Le ministre CDH désigne deux coupables : les médias et les citoyens. © YVES GOETHALS

Prévot au royaume du déni

Christophe Leroy
Christophe Leroy Journaliste au Vif

 » De quoi la politique est-elle malade ?  » Maxime Prévot a tenté d’y répondre au Cercle de Wallonie de Namur. Avec une éloquente faculté à détourner le miroir tendu aux élus.

 » Et merde…  » Le sourire en coin, l’Ecolo Jean-Michel Javaux vient de croiser le seul journaliste en présence dans le décorum mondain du Cercle de Wallonie. Le monde politique n’est décidément tranquille nulle part. Pas même sur les hauteurs de la citadelle de Namur. Il est 19h30, ce 27 mars. Le bourgmestre d’Amay, président du groupe Meusinvest, s’apprête à présenter l’orateur de la soirée devant une soixantaine de membres : son ami Maxime Prévot, ministre CDH multitâche au gouvernement wallon et bourgmestre en titre tout aussi multitâche à Namur. Le thème de la conférence, agrémentée d’un menu trois services, porte sur le retour de ces affaires multitaches – notez la disparition de l’accent circonflexe – jetant l’opprobre sur les élus, autour d’une question :  » De quoi la politique est-elle malade ?  »

Pour y répondre, c’est donc un patient qui se présente à la barre, suspendant durant une heure l’arrivée du tartare de bar.  » Je ne vais pas vous faire un discours visant à dédouaner la classe politique de ses propres torts « , annonce Maxime Prévot, avant de faire un discours dédouanant la classe politique de ses propres torts. Car s’il ne nie pas l’illustration  » douloureuse  » de Publifin, l’invité d’honneur va l’évacuer en neuf secondes, pour mieux désigner deux coupables extérieurs : les médias et les citoyens. Les premiers se profilant, selon lui, comme les vecteurs de l’incompréhension des seconds à l’égard de tous ces élus qui travailleraient si bien et si durs, pourtant.

 » Anorexie intellectuelle  »

Maxime Prévot dénonce un manque de nuances de la part de la collectivité, qu’il semble considérer comme un bloc monolithique et uniforme dans l’expression de son  » ressenti primaire  » sur les réseaux sociaux.  » Ce simplisme, dans la réaction d’une part croissante de notre population, est aussi alimenté par un travail journalistique qui est en train de dégringoler « , ajoute-t-il, invoquant le paradoxe d’une  » obésité informationnelle, dédoublée d’une anorexie intellectuelle « . C’est ainsi que, progressivement, l’orateur détourne le miroir qui lui était tendu vers des interlocuteurs étrangers aux obscurs montages, mensonges, excès finalement avérés d’une partie de la classe politique. Qui peine encore à en prendre la pleine mesure, tant ces dérives avaient sombré dans la normalité.

Au-delà des maux, quels remèdes ? Maxime Prévot parle de transparence, mais dans les limites de l’acceptable. Il cite la démocratie participative, pour mieux la circonscrire à un rôle d’appoint, tout au plus, au modèle représentatif. L’élu doit rester le  » porteur d’un message de sens « , dit-il, plutôt que d’adouber  » Gisèle de Marcinelle ou Arthur de Namur « . Reste alors l’épineux problème des mandats.  » Parce qu’une dizaine de personnes tout au plus étaient en situation d’abus, on en arrive à fixer des jetons de présence à 150 euros. Et dans cinq ans, on viendra se plaindre que nos outils économiques sont gérés par des èwarés(NDLR : ahuris en wallon).  »

Vous voyez, ces èwarés forcément plus incompétents qu’une partie de leurs prédécesseurs, dont les émoluments généreux constituaient jusqu’il y a peu un gage d’implication dans des comités fictifs.

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