Le palais de justice de Bruxelles © Belga

Palais de justice de Bruxelles : « l’avocat a poussé les agents pour passer »

Antoine Chomé, un avocat pénaliste bruxellois, a déposé plainte jeudi pour coups et blessures après avoir été molesté mercredi par des agents du palais de Justice de Bruxelles qui, selon lui, l’ont plaqué au sol, menotté et jeté au cachot alors qu’il était blessé, a indiqué le parquet de Bruxelles.

Le contrôle interne des services de la police de la zone de Bruxelles Capitale-Ixelles mène une enquête. Me Antoine Chomé a été entendu jeudi et un maximum de témoins sont actuellement en cours d’identification en vue d’être entendus. L’identification des membres du service de sécurité impliqués dans l’incident est également en cours.

Antoine Chomé voulait accéder mercredi au palais de Justice par un couloir attenant à la salle d’audience de la cour d’assises dans laquelle il devait plaider. Il a ensuite été interpellé par les services de sécurité du palais et une altercation s’en est suivi.

Depuis le relèvement du niveau de vigilance en Belgique, les avocats comme les justiciables doivent subir un contrôle de sécurité au palais de Justice de Bruxelles. Les avocats soulignent que ces nouvelles mesures de sécurité ralentissent l’accès au bâtiment et qu’ils arrivent dès lors en retard à leurs audiences.

« Me Chomé avait poussé les agents pour passer »

Un agent de sécurité du palais de justice de Bruxelles a affirmé que l’avocat qui avait été privé de liberté par ses collègues mercredi savait parfaitement qu’il ne pouvait pas emprunter le couloir de la cour d’assises. « Il a fait semblant qu’il venait visiter la cour d’assises et a essayé de passer par la salle d’audience, mais il s’est fait rabrouer par l’huissier. Il a malgré tout encore tenté de passer ensuite par le couloir longeant la cour d’assises et qui est réservé au personnel, aux agents et parfois aux avocats qui sont partie à la cause dans le procès d’assises », a déclaré l’agent. « Me Chomé s’est fait passer dans les médias pour un pauvre petit malheureux, mais il n’a pas tout dit de ce qu’il s’était passé », a-t-il commenté.

« L’avocat a poussé les agents pour passer et dès qu’il y a passage à la force physique, nous avons un code précis à appliquer, soit maîtriser la personne et la menotter », soutient cet agent de sécurité. « Nous avons déjà eu trois ou quatre altercations avec des avocats, à cet endroit à la cour d’assises, depuis trois semaines, donc depuis la mise en place des nouvelles mesures de sécurité. Les avocats savent qu’ils ne peuvent pas passer par ce couloir de la cour d’assises, mais doivent franchir l’entrée principale où se trouve le portique de sécurité », a souligné l’agent de sécurité.

« Nous connaissons les avocats, nous les voyons tous les jours, et si nous ne pouvons pas leur faire confiance, ça ne va pas. Nous avons en plus créé, à l’entrée principale, une file pour le public et une file pour les avocats, pour permettre à ceux-ci de passer plus vite. Nous faisons au mieux pour tenir compte de leurs impératifs professionnels, mais nous sommes aussi en sous-effectif », a conclu l’agent de sécurité, rejoignant ainsi la position du bâtonnier Stéphane Boonen concernant le manque de moyens pour la sécurité au palais de Justice de Bruxelles.

Le barreau de Bruxelles demande des contrôles de sécurité plus adaptés

Le bâtonnier de Bruxelles a réclamé jeudi, lors d’une conférence de presse, plus de moyens pour la sécurité au palais de justice de Bruxelles. Il considère que chacun doit être contrôlé, et pas seulement les avocats.

« Il faut débloquer dans l’urgence des moyens techniques et des effectifs humains supplémentaires pour assurer au palais de justice de Bruxelles une sécurité efficace et adaptée », a affirmé le bâtonnier Stéphane Boonen. « C’est-à-dire que, selon nous, il faut bien évidemment maintenir une sécurité forte dans les bâtiments de justice mais il faut développer plus de moyens pour que les avocats et autres travailleurs de la justice puissent faire leur travail », a-t-il ajouté.

« La file interminable chaque matin, ce n’est plus possible. Car, si certains juges se montrent compréhensifs, d’autres moins. Et ce qui s’est passé ces derniers jours, c’est qu’en chambre du conseil notamment, des affaires ont été prises sans qu’on attende que les avocats soient arrivés », a poursuivi le bâtonnier.

L’homme s’interroge en outre sur la logique des contrôles et plaide pour leur extension. « Il faut que tout le monde soit traité sur un même pied d’égalité, et ce dans tous les bâtiments de justice à Bruxelles. Nous nous demandons pourquoi les avocats sont les seuls à être contrôlés alors que les membres du ministère public et le personnel du palais, eux, ne le sont pas. Et nous nous demandons aussi pourquoi dans les autres bâtiments, comme au tribunal de première instance, il n’y a aucun contrôle », a-t-il avancé.

« Je peux également vous dire que, par exemple, il n’y a pas de contrôle non plus dans le bâtiment qui abrite le tribunal du travail et la cour du travail, en face du vieux palais, de l’autre côté de la place Poelaert. On y a par contre bloqué les issues de secours. Imaginez ce qu’il se passerait en cas d’incendie. C’est une aberration », a encore commenté Stéphane Boonen.

« En ce qui concerne l’ancien palais de justice, il faudrait prévoir différents accès sécurisés, pas un seul. Et pour cela, il faut développer plus de moyens. Il faut une sécurité mais une sécurité rationnelle, efficace et adaptée, qui permettrait à tous les acteurs de la justice, et donc notamment aux avocats, de pouvoir faire leur travail ».

« On nous a dit qu’un deuxième accès allait s’ouvrir par la rue aux Laines, mais le 15 novembre prochain seulement. Pourquoi pas avant? », se demande le bâtonnier. La situation actuelle est en tout cas intenable, a-t-il conclu.

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