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Philippe Buelen, l »homme qui fait pleuvoir les millions sur Namur

Christophe Leroy
Christophe Leroy Journaliste au Vif

En quelques mois, Namur a amassé cent millions d’euros de subsides. Et ce n’est pas terminé. Derrière Maxime Prévot, une pointure hyper-influente du CDH agit à l’abri des regards : Philippe Buelen, artisan de montages financiers et négociateur-né.

Il ne comptait plus revenir « dans le circuit ». Mais, lorsque son ami Maxime Prévot, bourgmestre de Namur, lui a demandé un coup de pouce pour accélérer ses grands dossiers, Philippe Buelen a dit oui. Sans hésiter. Parce qu’il partage sa vision, ses ambitions. Il ne l’aurait fait pour personne d’autre.

Le réseautage, la chasse aux subsides, le donnant-donnant, il connaît. Homme de l’ombre par excellence, ce Bruxellois de 48 ans est devenu l’une des personnalités les plus influentes du CDH. « Et tous partis confondus, il est certainement dans le top », confirme un député libéral. Durant vingt-deux ans, Buelen a arpenté les cabinets ministériels de Jean-Pierre Grafé, William Ancion, Joëlle Milquet et enfin d’André Antoine, jusque mi-2012. Son carnet d’adresses lui ouvre les portes des conseils d’administration d’incontournables acteurs économiques.

Aujourd’hui, c’est principalement à la Sogepa (Société de gestion et de participations), puissant levier économique de la Région wallonne, qu’il injecte son savoir-faire. Mais celui qu’on surnommait « le ministre » pour sa connaissance des dossiers n’hésite pas à s’investir dans tout autre mandat permettant de faire avancer ses pions sur l’échiquier politico-financier – notamment à la Sowalfin, qui soutient financièrement les PME wallonnes et à la Société régionale d’investissement de Wallonie (SRIW). « En bon négociateur, il a toujours un dossier sous la main pour faire pression sur les ministres, y compris ceux qui l’apprécient moins », avance un de ses proches.

Depuis 2012, le challenge namurois ne fait qu’ajouter un peu de piment en dehors de ses heures de boulot, rythmées par des réunions du matin au soir. Philippe Buelen a pris goût à sa nouvelle mission de « facilitateur » au service de Maxime Prévot. « Il me fallait quelqu’un qui puisse faire en sorte que Namur s’inscrive dans des démarches beaucoup plus ingénieuses en termes de mobilisation des moyens disponibles, souligne le bourgmestre de 35 ans. J’ai déjà un carnet d’adresses assez fourni, mais je ne connaissais pas pour autant toutes les structures existantes. J’ai donc demandé à Philippe si, au-delà de notre amitié, il accepterait de participer à une nouvelle aventure et de m’ouvrir quelques portes. »

Une efficacité incontestable

C’est dans ce contexte que Buelen se profile désormais comme l’enthousiaste « guichet unique » de Maxime Prévot. Avec une efficacité incontestable. En quelques mois, le duo a contribué à attirer des dizaines de millions d’euros de subsides en terres namuroises : 50 millions pour la dalle de la gare, 22 millions pour l’attractivité urbaine et divers grands projets, 10 millions dédiés à la Citadelle pour les dix prochaines années, 14 millions pour le centre Adeps de Jambes. En bonus, l’éligibilité de Namur aux très convoités fonds européens Feder. Du jamais-vu dans une ville qui s’était toujours sentie lésée par rapport aux mannes allouées à Liège, Charleroi et Mons.

D’autres projets nécessitent d’entrer directement en contact avec des partenaires du secteur privé. Là encore, Philippe Buelen se plaît à débusquer des interlocuteurs d’intérêt parmi les 400 contacts privilégiés de son répertoire téléphonique.

Sa recette en trois temps peut être transposée à l’infini dans d’innombrables dossiers. Un : établir un plan de financement en sondant chaque organisme doté de moyens financiers. Or, dans les méandres de l’administration wallonne et des acteurs para-publics, Buelen se sent chez lui. Deux : les convaincre, jour après jour, de la plus-value du projet en termes d’emplois, de retour sur investissement. En guise de piqûre de rappel, un e-mail, un SMS furtif ou une bonne conversation suffisent. Trois : boucler le dossier en lançant les dés auprès des ministres compétents, sans jamais perdre de vue la démarche intéressée qui sous-tend le petit monde de la politique wallonne.

Sauf surprise, Philippe Buelen compte épauler Maxime Prévot pour quelques mois encore. L’issue des élections de mai 2014 scellera ou non le pacte conclu entre les deux hommes, même si le bourgmestre namurois a promis, quoi qu’il arrive, de garder les rênes de l’Hôtel de Ville. Seule certitude : une fois que les grands dossiers de son ami seront bien ficelés, l’ombre de Buelen tirera sa révérence à Namur. Aussi discrètement qu’à son arrivée. D’ici là, les occasions d’amasser les euros par millions ne manqueront pas.

>>> Retrouvez le portrait intégral, avec l’avis des différents acteurs politiques, dans Le Vif/L’Express de cette semaine

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