Pascal De Sutter

Qui veut-on punir avec les grèves?

Pascal De Sutter Psychologue politique à l'UCL

Les syndicats affirment que leurs actions sont dirigées contre des mesures du gouvernement fédéral qui vont affecter la qualité de vie des travailleurs. Visiblement, l’équipe Michel ne bénéficie pas de l’état de grâce des nouveaux élus. Seulement 12 % des Wallons en ont une opinion favorable (1). Plus étonnant, cet exécutif à majorité nationaliste flamande n’obtient guère un meilleur résultat en Flandre : 26 %. Les dirigeants socialistes ne devraient pourtant pas pavoiser. La coalition PS-CDH qui pilote la Wallonie (et prend finalement des décisions politiques très similaires à celles du fédéral) n’obtient qu’un minuscule taux de 16 %.

Les syndicats affirment que leurs actions sont dirigées contre des mesures du gouvernement fédéral qui vont affecter la qualité de vie des travailleurs. Visiblement, l’équipe Michel ne bénéficie pas de l’état de grâce des nouveaux élus. Seulement 12 % des Wallons en ont une opinion favorable (1). Plus étonnant, cet exécutif à majorité nationaliste flamande n’obtient guère un meilleur résultat en Flandre : 26 %. Les dirigeants socialistes ne devraient pourtant pas pavoiser. La coalition PS-CDH qui pilote la Wallonie (et prend finalement des décisions politiques très similaires à celles du fédéral) n’obtient qu’un minuscule taux de 16 %.

Ces grèves sont donc certainement le signe d’un ras-le-bol généralisé. Tout le monde comprend que l’économie va mal et qu’il faut se serrer la ceinture. Mais rares sont ceux qui comprennent pourquoi les classes moyennes et les pauvres devraient être les seuls à le faire. Le précédent gouvernement avait fait une timide tentative pour plafonner les salaires mirobolants des grands patrons du secteur public. Un salaire de 290 000 euros brut par an, ce n’était quand même pas de la roupie de sansonnet. Non ? Or, aux yeux du ministre Alexander De Croo (Open VLD), il ne faut mettre aucune limite aux salaires des patrons payés avec l’argent des contribuables. Faut-il être complètement inconscient pour ne pas concevoir que ce sont de telles injustices qui font les révolutions ? Charles Michel semblait, lui, l’avoir pourtant envisagé quand il écrivait : « Il n’est pas acceptable moralement et éthiquement, qu’un patron d’une entreprise publique […] touche un salaire dix fois plus élevé que celui du Premier ministre. »

De nombreuses expériences ont prouvé que les travailleurs sont prêts à accepter des baisses de salaire et une augmentation de la charge de travail si l’effort est produit par TOUT le monde. Car sur le fond, nos dirigeants politiques n’ont pas tort de vouloir réduire les déficits de l’Etat et augmenter la compétitivité de nos entreprises. La grève générale contre un pouvoir politique (démocratiquement élu, rappelons-le) est-elle la seule solution ? Je crois que non. Elle ne fait que désagréger notre économie déjà vacillante. Cela revient à faire une saignée à un malade affaibli. Ce ne sont pas les grèves qui donneront envie aux entreprises de rester en Belgique et d’y créer des emplois. En pourrissant la vie des gens ordinaires par leurs grèves, les syndicats me font penser à ces émeutiers des banlieues américaines qui saccagent leurs propres quartiers, où pourtant ils vivent. Pourquoi ne pas bloquer juste l’accès des clubs de golf huppés des dirigeants, plutôt que les autoroutes empruntées par la population ? Pourquoi ne pas empêcher seulement le départ des jets privés des privilégiés plutôt qu’interdire l’accès à tout l’aéroport de Zaventem ? Pourquoi les grévistes ne feraient-ils pas circuler les trains, les bus, les trams, les métros en refusant de faire payer le ticket aux usagers et asséchant ainsi les rentrées de l’Etat ? Il existe mille manières de protester autres que celles qui font du tort à tout le monde.

De son côté, le gouvernement devrait aussi témoigner de plus d’inventivité. Au lieu de vouloir faire passer en force des mesures douloureuses ou les abandonner lâchement, il pourrait réunir de grandes assises économiques nationales. Y seraient invités non seulement les syndicats et délégués patronaux mais aussi des experts reconnus dans divers domaines. On inviterait aussi des chefs de micro-entreprises, des indépendants, des petits élus locaux et surtout différents représentants des oubliés et laissés-pour-compte de la société civile : des jeunes chômeurs, des handicapés, des retraités, etc. Ces gens auraient trois mois pour s’accorder sur un plan de réformes et d’actions concrètes à mettre en oeuvre par le gouvernement. Peut-être qu’alors, tout le monde se retrousserait les manches pour faire avancer notre pays et le sortir de la crise ? Mais rien ne vous oblige à penser comme moi…

(1) D’après le dernier baromètre politique La Libre Belgique/RTBF/Dedicated

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