Nizar Trabelsi : enfin extradé

La Belgique n’a pas une justice expéditive. Elle prendrait plutôt ses aises. En 2007, les Etats-Unis demandent l’extradition de Nizar Trabelsi, condamné à Bruxelles à dix ans de prison, en 2003, pour crimes terroristes (sa préparation d’un attentat contre la base américaine de Kleine Brogel).

On connait aujourd’hui les motifs du mandat d’arrêt: complot en vue de tuer des ressortissants américains, tentative d’utilisation d’armes de destruction massive, soutien et fourniture de ressources et de matériel à une organisation terroriste. Les Américains devront encore patienter six ans tant la Belgique hésite. Elle tient à s’entourer de toutes les garanties sur le plan des droits de l’homme. Elle veut être sûre que Trabelsi ne sera pas condamné à la peine capitale et qu’il ne subira pas en prison des traitements inhumains et dégradants.
Ayant obtenu tous ses apaisements, le ministre de la Justice, Stefaan De Clerck (CD&V), signe un arrêté ministériel d’extradition, le 23 novembre 2011, en promettant d’attendre, avant de l’exécuter, la fin de la procédure introduite par les avocats de Trabelsi devant la Cour européenne des droits de l’homme. C’est cette promesse qui n’a pas été tenue.

L’élément déclenchant ? Le 23 septembre dernier, le Conseil d’Etat, saisi d’un recours, validait la décision d’extrader Trabelsi, en soulignant le caractère dangereux du personnage (le grade 3 sur une échelle qui en compte 4) et l’existence des garanties américaines. La décision de mettre Trabelsi dans un avion pour Washington n’a donc pas été prise à la sauvette ni à la légère. Des dizaines de juges se sont penchés sur le dossier en amont de la décision de Stefaan De Clerck, puis d’Annemie Turtelboom (Open VLD). Cette dernière a veillé à obtenir l’appui du gouvernement Di Rupo. La victoire de Trabelsi, obtenue en extrême urgence, devant un juge bruxellois, qui n’a eu que quelques heures, jeudi soir, pour examiner le dossier, n’annule pas cette somme convergente de réflexions. Les intérêts individuels et collectif ont été soigneusement soupesés. En un mot comme en cent : Trabelsi était indésirable.

Il aurait pu, comme d’autres terroristes ou jugés comme tels, faire profil bas. Ainsi, le malin Tarek Maaroufi qui, ayant purgé sa peine en Belgique, fait des va-et-vient entre Molenbeek, où il a des attaches familiales, et son pays d’origine, la Tunisie, où les Frères musulmans au pouvoir l’ont accueilli à bras ouverts.

Mais le caractère « explosif » de l’ancien footballeur ne le lui a pas permis. Ni son statut de star du djihad ayant approché Oussama Ben Laden. Ni son entourage islamiste, bien décidé à souffler sur les braises de la révolte. La pasionaria du djihadisme belge, Malika el Aroud, avant d’être jugée et condamnée, avait eu le temps de mettre en place autour de Trabelsi un réseau de solidarité qui passait, entre autres, par la stratégie matrimoniale.

Avec une épouse de nationalité belge, Nizar Trabelsi aurait pu faire valoir un argument pour rester en Belgique et retarder encore la procédure. Détenu depuis un an en attente de son extradition (il avait fini de purger sa peine), il était fréquemment changé d’établissement pénitentiaire, en vue de retarder un éventuel mariage, dont la procédure est liée au lieu de résidence. Sa demande d’asile politique avait, elle aussi, échoué. Ce petit jeu du chat et de la souris ne pouvait pas durer éternellement. Cela ne grandissait pas les institutions belges, une fois leur décision prise de livrer Trabelsi à l’Oncle Sam.

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