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Qui peut encore arrêter la N-VA ?

Olivier Mouton
Olivier Mouton Journaliste

Tout annonce un score canon du parti nationaliste le 25 mai. En se posant comme la seule alternative face au PS, il cannibalise le centre-droit en Flandre. Que font et que peuvent faire les autres partis ?

Tous les sondages sont favorables à la N-VA et son discours à l’adresse de l’opinion publique nordiste est affûté comme une lame d’épée : « Nous sommes la seule alternative au modèle PS. » Cap donc sur une majorité de droite en Flandre et, par ricochet au fédéral ?

Pour réaliser son plan de conquête du pays, la N-VA n’a d’autre choix que de réaliser un score canon afin d’éviter une prolongation de l’actuelle tripartie flamande au fédéral. De Wever a fixé le seuil minimum à atteindre : 30 %. « Dès lors, un score de 28 % s’apparenterait psychologiquement à un échec et un score de 32% compterait à hauteur de 40% », analyse Carl Devos, politologue à l’université de Gand. « La N-VA doit être incontournable au parlement flamand si elle veut être assurée de participer au pouvoir, insiste Bart Maddens, politologue à la KUL et ouvertement proche du mouvement flamand. Si ce n’est pas le cas, il y aura une volonté des partis traditionnels de se coaliser contre elle. » L’improbable défi ne semble pas impossible si l’on en croit les derniers sondages : compte tenu du score du Vlaams Belang, qui se maintient autour des 10% en Flandre, et de la possible percée du PvdA (équivalent flamand du PTB) qui pourrait franchir le seuil d’éligibilité des 5%, on ne pourrait composer de majorité au nord sans la N-VA. « Dans ce cas, rappelle Bart Maddens, l’aile radicale du parti fera pression pour obtenir des avancées institutionnelles. Pour elle, ce sera maintenant ou jamais ! »

« Je ne dirais pas que la N-VA a déjà gagné l’élection, tempère Dave Sinardet, politologue à la VUB. La vraie campagne démarre seulement et il peut se passer énormément de choses en trois semaines. Personne n’est à l’abri d’une erreur ou d’un scandale. Et aujourd’hui, les électeurs sont plus volatils que jamais et ils se décident de plus en plus à la dernière minute. » L’un des points faibles de la N-VA, prolonge-t-il, c’est qu’elle pourrait être embarrassée par ses penchants indépendantistes, à peine camouflés par son congrès sur le confédéralisme, tenu en début d’année. « Je doute que la vraie priorité de De Wever soit de faire un gouvernement de centre-droit. Sa vraie nature reste celle d’un parti nationaliste : obtenir des avancées en vue d’une plus grande autonomie de la Flandre. Le premier point de ses statuts reste l’indépendance de la Flandre. Or, seule une minorité en Flandre y est favorable, entre 10 et 20 %. »

Kris Peeters, ministre-président flamand CD&V et candidat déclaré à sa propre succession, met, lui, en garde : « Les Flamands ne peuvent pas se permettre de mettre en place un gouvernement qui a d’abord besoin d’un an pour étudier la situation. Cela ruinerait la sixième réforme de l’Etat. Si l’on veut éviter le chaos ou l’incertitude, mieux vaut voter CD&V. »

Pendant ce temps, Bart De Wever n’est… candidat à rien. Il a annoncé urbi et orbi que le poste de Premier ministre fédéral ne l’intéressait pas. « Occuper le 16 semble impensable pour un nationaliste comme lui », analyse Carl Devos. Il laisserait donc la ministre-présidence flamande à un(e) fidèle parmi les fidèles. Même la présidence de la N-VA changera de main en mars 2015 : inéligible après trois mandats successifs, De Wever devrait céder la main à son second, Ben Weyts. Lui, il resterait « simple » bourgmestre d’Anvers.

« C’est un handicap pour la N-VA », conclut Dave Sinardet. Aurait-on imaginé Jules César lancer ses troupes à la conquête de nouveaux territoires pour se retirer, immédiatement sous sa tente ?

Le dossier dans Le Vif/L’Express de cette semaine

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