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Philippe aux States : comme Baudouin en 1959 ?

Malhabile, timide, gauche… Ces qualificatifs sont employés pour décrire le prince Philippe. Mais dans les années 1950, c’est ainsi qu’on parlait de Baudouin. En 1959, le jeune roi passe trois semaines aux Etats-Unis. Et fait la découverte des techniques modernes de communication…

Nous sommes le 11 mai 1959. Baudouin vient d’arriver aux Etats-Unis. Sur un podium, il doit prononcer un discours. Baudouin n’est pas un roi de la comm’ : il déclame son texte classiquement, bien caché derrière ses lunettes sombres. Arrive ensuite le tour du président Eisenhower. Il ne lit pas son texte, il le dit. Tournant le dos à Baudouin, il s’élance vers le public, se présente face aux journalistes et aux caméras. Pierre Wigny, le ministre belge des Affaires étrangères, observe la scène. « C’est notre première expérience des méthodes américaines, écrit-il. J’en retiendrai la leçon. » Le lendemain, Baudouin s’exprime devant le Congrès, avant de retrouver les journalistes sur les marches du Capitole. Wigny se penche vers lui et chuchote : « Regardez les photographes et souriez ». Baudouin peine. Il n’ose pas.

Mise en contexte : durant de longues années, Baudouin refuse de quitter le pays. L’homme craint le faste des cérémonies. Il ne supporte ni les décorations, ni les jaquettes et déteste les réunions officielles. Et puis, il reste hanté par l’idée d’occuper la place de son père. Il faut dire que jusqu’en 1960, il vit encore sous le même toit que Léopold III et Lilian… En 1955, Baudouin se rend pourtant dans la colonie. Au Congo, Bwana Kitoko s’ouvre et sourit. Un petit peu. Mais ce n’est qu’en 1958 qu’il effectue sa première visite officielle à l’étranger, aux Pays-Bas.

« Nous étions partis avec un homme renfrogné »

C’est dire si le voyage aux States constitue un événement. Pour l’occasion, le flamboyant ambassadeur de Belgique aux Etats-Unis, Robert Silvercruys, atteint par la limite d’âge, a été prolongé dans ses fonctions. Durant trois semaines, le jeune roi de 28 ans parcourt l’Amérique, de Washington à Chicago, en passant par Disney World. Il rencontre les élites politiques tout comme les vedettes du showbiz. Les débuts ne sont pas évidents. Mais au fil des jours, Baudouin s’adapte. Il commence à serrer les mains et à se mêler aux foules. Conscient de rendre service à son pays, il fait de son mieux. Le ministre Wigny continue à le suivre de près. Et admire les progrès : « Son succès personnel est énorme, écrit-il dans son journal de bord. Du coup, il découvre ses possibilités humaines, ses possibilités de contact, la facilité avec laquelle les sympathies peuvent être conquises. Lui qui avait toujours peur se détend ; lui qui était renfermé commence à aimer son métier. » Tout n’est pourtant pas encore parfait. Le 29 mai, la voiture du Souverain défile dans les rues de Broadway. Ce jour-là, Baudouin n’est pas au top. Calé dans le fond de sa voiture, il porte de temps en temps la main à la visière de sa casquette. Après coup, le chef de l’Etat se montre lucide : « j’estime que c’est un échec complet », confie-t-il à Wigny. Qui se réjouit de voir le roi si lucide…

Le succès du voyage se répercute en Belgique. Les articles et les photos circulent parmi l’opinion publique. On parle d’un « nouveau roi ». A Laeken, une conférence de presse est même organisée. Pierre Wigny se réjouit : « Nous étions partis avec un homme renfrogné, à tout le moins timide et gêné. Nous revenons avec un Souverain détendu, sûr de lui-même, résolu à jouer son rôle. »

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