Quand cessera-t-on de flatter Marc Dutroux ?

Marc Dutroux est amené aujourd’hui dans un grand déploiement de force (coût estimé : entre 30 000 et 50 000 euros) de la prison de Nivelles au palais de justice de Bruxelles pour comparaître devant le tribunal de l’application des peines chargé de statuer sur sa demande de bracelet électronique et/ou de libération conditionnelle.

Tout le monde sait parfaitement que, mis à la disposition du gouvernement, il ne sortira de prison, s’il en sort jamais, qu’à un âge très avancé. Son état de santé physique et mentale, connu par les indiscrétions d’un médecin en mal de publicité, le rende inapte à toute réinsertion, sans même parler de sa dangerosité intrinsèque : cet homme n’a jamais hésité à manipuler, planifier, tromper et mentir pour satisfaire ses fantasmes. On est donc bien obligé de le subir en prison et, par respect pour notre système, de laisser jouer en sa faveur les mécanismes qui, pour d’autres détenus, peuvent aboutir à un aménagement des conditions de détention (préau, atelier), à des faveurs (sorties, congés) et finalement à une libération anticipée.

Tous les prisonniers ne sont pas des Dutroux : depuis l’affaire éponyme, leur sort s’est déjà suffisamment alourdi. Mais quand il s’agit du criminel du siècle, on n’est pas obligé de jouer à se faire peur et à rejouer sans fin la scène d’une société horrifiée et paniquée, en laissant monter au filet tous les seconds couteaux prêts à s’engouffrer dans la brèche.

Quel besoin avait le tribunal de l’application des peines de Bruxelles de s’incruster au Palais alors qu’il aurait pu se déplacer, à titre exceptionnel, à la prison de Nivelles ? Pourquoi les hommes et femmes politiques continuent-ils à hanter les débats dominicaux sur un thème aussi éculé ? Pourquoi la ministre de la Justice feint-elle de s’incliner devant l’indépendance de la justice alors qu’elle ne cesse de raboter celle-ci en faisant voter en urgence des législations qui ne s’appliqueront même pas à Dutroux ? Pourquoi promettre des réformes à tout va alors que notre système judiciaire, le bien le plus précieux de toute démocratie, implose silencieusement sous le poids des frais judiciaires, des prisons surpeuplées et d’une mauvaise gestion endémique (informatique, organisation) ? Pendant ce temps-là, Dutroux peut continuer à se sentir vivre, en demeurant le centre de l’attention de la société et en infligeant à celle-ci un supplice chinois qui le distrait de sa triste condition. Un rêve de psychopathe.

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