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Picqué : « L’époque de bonnes relations est révolue »

Olivier Mouton
Olivier Mouton Journaliste

Le président PS du parlement bruxellois est inquiet du climat de tension politique actuel. Seule issue ? Se reparler entre francophones. En sachant que la N-VA annonce toujours le confédéralisme…

Ministre-président pendant quatorze ans, désormais président d’assemblée, Charles Picqué se dit en vigilance rouge à la veille de la fête de la Région bruxelloise, ces 9 et 10 mai.

Le Vif/L’Express : Comment la Région bruxelloise vit-elle la nouvelle donne politique et institutionnelle ? Est-elle encore menacée dans son existence ?

Charles Picqué : On a fait un chemin énorme en vingt-cinq ans. Nous avions fêté le 20e anniversaire de la Région à la veille d’une négociation institutionnelle que l’on savait périlleuse parce que toute une série de discours remettait en cause ce statut. Le 25e anniversaire, en 2014, fut un moment de réconfort. Mais nous devons aujourd’hui nous montrer plus vigilants que jamais, pour d’autres raisons. L’édifice institutionnel reste extrêmement complexe. Trop, aux yeux de la N-VA dont les intentions sont avouées. Bart De Wever rappelait encore récemment que tout ceci n’était qu’une période de transition. Les intentions dans la durée des nationalistes flamands restent les mêmes. Ce n’est pas parce qu’un sondage dit que les Flamands s’intéressent moins au communautaire que celui-ci ne reviendra pas par la fenêtre, à travers des politiques socio-économiques différenciées et l’éternel discours « I want my money back ». Geert Bourgeois vient de rappeler qu’il fallait faire une analyse objective des transferts financiers vers la Wallonie. Oui, le communautaire va revenir sous la forme d’une exigence pour davantage d’autonomie et moins de solidarité.

La sixième réforme de l’Etat induit déjà cela, en partie, non ?

C’est vrai. La mauvaise nouvelle, c’est que, pour la première fois, on a mis la main dans le mécanisme de rupture de la solidarité interpersonnelle. Je connais assez l’histoire de ce pays et de ses réformes de l’Etat pour savoir qu’au nom de paquets de compétence homogènes, on demandera le transfert d’autres éléments de la politique familiale ou sociale, dans la foulée des allocations familiales. Mais ce qui m’inquiète surtout, c’est le contexte politique actuel : les nationalistes sont au pouvoir au fédéral, les majorités sont asymétriques entre le fédéral et les Régions, s’ajoute à cela un ralentissement économique qui risque d’accroître cette volonté de demander « my money back ». L’époque où il y avait de bonnes relations interpersonnelles entre les politiques est, en outre, révolue. Or, cela facilitait les choses. Il restait un zeste de belgitude avec les Martens, Dehaene, Moureaux, Spitaels… La génération actuelle n’a pas été mêlée aux phases du fédéralisme initiée au début des années soixante et c’est un problème. Nous devons observer la situation actuelle avec vigilance. Il faut faire taire les acrimonies politiques pour se remettre à parler, c’est indispensable. Ce qui s’est passé avec le Comité de concertation… je n’ai jamais connu ça. C’est incompréhensible que l’on n’ait pas préparé l’annonce d’une telle différence dans l’évaluation de la dotation budgétaire des Régions et Communautés. Avant, il y avait des groupes de travail, des comités interministériels.

Ce qui s’est passé était brutal ?

Ah oui ! Le fédéral reste quand même le garant de la loyauté fédérale, c’est lui qui a en premier lieu la vocation de produire de la cohésion. On est en droit de se demander si dans le chef de la N-VA, l’Etat doit être géré avec harmonie. Et on sait que la représentation francophone dans le gouvernement est ce qu’elle est… La menace, c’est un fédéralisme de compétition et de désunion.

L’intégralité de l’entretien dans Le Vif/L’Express de cette semaine. Avec :

– La communauté métropolitaine

– Le futur Stade national à Grimbergen

– Le lobby pour Bruxelles de Laurette Onkelinx et Didier Reynders

– Le rapprochement PS-MR – Rudi Vervoort, est-il l’homme de la situation ?

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