© Cafasso

Premières images du village pénitentiaire de Haren

Olivier Rogeau
Olivier Rogeau Journaliste au Vif

Enjeu financier faramineux, riverains en colère, exigences flamandes : le futur « village pénitentiaire » de Haren réunit tous les ingrédients d’un nouveau cocktail bruxellois explosif. En primeur, les premières images d’un projet entouré d’opacité.

On l’appelle « la méga-prison », « le village pénitentiaire » ou encore, avec un brin d’ironie, « l’éléphant de Haren ». Et pour cause : le complexe carcéral qui sera construit, à partir de 2015 en principe, dans la petite entité bruxelloise sera l’un des plus importants d’Europe. Appelé à remplacer à l’horizon 2017 ou 2018 les établissements vétustes de Saint-Gilles, Forest et Berkendael, il aura une capacité de près de 1 200 détenus. Il comprendra trois prisons pour hommes, deux prisons pour femmes, un centre psychiatrique, une institution pour jeunes et un bâtiment pour l’administration et la détention limitée. Situé en grande partie sur le territoire de la Ville, le complexe mord aussi sur la commune flamande de Machelen.

Maître d’oeuvre du projet, la Régie des bâtiments présente ce mastodonte comme une « prison humaine ». Le modèle en étoile issu du XIXe siècle est révolu. Les architectes ont été invités à imaginer des pavillons autour d’une place, avec des ateliers et autres lieux d’activité, dans un esprit « village » ou « campus ». « Le projet abordera d’une manière créative les différences de niveau existantes sur le terrain de construction, indique la Régie. Grâce à cela, tant les habitants du quartier que les détenus et les personnes travaillant dans la prison, auront une vue très variée. Le mur de la prison sera intégré de manière la plus naturelle possible dans l’environnement existant. »

Pas de longs couloirs dans ces huit pavillons, qui disposeront, en leur milieu, d’espaces de rencontre. Il n’y aura, le plus souvent, pas de barreaux aux fenêtres des cellules, mais des vitrages haute sécurité. « L’objectif est de réduire autant que possible les effets néfastes de la détention, explique Marie-Sophie Devresse, de l’UCL, qui a accompagné le projet en tant qu’experte en criminologie. Le cahier des charges a été plusieurs fois revu en ce sens. »

Un budget de 331 millions d’euros

L’enjeu financier est à la mesure d’un chantier de cette envergure. « La prison de Haren est notre plus grosse commande nationale pour une construction, reconnaît Servais Verherstraeten, secrétaire d’Etat CD&V en charge de la Régie des bâtiments. Elle représente un budget de 331 millions d’euros. » Pour éviter de devoir débourser un montant aussi considérable sur une courte période, il a été décidé de recourir à un partenariat public-privé, ce qui permet d’amortir la dépense publique sur vingt-cinq ans. Le montage de l’opération dépasse largement la simple construction du bâtiment : le contrat négocié avec Cafasso, le consortium choisi, est de type « DBFM » (Design, Build, Finance, Maintain). En clair, ce consortium, qui associe des entrepreneurs espagnols au groupe gantois Denys, concevra, construira, financera et entretiendra le pénitencier. Deux décennies et demie plus tard, les installations reviendront aux pouvoirs publics. D’ici là, l’Etat paiera au partenaire privé des indemnités de mise en disponibilité, soit plusieurs dizaines de millions d’euros chaque année.

L’enquête complète du Vif/L’Express ce jeudi en librairie.

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