pour rendre impossible un gouvernement sans le parti nationaliste. La voie royale vers un « vrai » confédéralisme auquel il aspire de toute son âme.

A court terme, il s’agit donc, pour le parti de De Wever, de s’incruster dans un maximum de communes et plus particulièrement les cinq agglomérations incontournables : Gand, Louvain, Hasselt, Bruges, sans oublier Anvers, le nerf de la guerre, la ville emblématique sur laquelle rêve de régner le Grand Timonier. Pour réussir, le candidat « attrape-tout » a mis une sourdine à son esprit séparatiste belliqueux, rentre-dedans, il ne faut surtout pas effaroucher 70 % des électeurs. En catimini, ou presque, son parti laboure depuis des mois le terreau communal, multiplie les sections locales pour mieux tisser sa toile. La proximité, rien que la proximité. Bien vu, quand on sait qu’aux yeux d’un nombre croissant de citoyens particulièrement inquiets, les politiciens s’agitent sur une tout autre planète, bien loin de leurs préoccupations quotidiennes. Une stratégie qui a profité jusqu’ici tant au PS en Wallonie qu’au CD&V en Flandre. Le CD&V ! La cible prioritaire de la N-VA, comme nous le confirme, cette semaine, l’un de ses ténors, Jan Jambon. Un CD&V fragilisé, certes, qui peine à retrouver un énième souffle, et qui, de plus, a le mauvais goût, aux yeux de De Wever et consorts, d’appartenir à Di Rupo Ier. Un gouvernement « honni ». N’impose-t-il pas, avec la complicité des partis du Nord, ses ennemis déclarés, des mesures budgétaires qui plombent prioritairement les Flamands, si l’on en croit Jambon ?

PS enkysté dans le passé, CD&V traître à la Flandre : sur ces thèmes de prédilection, la N-VA flingue en revanche toujours à tout-va. C’est bon pour le business électoral, surtout si on teinte le tout d’un zeste de martyrologie. Les électeurs seront-ils séduits ? Vont-ils à nouveau plébisciter celui qui trépigne d’impatience de s’imposer sans partage ? Ou bien, rattrapés par la loi de Newton qui sévit aussi en politique, De Wever et son parti vont-ils se crasher au sol ? Réponse dans sept semaines.

Christine Laurent

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