Pierre Havaux

Plan B : les francophones au comble du ridicule

Pierre Havaux Journaliste au Vif

La probabilité devient certitude médiatique: Bart De Wever, l’indépendantiste/confédéraliste, sera bourgmestre d’Anvers. La perspective suffit à plonger les francophones dans l’effroi, à envisager à nouveau le pire. Jusqu’à ressortir un plan B qu’ils ne sont toujours pas capables de commencer à dessiner. Ce syndrome de la feuille blanche frise le ridicule.

Il n’a pas besoin de le clamer lui-même, les autres s’en chargent pour lui. Bart De Wever, leader de la N-VA, forcera sans aucune peine les portes de l’Hôtel de Ville d’Anvers, au soir du scrutin communal du 14 octobre. La première ville de Flandre sera donc aux mains du premier bourgmestre nationaliste flamand : l’affaire est pliée. Les sondages le disent et le répètent, les analystes y croient dur comme fer. De Wever a course gagnée, et dans son sillage c’est toute la N-VA qui est promise au nirvana.

A la limite, inutile pour les Anversois de se déranger jusqu’aux urnes : on leur mâche déjà la besogne. Inutile même d’attendre que le futur maïeur de la Métropole, les mains enfin dans le cambouis, soit soumis à l’épreuve de la gestion d’une grande ville: l’homme du changement, qui promet monts et merveilles aux Anversois, qui leur annonce une guerre sans merci à la drogue, ne pourra pas décevoir. C’est dit : tout ce que De Wever touche se transforme en or. Ou en plomb, question de point de vue.

C’est tellement vrai que les regards fous d’inquiétude se braquent déjà sur les élections fédérales et régionales de 2014. Ce sera la mère de toutes les batailles électorales, celle qui sonnera le dénouement de la prise en otage du pays par les nationalistes flamands. A leur avantage, s’entend.

Regain de panique au village francophone, devant une histoire déjà écrite. Oubliée la scission « historique » de BHV et la fragile atmosphère de détente communautaire : tout cela, c’était de la blague. Retour brutal à la glaciation et aux fondamentaux : le plan B, ce fameux plan de chute qui doit faire atterrir un espace wallo-bruxellois, le jour où il sera largué par la Flandre.

Ah, le plan B ! On l’oubliait, celui-là : heureusement que le pessimiste de service a de la mémoire. Et le sens du buzz. Le socialiste Charles Picqué, ministre-président bruxellois, a donc ressorti la grosse artillerie. Celle que le PS avait déjà dégainé au plus fort de l’impasse politique, quand le pays touchait le fond.

Un peu de frousse, ça pimente toujours. Et cela rend contagieux. Ce n’est pas idiot du tout d’y penser à ce plan B: Benoît Lutgen, le président du CDH, dit d’ailleurs qu’il a déjà suggéré un projet francophone. Rudy Demotte (PS), ministre-président wallon, ne dit pas non. Et puisque Bart De Wever n’est pas contre, que demander de plus ? Autre chose qu’une dramatisation sans lendemains. Car si on entend bien le discours francophone, le stade de la feuille blanche n’est guère dépassé. Et ça, c’est nettement plus inquiétant.

Au passage, une bonne âme pourrait-elle se dévouer pour annoncer au français Bernard Arnault que vouloir être Belge n’est peut-être plus le meilleur des filons : le placement n’est pas garanti. Il a vraiment du flair en affaires, le milliardaire ?

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire