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Nationalisme wallon: l’allusion de Demotte fait tiquer du côté francophone

Le Vif

L’allusion qu’a faite mardi le ministre-président Rudy Demotte (PS) au nationalisme wallon en a fait tiquer plus d’un dans les rangs des partis francophones. Dans la majorité, cdH et Ecolo évoquent une maladresse dans le choix du terme. Dans l’opposition, le MR s’est montré plus critique.

Lors de la conférence de presse de présentation des Fêtes de Wallonie 2013, le ministre-président a placé celles-ci dans une perspective historique, y voyant l’expression d’un nationalisme wallon. Nationalisme, a-t-il précisé, qui ne serait pas réducteur et veille à reconnaître l’identité de tiers. Chaque année, la Wallonie invite un pays ou une région lors des Fêtes, a-t-il rappelé. Interrogé par « La Première » (RTBF), il a parlé d’un nationalisme positif, qui consoliderait la Belgique, à l’inverse d’un nationalisme flamand, « venin » pour le pays.

« Il n’existe pas de bon et de mauvais nationalisme; il n’y a que le nationalisme tel qu’on l’a connu dans l’entre-deux guerres et le désastre qui en a suivi. Il n’y a pas si longtemps, le roi Albert II rappelait les dangers du nationalisme et voilà que le ministre-président wallon le revendique », a fait remarquer le député fédéral Olivier Destrebecq (MR).

Le chef de groupe Ecolo au parlement wallon, Manu Disabato, s’est quant à lui attaché à distinguer la forme du fond dans le discours de M. Demotte. « La forme est un peu maladroite et véhicule des idées préconçues au départ d’un terme qui n’est pas approprié. Nous préférons parler de citoyenneté active pour mobiliser les gens autour d’un projet wallon, comme le fait le gouvernement autour du plan Marshall 2.vert ».

« Tempête dans un verre d’eau », a jugé le chef de groupe cdH, Maxime Prévot, assis à côté de M. Demotte lors de la conférence de presse. « C’est tout au plus une maladresse. Le ministre-président est quelqu’un de pondéré et non quelqu’un qui utiliserait ce genre de terme pour faire de la provocation. Le mot a été utilisé dans une mise en perspective historique. Son usage est un peu malheureux car il véhicule beaucoup de connotations négatives, particulièrement dans notre pays ».

Une stratégie pour détourner l’attention

Le chef de groupe MR au parlement wallon, Willy Borsus, voit dans les propos de Rudy Demotte sur un nationalisme wallon une façon de détourner l’attention du public sur les problèmes du gouvernement à la veille d’une rentrée où de gros dossiers restent en rade.

A la veille des vacances, le gouvernement Olivier a interrompu son conclave budgétaire, le projet de Code du développement territorial (Codt) n’a pu faire l’objet d’un accord en 2e lecture, le chômage est à son niveau le plus haut depuis de nombreuses années, etc., a rappelé le chef de groupe de l’opposition.

« Le ministre-président tente de détourner l’attention de la vraie situation de la Wallonie. Nous engageons plutôt le gouvernement à se saisir pleinement des vrais problèmes du quotidien des gens plutôt que de faire du nationalisme wallon sa priorité de rentrée », a expliqué M. Borsus.

Le député libéral s’étonne par ailleurs d’une telle sortie dans le chef d’un homme qui est à la fois ministre-président du gouvernement wallon et de la Fédération Wallonie-Bruxelles. « C’est surprenant. D’autant plus que Rudy Demotte était la voix d’un espace francophone, d’une dimension Wallonie-Bruxelles et que nous sommes dans un moment où l’on fait aboutir la 6e réforme de l’État et où l’on structure un nouvel équilibre entre les entités fédérées et l’État fédéral ».

M. Borsus voit dans cette sortie une « maladresse ». « Les Wallons n’ont pas attendu les déclarations du gouvernement wallon pour savoir ce qu’il convient de faire pour être un bon Wallon. Ils n’ont pas à recevoir ce genre de leçon du gouvernement ».

« La Wallonie n’a rien à gagner de l’affirmation d’un nationalisme d’un autre temps »

Des déclarations « non seulement hasardeuses mais préjudiciables à la Wallonie elle-même », ont regretté pour leur part les FDF. « La Wallonie n’a rien à gagner de l’affirmation d’un nationalisme d’un autre temps », ont expliqué le président, Olivier Maingain, et la vice-présidente wallonne, Monique Félix.

En Flandre, un nationaliste flamand, et non des moindres, a réagi: Geert Bourgeois, l’un des fondateurs de la N-VA. Le ministre des Affaires intérieures du gouvernement flamand a accueilli positivement les déclarations du ministre-président wallon.

« Rudy Demotte pour un nationalisme wallon ouvert. Les Wallons, un peuple uni: merveilleux, tout comme la N-VA pour un nationalisme inclusif et ouvert », a-t-il déclaré sur Twitter.

En septembre 2010, à l’heure où la N-VA sortait triomphante des élections législatives, un autre homme politique avait évoqué Jules Destrée et appelé la Wallonie « à oser la carte d’un nationalisme wallon »: Jean-Jacques Viseur (cdH). Celui qui était alors bourgmestre de Charleroi avait essuyé une volée de bois vert. Le cdH avait pris ses distances en indiquant que M. Viseur s’était exprimé en son nom personnel et que son discours n’avait pas été rédigé en concertation avec le parti.

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