Frank Deboosere

Pourquoi l’heure d’été nous fait passer plus de temps dans les embouteillages

Frank Deboosere Météorologue de la VRT

Pour le météorologue de la VRT, Franck Deboosere il n’est pas pertinent de jouer avec le temps. Qui plus est, cette pratique entraîne des désagréments.

La nuit de samedi à dimanche, on passera de l’heure d’été à l’heure d’hiver. Pour être exact : dimanche matin à trois heures du matin on reculera l’horloge d’une heure, trois heures seront deux heures.

Le passage à l’heure d’hiver a trois conséquences directes : dimanche matin, vous pourrez dormir une heure de plus, le soleil se lèvera une heure plus tôt et se couchera une heure plus tôt. L’heure d’hiver durera jusqu’au 27 mars 2016. Ce jour-là, on repassera à l’heure d’été. Le système actuel de l’heure d’été date de 1977. Sous influence de la crise économique, l’état s’est mis à jouer avec le temps. En faisant correspondre les heures de lumière au mode de vie des gens, on espérait économiser de l’énergie. Entre-temps, cet argument est complètement dépassé. Plusieurs études ont démontré qu’on économise très peu ou même pas du tout et que l’instauration de l’heure d’été entraîne de nombreux effets secondaires. Les embouteillages du matin sont plus importants quand il fait noir, les horloges biologiques sont déréglées et la chaleur estivale chauffe les chambres à coucher pendant une heure supplémentaire.

Histoire du temps

Dans le passé, il n’y avait pas de temps unitaire en Belgique. À midi, au milieu du jour, le soleil était à son point culminant. Mais cela variait d’une région à l’autre et selon la période de l’année (l’équation du temps). En 1892, le réseau ferroviaire a instauré un temps unitaire, c’est-à-dire le Temps universel coordonné (UTC), l’ancien Greenwich Mean Time (GMT) puisque la Belgique se situe dans le fuseau horaire du méridien de Greenwich.

Tout ça a changé pendant l’occupation. Entre 1914 et 1918, les occupants allemands ont instauré leur temps. En hiver, on avançait d’une heure sur le Temps universel coordonné (donc UTC+1) et même deux heures en été (UTC+2). En d’autres termes, c’était le système tel qu’on le connaît aujourd’hui. La raison était évidente : pour faire du commerce efficacement, il était primordial de s’aligner avec l’Allemagne : des raisons purement économiques. C’était clairement exagéré.

Entre les deux guerres mondiales, l’état belge est passé à un système plus modéré. En été, on s’est mis à avancer d’une heure sur l’UCT. En hiver, on respectait l’UCT, l’heure de Greenwich. Pendant la Seconde Guerre mondiale, on a réintroduit le système de la double heure d’été (telle qu’on la connaît aujourd’hui).

À partir du 7 octobre 1946 on n’a plus joué avec le temps. On a choisi la formule UTC+1 pendant toute l’année. Jusqu’au 25 septembre 1977, on n’a plus touché aux montres. On utilisait l’heure d’Europe centrale (UTC+1), en été et en hiver. Depuis, on est passé à une double heure d’été. En hiver, on avance d’une heure sur l’UTC, en été de deux heures. Cela signifie que notre heure d’été est en fait celle d’Europe centrale, l’heure d’Ankara et Istanbul. L’heure de midi estivale tombe vers 13h45, le moment le plus chaud du jour se déplace vers 16-17 h. À l’époque, l’heure d’été durait jusqu’au dernier week-end de septembre.

Mais depuis 1996 on a (sous la pression des Britanniques et des Irlandais) ajouté un mois de plus. L’heure d’été dure jusqu’au dernier week-end d’octobre. Concrètement, le soleil se lève vers 8h30 et une grande partie des embouteillages du matin se retrouvent dans le noir. Aussi n’est-il pas étonnant que les files soient plus longues que jamais en octobre.

Problèmes

Ma proposition : laissez les différents secteurs économiques décider en été s’ils veulent commencer plus tôt ou pas. Cela permettrait d’échelonner les embouteillages, une véritable économie cette fois.

Dans le monde entier, le passage est à l’origine de plein de misère et de rendez-vous manqués. C’est en effet un enchevêtrement très compliqué, car les dates de changement sont différentes d’un pays à l’autre. Et ça deux fois par an ! Il vaudrait beaucoup mieux ne pas jouer avec le temps. Si dimanche, on avance notre horloge d’une heure, on se retrouvera dans les mêmes embouteillages lundi. Ma proposition : laissez les différents secteurs économiques décider en été s’ils veulent commencer plus tôt ou pas. Cela permettrait d’échelonner les embouteillages, une véritable économie cette fois.

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