Herman Matthijs

Quels dangers court la coalition suédoise?

Herman Matthijs Professeur en Finances publiques

Avec les coalitions suédoises en cours de formation « la voie vers la septième réforme de l’état s’ouvre plus rapidement que prévu ».

La formation d’une coalition suédoise revêt un caractère historique. C’est la première fois que les trois partis de centre droit forment un gouvernement flamand ensemble. S’ils réussissent également au niveau fédéral, il s’agira donc d’un événement historique. Car hormis une brève période durant le gouvernement Tindemans, ce serait la première fois qu’on aurait un gouvernement fédéral sans majorité dans le groupe linguistique francophone. Légalement, il n’y a là aucun problème. De plus, depuis des années la Flandre vote à droite et la Belgique francophone à gauche.

La coalition suédoise

Les historiens auront du mal à comprendre pourquoi il n’y a pas eu de tripartite sur le plan fédéral, car cette possibilité existait certainement après les élections du 25 mai. Cependant, le PS a claqué la porte au MR dans les gouvernements bruxellois et wallon à une vitesse jamais vue, hypothéquant Di Rupo II. Le PS avait-il décidé depuis le début de prendre le pouvoir dans les régions et de laisser les 17 milliards d’euros d’assainissement budgétaire sur le plan fédéral aux autres?

De toute manière, la coalition suédoise dispose d’une large majorité dans le parlement flamand (89 sur 124) et à la Chambre (85 sur 150). Celle-ci lui donne une base légitime et démocratique.

Les dangers de la coalition suédoise

Cependant, tout gouvernement doit tenir compte des dangers qui le guettent. Pour commencer, il y a les éventuels problèmes internes. Ceux-ci seront plus visibles au niveau fédéral suite à l’énorme assainissement. Comparée à l’assainissement fédéral, la formation du gouvernement flamand était une partie de plaisir.
Le MR réussira un coup historique en termes de nombre d’excellences dans ce cabinet. En outre, la situation d’un contre tous en Belgique francophone ne présente pas nécessairement d’inconvénients électoraux/politiques pour le MR en vue de 2018/2019.

Le CD&V peut fournir le premier ministre et s’est vu attribuer des compétences flamandes très intéressantes. Le fait qu’il gouverne pour la première fois sans son parti frère francophone au niveau fédéral en dit long sur l’unité de cette famille. Cependant, les chrétiens-démocrates flamands seront le partenaire le plus à gauche de ces gouvernements fédéral et flamand.

La N-VA devra à la fois montrer le changement annoncé à son électorat et expliquer que la nouvelle réforme confédérale de l’état est mise de côté. Cependant, le 25 mai, la N-VA a réalisé un résultat historique sur base d’un projet économique et budgétaire.
La voie vers la septième réforme de l’état s’ouvrira plus rapidement que prévu.

Dans ce pays la réforme de l’état n’est jamais loin. L’opposition contre la coalition suédoise viendra effectivement en premier lieu du PS. Ce parti plaidera-t-il pour plus de pouvoir en faveur des communautés et des régions? C’est une différence importante par rapport à la sp.a, qui n’est entrée que dans le gouvernement bruxellois.

La rupture entre les chrétiens-démocrates, les assainissements dans les régions (la Flandre en équilibre et la Wallonie aussi d’ici 2018) ainsi que les compositions de gouvernement totalement différentes ouvriront, plus vite que prévu, la voie à la septième réforme de l’état.

En outre, on peut se demander si le MR, tout puissant au niveau fédéral, est prêt à réaliser la sixième réforme de l’état et ses nombreux accords de coopération. Au niveau régional, le MR n’est, en effet, uniquement représenté qu’au gouvernement d’Eupen.

Conclusion

Normalement, le voyage vers les prochaines élections dure cinq ans. Cependant, il faut partir du principe qu’à partir de l’été 2018, étant donné les élections locales, il ne se passera plus grand-chose jusqu’aux élections 2019. Quoi qu’il en soit, cette coalition est historique et se retrouvera dans les manuels d’histoire politique belge. La question de la politique acceptable et visible de la part des coalitions suédoises jouera un rôle primordial. Car ce n’est pas la politique en elle-même qui est sanctionnée par les électeurs, mais le manque de politique. Pensons à ce tube du groupe suédois Abba: « The winner takes it all ».

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