Louis Ide

Reconnaissance de l’homéopathie: Onkelinx respecte-t-elle un code déontologique?

Louis Ide Louis Ide est sénateur N-VA et médecin.

« Un politicien a le devoir sacré d’agir correctement » estime le sénateur de la N-VA Louis Ide. Comme la ministre de la Santé publique Laurette Onkelinx reconnaît l’homéopathie, Ide se demande si Onkelinx respecte un code déontologique.

Le vendredi 12 juillet 2013, le conseil des ministres a décidé de reconnaître l’homéopathie en Belgique, soi-disant pour protéger les patients contre les abus d’escrocs et de charlatans. Seuls les médecins, les dentistes et les sages-femmes auront le droit de pratiquer l’homéopathie. Et, il y aura des mesures transitoires « à la belge » pour les personnes exclues. Le conseil des ministres sape donc sa propre législation.

Cette reconnaissance clarifie douloureusement les priorités de la ministre Laurette Onkelinx (PS). Elle préfère réguler une pratique qui n’a aucune plus-value pour le patient plutôt que de réglementer la psychologie clinique et sa prolifération de thérapeutes en tout genre… En attendant, la Flandre détient le triste record de suicides dans le monde occidental…

Laurette Onkelinx aime mieux attribuer le titre complémentaire d’homéopathe plutôt que de reconnaître les gastro-entéro-oncologues et les titres professionnels d’infirmier. Pourtant, de telles décisions qui amélioreraient sensiblement la qualité de nos soins de santé ne figurent pas parmi les priorités de la ministre.

Ces décisions sont nécessaires, car de telles reconnaissances font vraiment la différence, ce qui ne sera pas le cas de l’homéopathie.

Tout le monde pourra toujours acheter les produits homéopathiques en pharmacie sans prescription, ce qui maintient la possibilité d’un circuit parallèle. La reconnaissance de l’homéopathe n’y changera rien, ce que la ministre a d’ailleurs admis elle-même.

La reconnaissance de l’homéopathie risque de se vider de son contenu, car les homéopathes devront avoir suivi 600 heures de formation. Cependant, aucune université n’envisage de démarrer une formation en homéopathie pour la raison que celle-ci n’a pas été prouvée. Les adeptes continueront à pratiquer cette médecine alternative, et à se rendre auprès de personnes non qualifiées.

Pourtant, la lettre adressée par Madame Onkelinx à tous les doyens en médecine, aux deux plus grands syndicats de médecins, aux étudiants en médecine, etc. pour leur demander de ne pas répondre à la demande de reconnaissance était remarquable et presque historique.

Que se passera-t-il? Les homéopathes se serviront de la reconnaissance comme argument de l’efficacité de leur approche. La demande de remboursement augmentera, certainement maintenant que les mutuelles continuent à les rembourser de leur propre chef. Le tout pour une pratique incapable de démontrer la preuve de son efficacité.

Il n’y a qu’un seul critère: l’Evidence-Based Medicine

Pourtant, il n’y a qu’un seul critère: l’Evidence-Based Medicine (EBM). En d’autres termes : les derniers développements de la science (par le biais de bonnes études) prouvent-ils l’efficacité de quelque chose ou pas ? Et ce n’est pas seulement valable ici, mais dans tous les domaines de la médecine. Les développements récents en matière de dompéridone (Motilium, Touristil etc.) l’illustrent très bien. Certains éléments indiquent que ce médicament agit à peine et que son utilisation peut causer le décès du patient. Si ces soupçons se confirment, la ministre ne peut pas faire autrement que retirer la dompéridone du commerce.

Il faut adopter la même attitude à l’égard de l’homéopathie, l’ostéopathie et les autres techniques alternatives. Ainsi, il est prouvé scientifiquement que l’ostéopathie est efficace en cas de douleurs dans le bas du dos et dans le cou. Aussi il n’y a aucun problème à ce qu’un prestataire de soins traite ses patients de cette façon. Pour d’autres techniques telles que l’ostéopathie viscérale ou crânienne, qui manipule les intestins ou le crâne pour guérir les pneumonies ou les sinusites, il n’y a pas de preuves. Ces techniques-là n’ont donc pas de place dans nos soins de santé. Tout comme l’homéopathie n’a pas été prouvée jusqu’à aujourd’hui. Les effets placébo ne sont pas une preuve d’efficacité.

Les techniques efficaces ne sont pas des thérapies alternatives, elles font partie de la médecine. Si elle adoptait cette attitude pragmatique, la ministre ne devrait pas se prononcer sur qui peut s’attribuer le titre d’ostéopathe ou d’homéopathe et il ne faudrait pas de reconnaissance séparée. Et le patient sera protégé, car il sera soigné par un prestataire de soins reconnu dont les techniques sont prouvées.

1+1 = 2,5

Onkelinx n’a donc pas choisi la science. Et c’est particulièrement frustrant pour un scientifique. Actuellement, et alors que les fraudeurs scientifiques sont cloués au pilori à juste titre, certaines (alternatives) ne le sont pas. La ministre ne suit absolument pas les conseils du Centre d’Expertise. On ne peut pas, à la fois, ignorer les recommandations du Centre d’expertise et les adopter dans d’autres dossiers malgré les protestations des personnes concernées. Pour les scientifiques 1 + 1 = 2. Et il y a toujours des gens qui prétendent que 1 + 1 = 3. Pour l’instant, les scientifiques perdent de toute façon, car les partis politiques classiques cherchent un compromis: on est à 1 + 1 = 2,5.

Il va de soi que ces discussions n’avancent guère le patient. Je m’en rends parfaitement compte. Lorsque je travaillais en Afrique, je voyais que les gens se rendaient autant à l’hôpital que chez le magicien. C’est la liberté de chacun. Mais c’est le devoir sacré d’un politique d’agir correctement, et s’il le faut contre une partie de ses électeurs. Sans jeter à la pierre aux personnes en situation désespérée, qui de façon compréhensive, se réfugient dans tout et n’importe quoi , je continue, en tant que politique scientifique, à insister sur le devoir déontologique d’un politique. Onkelinx respecte-t-elle un code déontologique?

Louis Ide

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