Hassan Bousetta

Publifin: d’abord la bonne gouvernance, ensuite le maintien du bien public sous contrôle public

Hassan Bousetta Conseiller communal PS à Liège - Ancien Sénateur

Cela fait maintenant 50 jours exactement qu’a débuté l’affaire Publifin/Nethys et l’incendie ne semble pas prêt à s’éteindre. Certains semblent pourtant encore hésiter sur la nature réelle de la crise.

Il y a d’une part ceux qui pensent que le torrent de l’actualité finira par éteindre le feu. Ceux-là espèrent qu’il est encore possible de circonscrire le sinistre et les dégâts qu’il occasionne. Et puis, il y a ceux dont je suis qui pensent ou redoutent qu’en l’absence d’une réaction ferme, le brasier finira par emporter tout sur son passage. Et lorsque tout sera balayé, il ne restera plus qu’une avenue inespérée vers le pouvoir pour les populistes, les poujadistes et les idéologues de la haine de l’Autre.

Comme beaucoup, je ne veux pas me résoudre à cette sombre perspective. Comme beaucoup, je suis heurté. Comme beaucoup, je me refuse de céder à la résignation. Il faut regarder les choses en face et en tirer les leçons. En tant que militant et mandataire du PS, je mesure la profondeur de la crise de confiance que cette affaire provoque et l’ampleur de l’effort qu’il faudra fournir pour en sortir par le haut. Cela exigera beaucoup de travail pour mieux encadrer et contrôler l’action des élus au sein des organismes publics. Je ne peux pas non plus m’empêcher de penser aux citoyen-ne-s, sympathisant-e-s, et militant-e-s que nous n’avons eu de cesse de solliciter et mobiliser depuis tant d’années, pendant et entre les élections. Je sais que cela exigera un travail de pédagogie pour retisser la confiance avec toutes celles et ceux qui nous ont soutenus et qui sont aujourd’hui interloqués, choqués ou révoltés par les affaires. Qu’on soit militant ou mandataire, l’idéal doit toujours être là pour guide, cet idéal qui nous faisait combattre et qui nous pousse encore à nous battre aujourd’hui, comme l’a si bien chanté Ferrat.

Il n’y a pas d’autre option que celle de s’inscrire pleinement et résolument dans la révolution éthique souhaitée par le gouvernement wallon et anticipée par les instances du PS. Pour rappel, une flopée de mesures touchant aux cumuls et aux rémunérations a été adoptée unanimement par le Bureau du PS à l’initiative du Président Elio Di Rupo. Le PS a bien mesuré qu’il s’agissait là de questions fondamentales de crédibilité, voire de survie. Personne ne peut agir en pensant qu’il suffira d’adopter des mesures cosmétiques ou de se satisfaire de gadgets de communication de crise. Dans un an, la situation dans les fédérations ne doit plus être la même que celle que nous vivons aujourd’hui. Le décumul, la limitation des rémunérations et la séparation de la politique et des affaires sont des impératifs catégoriques !

Ceci étant dit avec suffisamment de clarté, il importe aussi de ne pas pénaliser le redéploiement liégeois en jetant le bébé avec l’eau du bain. Le rôle des élus, et singulièrement celui des socialistes, n’est pas de se lamenter ou d’occuper toutes les tribunes en se repassant ad nauseam le refrain du Yaka ! Leur rôle est de créer les conditions du développement économique et social. Une région d’ancienne industrialisation comme la nôtre peut-elle véritablement se relever sans l’initiative industrielle publique ? Qui peut croire que la privatisation des outils industriels publics constituera une réponse satisfaisante pour remettre la bonne gouvernance sur les rails ? L’ancrage public est une vieille conviction du socialisme liégeois à laquelle je souscris pleinement. Peu de réflexion en éloigne mais beaucoup y ramène. Il faut continuer à défendre et affirmer la nécessité de l’économie publique même si ce ne sera certainement pas un argument facile à défendre dans les prochains mois puisque que certains, de plus en plus nombreux, revendiquent déjà la privatisation du groupe Publifin/Nethys.

Ce combat, la jeune génération doit le mener non pas pour des raisons idéologiques abstraites, mais par la volonté de préserver l’activité économique, l’emploi et les centres de décision localement. Nous avons suffisamment souffert avec la sidérurgie pour savoir que nous devons à Liège, comme ailleurs en Wallonie, prendre notre destin en main. Soyons clair, cela veut aussi dire qu’il ne faut pas, comme on l’a entendu, mettre l’outil en Bourse, mais défendre, au contraire, l’invention d’un cadre juridique nouveau calibré pour les entreprises de développement économique régional, qui soit entièrement public dans son management, son mode de régulation et de contrôle, mais aussi distinct du modèle de l’intercommunale et du modèle de l’entreprise publique autonome fédérale.

Puissions-nous être entendus par ceux qui s’apprêtent à enfiler le rôle ingrat de managers de crise.

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